“Quand j’étais petite, ma mère avait un Gris du Gabon… J’avais envie de refaire l’expérience, mais ça s’est mal passé», raconte Catherine, une infirmière de 31 ans originaire de Flémalle. Amoureuse des animaux, elle a décidé d’acquérir un perroquet le 16 mai dernier dans une animalerie de la région liégeoise. “Je suis allée plusieurs fois au magasin, j’ai eu un vrai lien avec ce perroquet», se souvient-elle. Après plusieurs jours de réflexion, elle décide de l’acquérir au prix de 1 850 €.
Dès son arrivée chez lui, le jeune perroquet, Pedro, présente des signes inquiétants : toux et perte de plumes. “Tout le monde m’a dit que c’était le stress», explique Catherine. Inquiète, elle envisage de faire tester son oiseau pour les cinq principales maladies du perroquet, mais l’animalerie l’en dissuade : «Ils m’ont raconté l’histoire d’un perroquet qui ne s’est jamais réveillé après une prise de sang« . En effet, les perroquets doivent être anesthésiés afin de prélever un échantillon de sang.
La radio a révélé…
Malgré ses craintes, Catherine consulte enfin un vétérinaire ; elle ne veut pas faire de prise de sang la première fois, mais étant donné la détérioration de l’état de santé de Pedro, elle change d’avis. “Il a commencé à perdre beaucoup ses plumes. Nous avons fait une anesthésie, une prise de sang, une radiographie… c’est la radiographie qui a révélé un nodule au poumon. C’est un champignon qui l’a contaminé», raconte-t-elle, la voix tendue par l’émotion.
Le perroquet est soigné, mais son état s’aggrave encore. Il se plume au point d’attaquer sa peau. Le diagnostic final a été un coup dur : on lui a diagnostiqué la maladie du bec et des plumes, une maladie auto-immune comparable au sida chez l’homme. « Vtu as un mauvais pronostic, nous avons décidé de le laisser partir», confie Catherine, le cœur brisé. Pedro a donc été euthanasié à 10 mois et 26 jours, très jeune pour un animal qui peut vivre plusieurs décennies.
Mise en demeure
La Flémalloise soupçonne l’animalerie d’être à l’origine de la maladie de son perroquet. “J’y suis allé quatre fois pour faire du shopping et des conseils. C’était à partir de la deuxième fois que j’ai dit qu’il toussait», se souvient-elle. L’employé lui a alors assuré que la toux du perroquet n’était pas grave, qu’il imitait simplement un employé qui toussait en préparant les mélanges de graines. “Je pense qu’ils voulaient m’empêcher de faire la prise de sang», raconte Catherine, qui a déboursé plus de 2 500 euros à l’animalerie avec tous les accessoires, auxquels s’ajoutent 500 euros de frais vétérinaires, 200 euros d’analyses et 60 euros de médicaments.
“Mon vétérinaire m’a dit : ‘Ne me dis pas qu’il vient de là ?’ Ils ne respectent pas l’isolement, les perroquets se contaminent entre eux’», ajoute Catherine, précisant que son vétérinaire connaît l’élevage et ses pratiques. “Ils nous font signer un document indiquant qu’ils peuvent échanger l’animal s’il est malade. Je ne suis pas allé à la boulangerie, ils ne vendent pas d’animal comme un petit pain. Il m’a parlé très vite, il était vraiment bien, c’est assez triste.“
Déterminée à obtenir justice, Catherine contacte Testachats. “Normalement, c’est une garantie d’un an. Ils font signer un document attestant qu’ils vendent l’animal, mais ne garantissent pas sa durée de vie. Un document précise que nous avons 48 heures pour dire s’il y a des maladies», s’indigne-t-elle. Testachats a adressé une mise en demeure à l’animalerie, qui dispose d’un délai de 15 jours pour répondre favorablement, à défaut de quoi l’association de consommateurs est prête à engager une action en justice.
Contactée par nos soins, l’animalerie en question n’a pas répondu à nos demandes d’entretiens.
Que dit la loi ?
Heidi Trasschaert, avocate de l’Unité wallonne du Bien-être animal, confirme que l’animalerie en question est bien agréée. “Les établissements animaliers doivent respecter les conditions d’agrément fixées par un arrêté du Gouvernement wallon», explique-t-elle. “Ils doivent avoir un vétérinaire contractuel ; ces derniers doivent visiter l’établissement une fois par trimestre. Les animaux doivent être contrôlés deux fois par jour. S’ils ne semblent pas en bonne santé, le gestionnaire doit contacter le vétérinaire contractuel..» Heidi Trasschaert rappelle également que «aucun animal en contact avec un animal atteint d’une maladie contagieuse ne peut être vendu, à moins que le vétérinaire contractuel ne le déclare en bonne santé et apte à la vente.« .
