les agents municipaux de Villeneuve-lès-Avignon dénoncent

les agents municipaux de Villeneuve-lès-Avignon dénoncent
les agents municipaux de Villeneuve-lès-Avignon dénoncent

C’est l’histoire d’une agente municipale de Villeneuve-lès-Avignon qui a fini par assigner en justice la mairie qui l’employait tout en dénonçant un « harcèlement professionnel ». Cas isolé ou face visible d’un système managérial malmené dans cette mairie de 250 agents ? Enquête.

Pour Sabrina Benhamza, le tournant est daté très précisément : le 20 novembre 2017. Ce jour-là, l’agent municipal, revenu comme contractuel à la mairie de Villeneuve en 2008 comme agent d’entretien dans les écoles, travaillait au service de la culture et au service des associations depuis deux ans. « Je fais ce que je peux malgré ma surcharge de travail, puisque j’ai été mis en polyvalence avec le service des associations en renfort.elle dit. Je couvre deux postes. » Cette charge de travail commence vite à lui peser : “C’était difficile, je n’arrivais pas à dormir, j’étais tombé à 48 kilos”elle dit.

Alors que la situation se dégrade, elle alerte ses supérieurs. «Ils ne voulaient rien entendrechuchote-t-elle. Je pensais que je ne savais pas comment travailler ni m’organiser. On m’a fait me sentir comme de la merde. Je suis arrivé au travail avec une boule au ventre. » Puis vient ce fameux 20 novembre 2017. Ce jour-là, « ma chef de service descend avec une pile de dossiers qu’elle laisse sur mon bureau, et me met la pressionelle se souviens. C’était la dernière paille. » Sabrina Benhamza ne se sent pas bien, et se retrouve en arrêt maladie, un arrêt de travail toujours en cours aujourd’hui. “Je n’ai plus recommencé depuis, c’est sept ans de procédures, de malaiseselle explique. Et ensuite j’ai eu des pressions, la mairie a même fait venir la police municipale chez moi pour me donner une main courante, un document stupide. Il y avait aussi des lettres incessantes et de nombreuses évaluations médicales. »

Finalement, elle a été écartée des effectifs de la mairie de Villeneuve en octobre 2022 après avoir refusé trois offres d’emploi de la mairie. “qui n’ont pas respecté (leurs) conditions médicales de reprise”, elle dit. Elle a déposé deux plaintes contre la mairie pour être réintégrée. De son côté, la maire de Villeneuve Pascale Bories, en charge de la délégation des ressources humaines, affirme que les propositions de réinsertion ont été » adapté à sa pathologie. Ainsi après le troisième refus, nous l’avons mis à disposition du Centre de Gestion. Nous payons toujours une partie de son salaire. Le rapport de l’expert en médecine du travail la déclare inapte. Tout s’est déroulé parfaitement selon les règles. » Pour que le tribunal administratif de Nîmes tranche, sa décision est en délibéré.

Sabrina Benhamza attaque la mairie de Villeneuve au tribunal administratif • Photo : Thierry Allard

Reste que Sabrina Benhamza dit souffrir « grave dépression suite à un harcèlement professionnel » et pointe le fonctionnement de la mairie, notamment la directrice générale des services (DGS), Sandrine Larue. Est-ce un cas isolé ? Les témoignages d’anciens agents de mairie et d’agents encore en fonction tendent à démontrer le contraire.

