Par
Emma Grivotte
Publié le
15 novembre 2024 à 13h30
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Écrite en latin en calligraphie appliquée, la lettre est datée de 1368. « C’est le seul manuscrit de l’époque de l’abbaye retrouvé à ce jour, écrit par Abbot Robert le Brument »exults Éric Dumont.
Le président de l’association Musicales de Cormeilles, quand il a du temps libre, le consacre enquêtez sur le passé de l’abbaye de Cormeilles, un grand monument dont il ne reste aujourd’hui presque aucune trace, sur son emplacement à Saint-Pierre-de-Cormeilles (Eure).
Jusqu’à présent, les documents dont disposaient les historiens et les passionnés d’histoire locale étaient postérieurs et extérieurs à l’abbaye.
C’est extraordinaire d’avoir trouvé cela, car tous les livres disent qu’il ne reste aucun document de l’époque de l’abbaye.
Conservé en Angleterre
Mais ils n’étaient pas allés vérifier hors de France ! Éric Dumont a déniché une pépite suite à un voyager au Royaume-Uni il y a quelques mois, qu’il a réalisé dans le but précis d’investiguer le monument. Quoi de mieux pour faire des recherches dans « les lieux qui avaient été possessions de l’abbaye de Cormeilles » ! Par exemple, le Prieurés de Chepstow au Pays de Galles, et Newent en Angleterre.
À Newent, Éric Dumont entre en contact avec une société historique locale. « Son directeur m’a dit queil avait dans son salon une copie d’un document concernant l’abbaye de Cormeilles »relates Cormeillais.
Il lui dit que l’original est conservé aux « National Archives » à Londres et lui donne la référence. Le passionné en demande alors un exemplaire au service, qui lui « l’a envoyé au bout de six mois », gratuitement.
Dans cette lettre, Robert le Brument, qui fut abbé de Cormeilles de 1365 à 1405, nomme Jean Lefèvre, moine, au poste d’huissier, ou prieur de Newent, une position juste en dessous de l’abbé dans la hiérarchie.
“Entretenir et diriger ledit bailliage, comprenant l’église de Beckford, et diriger leur prieuré de Striguil (Chepstow) au Pays de Galles en cas de vacance”, précise la traduction. “C’est un Normand qui fut envoyé pour diriger le prieuré de Newent”souligne-t-il, à l’époque où le duc de Normandie était roi d’Angleterre, et où l’abbaye était très célèbre dans la Perfide Albion.
L’encre est toujours clairement visible et non transparente. C’est un document qui a été très bien conservé, dans de bonnes conditions.
A noter que Robert le Brument est l’un des rares abbés véritablement originaires de la région. : il est né à Cormeilles. Son successeur fut également l’abbé Donnel, qui participa au procès de Jeanne d’Arc à Rouen (par le camp anglo-normand) et à sa condamnation.
Cormeilles a récupéré les armoiries ?
Sur le sceau de cire qui accompagne le document, « on voit très clairement l’abbé, sa crosse, ainsi qu’une dernière représentation de l’abbaye, et même ses armoiries”, s’exclame Éric Dumont. Ces armoiries sont censées représenter un cerf sur fond rouge, comme celles de la commune de Cormeilles qui les récupéra en 1856.
Sur le sceau, Éric Dumont ne parvient cependant pas à distinguer l’animal. Il souhaite approfondir ce point et a lancé un appel au maire et à l’évêque d’Évreux pour qu’ils fouillent les archives ecclésiastiques du diocèse :
Pour identifier les armoiries, la mairie a dû faire des recherches car elles appartenaient au diocèse.
Après cette première découverte, Éric Dumont nourrit l’espoir de « retrouver d’autres manuscrits » liés à l’ancienne abbaye. « À mon retour en Angleterre, j’irai aux Archives nationales de Kew pour voir si elles en connaissent d’autres. »
Pour lui, une joie suprême serait de trouver une représentation du bâtimenten dessin ou en peinture, pour toujours pouvoir le faire revivre dans les esprits.
Deux pierres de l’ancienne abbaye placées dans le presbytère
Si l’édifice, démantelé après la Révolution, n’est plus du tout visible hormis son mur d’enceinte et le prieuré qui avait été construit à côté, quelques reliques ont néanmoins pu être rassemblées grâce aux recherches d’Éric Dumont. Au printemps, la commune de Cormeilles a dédié un espace et une plaque à l’entrée du jardin du presbytère à deux pierres du monument, en pierre de Caen.
Le plus gros était à la mairie : « Tout le monde savait » qu’il venait de l’abbaye. L’autre, une pierre du cloître, était conservée par la famille d’un ancien propriétaire des lieux, médecin, qui avait organisé des fouilles privées et sans surveillance sur le site de ses restes en 1902. « Il y a des trous parce que les pierres s’emboîtent. comme des Legos pour faire les colonnes», note Éric Dumont, qui espère rapatrier prochainement une autre pièce.
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