Liberté de commerce
Concernant la garantie de 48 heures appliquée par l’animalerie, l’avocat explique que «tout commerçant peut appliquer ses conditions générales. Lorsque l’acheteur signe ces termes et conditions, il sait à quoi s’attendre. C’est la liberté du commerce, la liberté contractuelle« . Elle souligne cependant que «quel que soit l’animal, si vous achetez l’animal et que vous avez des doutes, vous allez voir un vétérinaire pour avoir un diagnostic et avoir des preuves. Il ne faut pas aller demander l’autorisation à l’animalerie. Je comprends qu’elle ait été découragée par l’animalerie, mais s’il y a un conflit entre l’acheteur et le vendeur, le mieux est qu’elle prenne conseil auprès d’un vétérinaire. Si le vendeur n’est pas très attentif, il faut s’adresser au juge de paix.
Des contrôles pas si fréquents
Interrogée sur la fréquence des contrôles dans les animaleries, Heidi Trasschaert précise : «L’animalerie a été agréée en 2015. Il y a un contrôle obligatoire au moment de l’agrément. Aujourd’hui, nous sommes en 2024, donc cela fait peut-être 10 ans que l’animalerie n’a pas été inspectée. »
Bruno Cardinal, coordinateur de l’Unité Bien-être Animal du SPW, ajoute que « leLes animaleries agréées doivent répondre à des spécifications complètes. Il est de la responsabilité de l’animalerie de prodiguer les soins, d’appeler un vétérinaire, etc.“
“En cas de soupçons concernant le bien-être animal ou le non-respect de la législation, il est important que les citoyens nous contactent.», insiste Bruno Cardinal. “Ce type d’animalerie fait partie de notre périmètre de contrôle. Nous sommes une petite équipe de 13 personnes sur le terrain, en partie vétérinaires. Si l’on soupçonne un problème, il est important de le faire savoir.“
Pour signaler un problème à l’Unité de protection des animaux, contactez le 1718 et tapez 2. »Le rapport sera pris en compte et fera l’objet d’un suivi», assure le coordinateur.
Vers 150 saisies en 2024
La Cellule a ouvert 2 563 dossiers en 2023, essentiellement sur la base de plaintes. “En complément de ces dossiers, nous collaborons avec les zones de police. Nous proposons notre expertise aux policiers qui opèrent plus localement», explique Bruno Cardinal. “En 2023, il y aura 110 saisies pour la protection de plus de 1000 animaux. Pour 2024, nous atteindrons certainement les 150 saisies.“
Le coordinateur de l’Unité Bien-être Animal confirme également qu’il est «tout à fait possible que l’animalerie n’ait pas été inspectée depuis qu’elle a reçu son agrément« .
Des conditions de vie inadaptées ?
Selon Michel Vandenbosch, président de GAIA, acheter des animaux exotiques dans une animalerie est rarement une bonne idée. “Ils peuvent être traumatisés par leur confinement et leur isolement. Si le vétérinaire en question pense que ce n’est pas le premier perroquet malade en question, cela en dit long.», déclare-t-il. “N’allez pas dans les animaleries, vous pourriez être très déçu. Jetez un œil à un refuge, car ils ont peut-être accueilli un perroquet gris.“
Michel Vandenbosch appelle également à réfléchir sur le mode de vie de l’animal recherché : «Comme tous les perroquets, ils font partie des oiseaux les plus intelligents. Ce sont des êtres sociaux. Lorsqu’on les enferme seuls dans une cage, dont ils ne sortent jamais, ils commencent à arracher leurs plumes. C’est probablement aussi dû à l’ennui. Ce sont des oiseaux tellement intelligents qu’ils en deviennent frustrés, c’est un comportement névrotique. C’est anormal et aberrant», dénonce Michel Vandenbosch.
je veux aller loin
Quoi qu’il arrive, Catherine ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, elle veut tout faire pour changer les méthodes de cette animalerie : «Je veux aller loin, ça n’y arrivera pas pour moi, mais je veux que ce magasin fasse un effort, je veux qu’ils arrêtent de vendre ça comme des petits pains, sans être sûr que l’animal n’est pas en bonne santé, ce n’est pas le cas concevable.”conclut-elle avec amertume.