“J’ai passé six ans d’enfer”

« Sabrina Benhamza n’est pas un cas isolédécide cet agent toujours en fonction. Un maximum d’agents sont déjà partis, dans les communications, dans les espaces verts, dans les festivités, dans l’administration générale, et d’autres à des postes clés également. » Cet agent, que nous appellerons Florence on dit qu’elle était elle-même “victime de harcèlement” de son ancien chef de service et pointe du doigt la DGS, dont

« Si vous ne suivez pas son chemin, elle vous rend malheureux. A la mairie, elle a décidé seule que je ne progresserais jamais. J’ai subi un tel harcèlement qu’au bout d’un moment, j’ai perdu le contrôle. » Une autre agente, Clotildepartie en 2022, pointe également du doigt la DGS. « Elle est toute-puissante, et s’entoure de personnes qui lui sont redevables pour s’assurer un certain pouvoir. Elle est brutale, autoritaire, pas juste. Tout est verrouillé » , elle dit. Clotilde dit qu’elle est partie « parce qu'(elle) ne pouvait plus fonctionner dans ce système complètement opaque, en matière d’avancements, de primes. Mon avenir était complètement bloqué. »

Aujourd’hui, avec le recul, Clotilde estime avoir passé “six ans d’enfer”. Dans un autre département, Sophie toujours en poste, s’en prend également à la DGS. « Elle m’a pris en dégoût dès mon arrivée. Je n’ai jamais été crédible, elle remettait toujours en question mon travail. C’est tous ses petits comportements pour me rabaisser, pour me dire ‘c’est moi qui décide, c’est comme ça’. Et cela est allé jusqu’à la sanction, pour un fait mineur, pour lequel d’autres personnes à la mairie ont déjà été arrêtées mais sans sanction. Je suis le seul à avoir été licencié pour ça. » Elle parle aussi de“boule au ventre” en arrivant au travail, et mentionne un « le malheur au travail » . Dans ce même département, Patrick

qui a quitté la mairie de Villeneuve il y a trois ans, dénonce un système de « copinage »et a dit qu’il était parti parce que « Il n’était plus possible de travailler dans ces conditions, j’étais constamment cinglé, avec une épée de Damoclès si j’arrivais avec deux minutes de retard ou si je ne portais pas ma casquette. » Par ailleurs, plusieurs agents dénoncent un abus du conseil de discipline. «Dès qu’un fonctionnaire est dans le collimateur, on utilise le conseil de discipline comme un outil d’intimidation

dit Florence. Une agente a été convoquée et s’est reprochée de ne pas lui avoir dit bonjour. Elle est en arrêt de travail depuis quatre mois et souffre de dépression. »Florence, comme d’autres agents et certains élus de l’opposition, affirme que la situation s’est dégradée depuis deux ans, avec des départs plus nombreux. Et globalement, un mot revient : ” système “. D’autres témoignages ne visent pas directement la DGS, mais son fonctionnement général. Ainsi, un agent, toujours en service, dénonce “la pression de (sa) hiérarchie” il a aussi dit « travailler tous les jours avec une boule au ventre dès la première heure de travail »et déclare :

” Je suis épuisé. »

Quant à Geoffrey toujours en poste également, il raconte avoir demandé à plusieurs reprises à changer de service après avoir été agressé par un autre agent, mais« Rien n’a été mis en place à part un rappel à l’ordre. » « Mon état se dégrade, je ne suis pas soutenu par ma communauté » , il ajoute. Et les syndicats ? Contacté, FO Territorials, majoritaire à la mairie de Villeneuve, n’a pas répondu. «Je dis des choses aux gens, de manière factuelle»

Y aurait-il un système abusif à la mairie de Villeneuve ?” Non ” , répond sans détour la maire Pascale Bories. Elle développe : « Nous avons réalisé pour la première fois une enquête sur le bien-être au travail. Les résultats sont plutôt corrects. »Cette enquête, datée de décembre 2023, montre que 71 % des agents sont satisfaits de leurs « conditions organisationnelles et méthodologiques de travail ». 24% se contentent de faire avec et 5% sont insatisfaits. Sur « la manière dont les personnes sont traitées dans la communauté (reconnaissance, justice) », 37 % des agents « s’en occupent », 35 % s’estiment correctement traités et 28 % des agents sont insatisfaits. Sur ce point, la DGS Sandrine Larue considère que« C’est normal qu’il y ait des agents mécontents, on a du mal à recruter, du coup notre organisation est mise à mal et les conditions de travail se dégradent un peu du coup. Il est difficile pour toutes les communautés de recruter. » Sur des départs plus nombreux,“c’est indéniable et pour plusieurs raisons” , précise la DGS. Elle mentionne des agents qui“avait couvert le problème”autres

