50 ans d’émerveillement à Radio-Canada

Dans une longue interview, le passionné de sciences et d’information est revenu sur sa riche carrière, sur ses anciennes ambitions d’acteur, sur sa dyslexie, sur les dessous du direct et sur les grands événements qu’il a couvert, depuis l’explosion du Challenger. navette vers le massacre de Polytechnique, incluant de nombreuses avancées scientifiques.

Charles Tisseyre est né le 15 juillet 1949 à Montréal, de Pierre Tisseyre, conseiller juridique, journaliste et rédacteur littéraire, et de Michelle Tisseyre, journaliste et animatrice vedette de Radio-Canada depuis plus de 25 ans.

Avec un tel bagage familial, on aurait pu croire que le parcours de Charles Tisseyre était tracé d’avance, mais il n’en est rien.

Un parcours scolaire difficile plombé par la dyslexie

Le jeune Charles rencontre ses premiers écueils dans une petite école, où il a de grandes difficultés à suivre en classe. J’ai eu du mal à apprendre à lire et à écrire. Quand je suis arrivé à la maternelle, je voyais mes amis progresser et je n’y arrivais pas.il se souvient. Vous êtes traumatisé par cela. Très vite, vous pensez que c’est parce que vous n’êtes pas intelligent.

Heureusement, il a été pris en charge par un spécialiste dévoué, qui lui a appris intensivement à lire et à écrire. Cela a égalisé les règles du jeu pendant un certain temps, mais à 12 ans, il se préparait à redoubler la troisième année pour la deuxième fois. Le diagnostic officiel n’était pas encore posé, mais Charles Tisseyre souffrait de dyslexie.

Le petit Charles Tisseyre, dans les années 1950.

Photo : Charles Tisseyre (Photo personnelle)

Mes parents m’ont transféré à Stanislas et je suis arrivé dans la classe de Roland Boutaric. C’était un changement cosmique. Il avait une telle autorité sur nous qu’on aurait pu entendre une mouche voler, explique-t-il. Mais parce qu’il était un très bon pédagogue, un grand vulgarisateur, il était fascinant à écouter.

Cette discipline a aidé le jeune homme à persévérer dans ses études, mais quelques années plus tard, au lycée, il est de nouveau confronté à l’échec. En désespoir de cause, ses parents le transfèrent à nouveau, cette fois à l’Institut de Culture Générale, dirigé par Marcel Alexandre.

Il m’a accepté à une condition : « nous allons travailler dur pour vous aider à réussir, mais vous devez donner le meilleur de vous-même ». Il m’a serré la main et ma vie a changé pour toujoursexplique l’hôte.

La dyslexie l’a suivi tout au long de sa vie, mais Charles Tisseyre s’en est sorti en redoublant d’efforts. À Radio-Canada, il se promenait toujours avec un dictionnaire à la main et se relisait constamment pour ne pas se tromper.

Les dyslexiques ont un super pouvoir : le travail. Plus vous travaillez, plus vous vous améliorerez et plus vous réussirez.

Une citation de Charles Tisseyre

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Charles Tisseyre en 1970, à l’âge de 21 ans

Photo : Radio-Canada

Briser une porte fermée

Après ses études secondaires, Charles Tisseyre envisage deux orientations professionnelles : enseignant ou comédien. Cependant, sous la pression de son père, il obtient d’abord une licence en droit, domaine qui le rebute rapidement en raison de son caractère très aride.

C’est au début de la vingtaine qu’il commence à envisager sérieusement une carrière en journalisme, à Radio-Canada, un endroit qu’il admirait pour y avoir passé beaucoup de temps avec sa mère lorsqu’il était enfant. Mais la chaîne publique n’allait pas lui dérouler le tapis rouge.

Je suis allé moi-même à la porte d’entrée et j’ai dit que je voulais postuler, même s’il n’y avait aucun poste affiché.il dit. J’ai postulé, mais ça n’a rien donné, ça a duré des mois et des mois.

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Charles Tisseyre, au début de sa carrière à Radio-Canada, dans les années 1970.

