Des patients privés de traitement pour un cancer de la prostate

Des patients privés de traitement pour un cancer de la prostate
Des patients privés de traitement pour un cancer de la prostate

L’uro-oncologue Fred Saad voit chaque jour des patients souffrant d’une forme grave de cancer de la prostate. Ces patients n’ont pas répondu aux deux premières lignes de traitement, y compris la chimiothérapie, et sont dans leur dernière année de vie.

Il leur reste cependant une dernière chance de prolonger leur vie et de réduire leurs souffrances : le Lutétium 177, un traitement radioactif ciblé avec peu d’effets secondaires, commercialisé sous le nom de Pluvicto.

Mais Pluvicto coûte une fortune et n’est toujours pas couvert par la Régie de l’assurance santé du Québec (RAMQ), deux ans après son approbation par Santé Canada.

« Quand nous avons épuisé tout ce qui était accessible, nous réalisons des protocoles de recherche expérimentale. Mais actuellement, nous disposons de quelque chose qui a fait ses preuves et nous n’avons pas la possibilité de le proposer à nos patients », dénonce le Dr Saad.

Un traitement qui change des vies

Pluvicto est un traitement appelé « radioligands », qui permet de cibler, visualiser et attaquer les cellules cancéreuses.

«Ça ne guérit pas, ce n’est pas miraculeux. Mais chaque traitement fait gagner du temps, retarde la progression de la maladie et prolonge la vie des patients incurables.

— Dr Fred Saad, chercheur et uro-oncologue au CHUM

Pluvicto ne guérit donc pas le cancer de la prostate, mais il peut apporter un soulagement aux patients en fin de vie. “C’est un pas en avant vers une propagation croissante du cancer de la prostate [reconnu comme] une maladie chronique, dans laquelle on peut vivre plus longtemps avec la maladie, plutôt que de mourir rapidement d’une maladie incurable.

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Le Dr Fred Saad est un spécialiste du cancer de la prostate. Il dénonce la difficulté d’accéder à un traitement prometteur. (Faculté de médecine de l’Université de Montréal)

Les résultats du traitement varient d’un patient à l’autre. « Généralement, à ce stade de la maladie, si on arrive à prolonger la vie de plusieurs mois, c’est une réussite », explique le Dr Fred Saad, spécialisé dans la forme avancée du cancer de la prostate.

« J’ai des patients qui en ont souffert dans l’étude et ils se portent bien depuis plusieurs années, alors qu’ils l’étaient normalement dans les derniers mois de leur vie. Mais c’est l’exception, on a 5 à 10 % de patients qui ont une réponse exceptionnelle où la maladie disparaît.

«Beaucoup de gens diront : ‘Ça n’en vaut pas la peine pendant quelques mois.’ Mais pour certaines personnes, cela peut prendre plusieurs années et c’est une fois qu’on commence qu’on voit dans quelle catégorie on se situe.

— Dr Fred Saad

Au-delà de la survie, le traitement réduit la douleur et augmente la qualité de vie des « patients extrêmement souffrants », ajoute le Dr Saad.

Accès inégal

Le Dr Saad milite avec impatience pour que Pluvicto soit couvert par la RAMQ pour certains patients. Selon le médecin, 100 à 150 patients par an pourraient être de bons candidats au Pluvicto.

Une centaine de personnes par an sont prêtes à en bénéficier, mais seuls les patients bénéficiant d’une assurance privée qui le couvre ou qui ont les moyens de le payer eux-mêmes y ont actuellement accès.

Cette disparité est une grande injustice aux yeux du Dr Saad.

« Idéalement, nous aimerions que cela ressemble à d’autres options thérapeutiques. Une fois que la commission estime que c’est un patient qui pourrait en bénéficier, nous souhaitons qu’il soit remboursé pour que les patients puissent en bénéficier », explique-t-il.

Malade au mauvais moment

« En tant que médecin qui voit chaque jour des personnes mourir d’un cancer de la prostate, je vois des patients me dire : ‘Pourquoi ne puis-je pas y avoir accès ?’ J’ai lu que c’était un médicament qui pourrait m’aider ». Je les regarde et leur dis : ‘Pour l’instant, ce n’est pas remboursé, donc je n’y ai pas accès’», déplore le Dr Saad.

Aujourd’hui, les patients peuvent s’informer eux-mêmes des possibilités de traitement et connaissent donc l’existence de Pluvicto, explique-t-il.

« Ils savent qu’il existe un médicament qui peut les aider. C’est d’autant plus frustrant pour le patient et sa famille de penser que cela aurait pu faire une différence.

— Dr Fred Saad

À l’inverse, le Dr Saad a partagé avec Le soleil l’histoire d’un patient qui a eu accès à Pluvicto il y a quelques années, dans le cadre d’un protocole de recherche en vue de commercialiser la molécule. Le patient en question a exceptionnellement bien répondu au traitement et reste à ce jour en rémission. « Il était là au bon moment ! » De quoi mettre en colère ceux qui n’ont pas accès au médicament.

Négociations en cours

«Pluvicto fait actuellement l’objet de négociations de prix avec son fabricant Novartis par l’intermédiaire de l’Alliance pancanadienne pharmaceutique, à laquelle participe le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec», a répondu par écrit ce dernier à la demande de Soleil.

En juin 2023, l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS) a recommandé au ministère de la Santé de rembourser Pluvicto à la condition « que le fabricant contribue à réduire la charge économique sur le système de santé ».

C’est pourquoi des négociations sont en cours, indique le ministère.

L’INESSS estime que le remboursement du Pluvicto représenterait 59 millions de dollars sur les trois premières années, pour traiter 567 patients. Cela représente en moyenne plus de 100 000 $ par personne.

 
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