Les entreprises autochtones minées par les inégalités, confirme la Banque du Canada

Un premier rapport de la Banque du Canada sur les entreprises autochtones confirme qu’elles ont beaucoup moins accès au crédit des institutions financières que les entreprises non autochtones.

Un constat sans surprise, selon deux experts travaillant sur l’autonomie économique autochtone. Cela nous rappelle que les inégalités économiques et les obstacles au financement dans les communautés sont systémiques et sont connus depuis des décennies.

Avec cette enquête nationale, publiée le 24 mai, la banque centrale entend dresser un premier portrait des entreprises indigènes du pays à partir de de nouvelles données fiables.

Pour ce faire, elle a travaillé le Conseil canadien pour le commerce autochtone (Nouvelle fenetre) (CCAE), qui recense environ 20 000 entreprises autochtones, pour fournir la plus grande enquête statistique jamais réalisée sur le sujet.

Plus de 2 600 entreprises des communautés des Premières Nations, inuites et métisses du Canada ont répondu à l’enquête sur leurs attentes en matière de Source de financement, d’inflation et de salaires, entre mai et septembre 2021. Ces données ont ensuite été comparées à celles d’autres enquêtes réalisées. avec des entreprises non autochtones.

Et ce qui ressort globalement, c’est que Les entreprises autochtones utilisent moins le crédit des institutions financières que les personnes non autochtones.

Pour la sociologue atikamekw Karine Awashish, spécialisée dans l’autonomie économique autochtone, l’enquête demeure surface et le manque de contexte. Elle salue toutefois cette approche, étant donné qu’il existe peu de recherches majeures sur le sujet.

Ce rapport reste très général, mais je félicite l’initiative. S’il y a une prise de conscience des problèmes économiques autochtones, cela constitue déjà un grand pas en avant. Nous devons continuer à essayer de nous comprendre et d’engager le dialogue

Une citation de Karine Awashish, doctorante en sociologie et spécialiste en économie sociale en contexte autochtone

Si le gouvernement veille à ce que ces nouvelles données promouvoir une prise de décision éclairée pour les organisations autochtonesMme Awashish estime plutôt qu’ils seront utiles aux acteurs non autochtones qui interagissent avec ces entreprises.

C’est avant tout un cadre de référence qui permet de se parler et de demander des actions concrètes au gouvernement en termes de politiques publiques.elle croit.

Ce que dit le rapport

Elle révèle que la moitié des entreprises autochtones interrogées en 2021 étaient situées dans une communauté autochtone, ce qui représente % de la population indigène a déclaré vivre en communauté, lors du dernier recensement de 2021″, “texte” : “une proportion élevée si l’on considère que seulement 20% de la population indigène a déclaré vivre en communauté, lors du dernier recensement de 2021″}}”>une proportion élevée si l’on considère que seulement 20% de la population indigène déclarait vivre en communauté, lors du dernier recensement de 2021, précise le rapport. Le plus grand nombre d’entre eux se trouvaient en Alberta.

Les entreprises situées dans les communautés autochtones se trouvaient en grande partie dans les zones rurales et appartenaient au secteur primaire (agriculture, foresterie, pêche et chasse, et extraction minière, pétrolière et gazière), tandis que celles situées en dehors des communautés autochtones étaient principalement situées en milieu urbain. Celles-ci étaient concentrées dans les secteurs de la construction et du commerce de détail.

Pêcheurs autochtones à Saulnierville, dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, en 2021. (Photo d’archives)

Photo : CBC/Eric Woolliscroft

À peine la moitié des entreprises appartenant à des Autochtones étaient légalement constituées, ce qui est assez faible par rapport aux entreprises canadiennes (63 %). Une situation qui ne facilite pas l’utilisation des crédits, mentionne le rapport.

Les entreprises sont plus susceptibles d’obtenir du financement auprès des banques lorsqu’elles ont des employés, un chiffre d’affaires plus élevé et sont constituées en société., explique le rapport. Cependant, de nombreuses entreprises autochtones n’ont pas d’employés et leur roulement est faible.

>>>>

Ouvrir en mode plein écran

Des artisans autochtones présentent leurs créations dans le cadre du marché de Noël du Collège Kiuna, à Odanak, Québec, en 2023. (Photo d’archive)

Photo : Radio-Canada / Étienne Rivard

Le rapport note également que ces entreprises sont plus enclines à recourir aux prêts et subventions du gouvernement qu’aux crédits ; l’épargne personnelle étant la deuxième Source de financement la plus citée par les entreprises interrogées.

Seuls 6,3 % d’entre eux ont utilisé des institutions de crédit autochtones comme principale Source de financement.

Veuillez noter que ce sondage a été réalisé pendant la pandémie de COVID-19, ce qui a pu avoir un impact sur les résultats.

Des chiffres, mais quand même…

C’est bien, mais il faut maintenant aller au-delà des données pour expliquer la complexité, les nuances et les réalités autochtones, note Mme Awashish.

Par exemple, ce qui manque dans ce rapport, selon elle, c’est quenous ne parlons pas de coopératives ou d’entreprises d’économie sociale. […] Nous voulons plus de portraits, plus de témoignages, car cela doit nous être utile aussi.

Karine Awashish, originaire de la communauté Atikamekw d’Opitciwan, a cofondé la Coop Nitaskinan en 2015, une coopérative de travail qui permet le développement et la mise en œuvre de projets collectifs sur le territoire de la Nation Atikamekw. Elle accompagne les membres de la communauté dans leurs projets entrepreneuriaux.