Photo : Radio-Canada

La chance a finalement frappé quelques années plus tard, lorsque le rédacteur en chef de l’émission Ici, où travaillait son ancienne petite amie, l’a référé à Radio-Canada International, pour un poste d’annonceur-producteur. Lors de son audition, le présentateur en chef a répondu : Ça ne marche pas du tout, d’abord, ta voix est trop nasillarde.

Six mois plus tard, après avoir fait un peu de théâtre et suivi des ateliers de lecture à voix haute, il obtient le poste. Son premier jour de travail était le 18 juin 1974, il y a 50 ans.

J’avais une émission en direct d’une heure, cinq jours par semaine, diffusée en Afrique. J’ai produit l’émission et je l’ai animée. C’était une super formation, j’ai tout appris, il se souvient. Il a passé quatre ans à Radio-Canada International, avant d’accepter un poste de journaliste à la salle de presse.

En 1978, le journaliste Charles Tisseyre est assis derrière une machine à écrire dans la rédaction.

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Charles Tisseyre à la rédaction en 1978.

Photo : Radio-Canada

L’explosion de la navette Challenger : la naissance d’un vulgarisateur

Entre 1978 et 1986, Charles Tisseyre est affecté à l’information régionale et nationale, tout en réalisant plusieurs reportages scientifiques. C’est dans ce fauteuil que sa carrière prend un tournant inattendu, le 28 janvier 1986.

Cette date est restée marquée dans l’histoire comme un échec cuisant de l’exploration spatiale américaine : le jour où la navette spatiale Challenger de la NASA s’est désintégrée en plein vol 73 secondes après le décollage, une tragédie qui a coûté la vie à sept astronautes.

C’est là qu’on a découvert que j’avais peut-être un talent pour l’animation, explique le journaliste.

Une citation de Charles Tisseyre

Je me suis levé pour assister au lancement de la navette, car je savais que les premières minutes étaient critiques. Et puis je l’ai vu exploser. J’étais tellement affecté que je me suis assisil se souvient.

Constatant son vif intérêt pour la tragédie qui se déroule, son patron Claude St-Laurent lui dit alors Charles, va te raser, emprunte une cravate et passe à l’antenne. Aux côtés de Céline Galipeau, Charles Tisseyre donne une véritable leçon de vulgarisation, démontrant toute l’étendue de son savoir encyclopédique.

Après quelques heures d’antenne, tous les collaborateurs de la rédaction se sont spontanément mis à applaudir les deux collègues. J’ai épaté mes collègues car j’étais un geek de l’espace depuis des années, j’avais tout lu sur la navetteil se souvient.

La navette Challenger en plein vol juste avant son explosion le 28 janvier 1986

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La navette Challenger a explosé en plein vol le 28 janvier 1986.

Photo : Radio-Canada

La tuerie de Polytechnique et le décollage de la navette Discovery

Peu après cet épisode, Radio-Canada confie à Charles Tisseyre la coanimation de Montréal ce soirun nouveau magazine d’information présenté en début de soirée, qu’il pilote avec Marie-Claude Lavallée à partir de 1986.

Durant cette période, il interviewe plusieurs grands noms de la scène culturelle, comme Diane Dufresne, Céline Dion et Gérard Depardieu. Une marque de confiance que la haute direction renouvellera trois ans plus tard en lui demandant d’accueillir le prestigieux chaîne infos à 22h le week-end.

Charles Tisseyre anime l'émission Ce Soir, en 1986.