« qui sentaient qu’ils n’étaient plus dans le projet municipal et les objectifs fixés par la communauté »ou même ceux « qui ont trouvé un meilleur salaire ailleurs » , dans une communauté plus large. Elle reconnaît cependant que « Il y en a aussi qui partent parce qu’ils sont mécontents. »« On ne peut pas plaire à tout le monde, dans l’organisation, il y a des choses qui peuvent être bouleversantes, d’autres demandes auxquelles je suis obligé de dire non, parce qu’elles sont impossibles ou posent un problème d’équité. poursuit Sandrine Larue.

Lorsque je reçois des demandes, il y en a bien plus à lesquelles je dis non que celles auxquelles je dis oui. » Sa gestion serait-elle brutale ?“Je dis des choses aux gens, de manière factuelle elle se défend. Pour moi, ce n’est pas de la brutalité de mettre les gens face à leurs responsabilités, nous sommes dans le monde du travail, tous face à nos obligations. Alors oui, je suis honnête, quand j’ai quelque chose à reprocher à quelqu’un, je n’envoie pas un chef de service lui dire que je ne suis pas content. Je suis prêt à entendre certains commentaires que certains ont trouvés durs et inappropriés, mais je suis factuel. Cela ne fait certainement pas du bien de recevoir des critiques. » A elle non plus : « Les accusations de copinage m’ont beaucoup bouleversé dit Sandrine Larue.

Je suis ici depuis 25 ans, évidemment j’ai noué des liens avec beaucoup de gens. » Entrée dans l’emploi des jeunes en 1999, elle devient ensuite responsable RH puis DGS en 2015. «Je ne fais pas de différence entre les agents» insiste-t-elle. Quant aux accusations d’abus de pouvoir en matière de promotions, elle les conteste vigoureusement :« À mon poste, les décisions sont toujours collégiales. Il y a des règles d’avancement, tout est écrit, notamment que si vous avez fait l’objet d’une sanction disciplinaire l’année précédant la possibilité d’avancement, vous n’avancerez pas. L’avancement n’est pas un droit. Si j’ai un droit de vie ou de mort sur les carrières ? Certainement pas ! » Sandrine Larue évoque cependant le fait que

“Les gens ont peur (d’elle)” :“Quand je suis arrivé, je n’avais pas conscience qu’on ne reflète pas forcément l’image qu’on a de soi confie-t-elle. Malgré les efforts que je fais pour être accessible, je ne nie pas qu’il y a des moments où je projette cette image de quelqu’un de sévère, mais il y a des moments où je dois être sévère. C’est frustrant quand les gens ont peur de vous parler. Pour moi, entendre les gens penser cela de moi est un échec. » Pascale Bories reconnaît de son côté que son DGS“est franc” mais pour elle, ” Il n’y a pas de problème. C’est remarquablement efficace, cela fait beaucoup pour l’équité entre les agents. » Et l’édile cite la prime de pouvoir d’achat, les journées de cohésion, la mise en place du télétravail ou encore un agent de prévention des risques. Le maire, qui prétend avoir « identifié quelques personnes en conflit » considère que les témoignages recueillis sont

« cas isolés. »

D’ailleurs, Sandrine Larue rappelle que depuis qu’elle est à la mairie, « il y a eu six ou sept procès d’agents au total, que nous avons tous gagnés. Si j’avais eu des pratiques douteuses, il y aurait eu davantage d’agents qui nous auraient poursuivis en justice. » Et elle l’affirme : « Je n’ai pas d’ennemis à la mairie. » Il s’agit de prénoms d’emprunt, car les personnes qui ont témoigné ont souhaité rester anonymes.

 
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