>>>>

Ouvrir en mode plein écran

Karine Awashish, doctorante en sociologie et co-fondatrice de la Coop Nitaskinan

Photo : Avec l’aimable autorisation de Karine Awashish

C’est également le cas de la professeure en gestion Émilie Fortin-Lefebvre, qui a créé en 2019 le Centre d’études sur l’autonomie économique des peuples autochtones, dont l’objectif est de réunir les expertises autochtones et académiques. pour répondre aux besoins des peuples autochtones.

Tout comme Mme Awashish, avec qui elle collabore, Mme Fortin-Lefebvre estime que ce type de reportage devrait comprendre une composante importante de témoignages et d’entrevues, et pas seulement des chiffres.

Quand on discute avec les gens et qu’on leur pose des questions sur leurs envies, leurs défis ou les obstacles rencontrés, plus de choses sont partagées. C’est la limite de ces enquêtes quantitatives qui n’offrent que des chiffres et peu de réponsesexprime Mme Fortin-Lefebvre.

>>Portrait d'Émilie Fortin Lefebvre.>>

Ouvrir en mode plein écran

Émilie Fortin Lefebvre est professeure à l’École des sciences de gestion (ESG) de l’UQAM et directrice du Centre d’étude sur l’autonomie économique des peuples autochtones.

Photo : UQÀM

Des obstacles majeurs au financement

Jargon et lourdeur bureaucratiques, délais interminables, réticence des structures à prêter de l’argent, manque de garanties ou d’acomptes, manque de connaissance du contexte autochtone par les bailleurs de fonds, méfiance des communautés à l’égard du gouvernement… Autant d’obstacles qui freinent les entreprises autochtones, notamment en Québec, selon les deux chercheurs qui tentent de faire la lumière sur le phénomène.

Et l’obstacle majeur dans les communautés reste la Loi sur les Indiens, qui est aussi reconnue comme barrière systémique par un autre rapport de la Banque du Canada, publié en octobre 2023.

Les Québécois mettront leur maison en garantie afin d’obtenir les liquidités nécessaires au financement de leur entreprise. Pour les membres des Premières Nations vivant en communauté, cela n’est pas possible parce que les maisons ne peuvent pas être saisies en vertu de la Loi sur les Indiens.

Une citation de Émilie Fortin-Lefebvre, professeure de gestion et spécialiste de l’entrepreneuriat en communautés autochtones

Les banques sont donc réticentes à accorder un prêt, puisqu’elles ne pourront pas engager de saisie en cas de non-paiement.

De plus, les prêts intimident de nombreuses entreprises autochtones, qui préfèrent les subventions ou les sommes non remboursables, explique le spécialiste. Ils ont également du mal à déterminer les programmes auxquels ils sont éligibles, car ils ne répondent souvent pas aux critères, précise également Karine Awashish.

Le développement économique est récent dans le contexte autochtone. Nous n’avons pas une grande histoire dans ce domaine, nous n’avons pas modélisé le capitalisme. Nous avançons, mais c’est tout un mécanisme capitaliste qu’il faut décrypter et comprendre, notamment dans le développement à grande échelle.

Une citation de Karine Awashish, doctorante en sociologie

Les chercheurs soulignent que les banques prêtent à ceux qui ont déjà de l’argent afin d’avoir le plus de garanties possible. Cependant, dans la majorité des cas, comme le confirme le rapport de la banque centrale, les entreprises autochtones comprennent davantage de petites et moyennes entreprises (PME).

Nous ne sommes pas encore de grands joueurs. Nous n’avons pas de grandes mines, pas de grandes centrales hydroélectriques, ce n’est pas dans notre histoire. Les banques sont avant tout proches des grandes entreprises.

Une citation de Karine Awashish, doctorante en sociologie

Selon le doctorant, les politiques publiques doivent changer, car la culture économique actuelle, son langage, son idéologie posent problème. En tant qu’Autochtone, elle considère également que les communautés doivent apprendre à maîtriser cette langue afin de la changer. Tout comme Émilie Fortin-Lefebvre, elle œuvre à bâtir des ponts.

L’autonomie plutôt que la réconciliation

Les deux chercheurs sont unanimes sur ce point : l’enjeu est moins la réconciliation que l’autonomie économique des peuples autochtones.

Je ne fais pas de recherche sur les peuples autochtones, mais avec et pour euxexplique Mme Fortin-Lefebvre. J’essaie d’abord de savoir ce dont ont besoin les partenaires avec lesquels je travaille. C’est une démarche de co-construction de connaissances et de partage.

La spécialiste en gestion d’entreprise rapporte que la volonté des entrepreneurs autochtones qu’elle rencontre est principalement de protéger leur culture et de développer une forme d’entrepreneuriat qui leur est propre. Il existe une forte tendance à utiliser l’entrepreneuriat pour redonner à leur communautésouligne-t-elle.

L’ambition de Karine Awashish et de ses collaborateurs est aussi d’œuvrer vers cette autonomie qui vise l’interdépendance et la réciprocité.

Ce que l’on entend par réconciliation est avant tout conciliation. C’est ce qu’il faut souligner. Ce n’est pas l’amitié que nous voulons, nous voulons décoloniser les structures, l’approche juridique et les préjugés pour établir un véritable dialogue entre les Nations.

Une citation de Karine Awashish, doctorante en sociologie

Et le doctorant en sociologie pense que les communautés autochtones peuvent participer à la transformation de ce mécanisme économique pour que toute la société peut changer.

Selon Mme Awashish, l’argent doit rester un moyen et non une fin. Nous voulons prospérer, nous voulons de bons emplois, de bons salaires, mais pas seulement devenir riches ou garder de l’argent dans nos poches. L’argent, comme l’eau, doit circuler pour que tout le monde profiteelle illustre.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV A Aubigny-Les Clouzeaux, une journée olympique pour 500 écoliers
NEXT « Etrangers dehors »… Chants racistes en allemand pendant la Fête de la musique à Albi