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Charles Tisseyre à l’émission « Montréal ce soir », en 1986

Photo : Radio-Canada / KARSENTY, Jean-Pierre

Le jeudi 6 décembre 1989, alors qu’il remplaçait Bernard Derome pour le chaîne infos cette semaine, Charles Tisseyre a été une nouvelle fois plongé au cœur d’une tragédie : le massacre de Polytechnique, qui a coûté la vie à 14 femmes. Il y avait une dizaine de personnes dans la salle de rédaction et c’était le chaos. Les gens criaient. Même le réalisateur de la série n’était pas de bonne humeuril se souvient.

h. Ça s’est bien passé. D’habitude, je respecte les rôles de chacun, mais là j’ai compris qu’il fallait que j’intervienne, parce que c’était presque anarchique. à 20 heures, ça s’est bien passé. D’habitude, je respecte les rôles de chacun, mais là j’ai compris qu’il fallait que j’intervienne, car c’était presque anarchique. »}} »>J’ai réalisé qu’en tant qu’animatrice, je devais prendre le contrôle, car on avait une couverture spéciale qui commençait à 20 heures. Ça s’est bien passé. D’habitude, je respecte les rôles de chacun, mais là j’ai compris qu’il fallait que j’intervienne, parce que c’était presque anarchique.

A l’opposé de cet événement dramatique, l’animateur a eu la chance de couvrir en direct ce qui reste l’un de ses plus beaux souvenirs de carrière : le décollage – cette fois réussi – de la navette Discovery, le 22 janvier 1992, à Cap Canaveral, en Floride.

En attendant le décollage, Charles discute avec l’astronaute Steve Maclean sur le toit des studios NBC. Des problèmes techniques à Montréal l’obligent à combler le temps, car les reportages prévus ne peuvent être diffusés. Il aura un entretien passionnant avec l’astronaute, qui sera ébloui par les connaissances approfondies du journaliste.

Vêtu d'un costume et d'une cravate, il sourit à la caméra.

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Charles Tisseyre alors qu’il animait le Téléjournal le 1er décembre 1990.

Photo : Radio-Canada / Téléjournal

32 ans de pur bonheur Découverte

Cinq mois après ce moment magique, Charles Tisseyre hérite du fauteuil de Pierre Maisonneuve comme animateur de l’émission scientifique Découverte, un poste qu’il convoitait depuis longtemps. Le journaliste a alors l’impression de renouer avec ses ambitions de jeunesse, d’enseignant et de comédien, lui à qui le réalisateur français Roger Vadim avait déjà proposé un rôle au cinéma.

Je voulais être acteur ou professeur, et c’est ce que je fais maintenant. Je suis à l’honneur, devant la caméra et j’ai aussi un rôle [éducatif]. Parfois je me pince et je me dis “putain tu as de la chance”il résume.

Charles Tisseyre souriant

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L’animateur de « Découverte « Charles Tisseyre » en 1994

Photo : Radio-Canada / Jean Bernier

L’espace, les nouveaux modes de reproduction, la manipulation du génome humain, le climat et le rôle des hydrocarbures dans son réchauffement… Autant de problématiques que Charles Tisseyre a vu évoluer au fil des années et qui ont été une source infinie de fascination pour le scientifique freak. .

Ce qu’il y a de formidable avec la science, c’est qu’il y a toujours quelque chose de nouveau. Vous n’avez jamais une journée ennuyeuse.

Une citation de Charles Tisseyre

Quand j’ai débuté à Radio-Canada, il y avait peut-être une actualité scientifique par mois. Désormais, c’est un par jour ou plusieurs fois par jour. Il y a eu une progression exponentielleil dit.

Retraite? Pas maintenant

A bientôt 75 ans, Charles Tisseyre sait qu’il devra éventuellement passer le flambeau, d’autant qu’il a eu un premier accident vasculaire cérébral en 2022, lui laissant quelques trous de mémoire, notamment au niveau des prénoms.

Mon risque d’avoir un autre accident vasculaire cérébral est réel, mais il est minime. Je suis en forme et il n’y a aucune raison médicale pour laquelle je ne peux pas travailleril explique.

Charles est face à la caméra.

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Charles Tisseyre

Photo : Radio-Canada

Toujours animé par la même passion, il n’est pas prêt de prendre sa retraite. Je le prends une année à la fois, j’ai signé mon contrat pour l’année suivante. C’est très difficile de quitter un métier de journaliste scientifique parce que c’est tellement exaltant, intéressantil résume.

Et si je devais partir – évidemment je vais partir un jour – je pense que je retournerais à l’école. J’aime me cultiver et apprendre des choses.

 
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