« Il n’y aura plus d’urgences, plus d’accouchements, plus d’admissions… » Dès le 3 juin, les cinq cliniques privées du Gard sont en grève

« Il n’y aura plus d’urgences, plus d’accouchements, plus d’admissions… » Dès le 3 juin, les cinq cliniques privées du Gard sont en grève
« Il n’y aura plus d’urgences, plus d’accouchements, plus d’admissions… » Dès le 3 juin, les cinq cliniques privées du Gard sont en grève

Valdegour, PGS, Franciscaines et ICG, à Nîmes ; Bonnefon à Alès : les cinq cliniques du groupe Elsan cessent leurs activités du 3 au 5 juin. Un mouvement (national) renouvelable.

La fièvre monte dans les cliniques ! La fédération de l’hospitalisation privée (FHP) s’insurge contre la nouvelle tarification 2024 annoncée par le ministère de la Santé. Deux chiffres pour résumer une situation qui fait grincer des dents : la hausse des financements pour le privé est de 0,3% et de 4,3% pour l’hôpital public.

“0,3% d’augmentation, c’est incompréhensible”

Dans le Gard, le groupe Elsan se mobilise et annonce que la grève sera suivie dans ses cinq cliniques : la polyclinique Grand Sud (PGS), Valdegour, l’ICG et les Franciscaines, à Nîmes, et Bonnefon, à Alès. Réunis à la polyclinique Grand Sud, les directeurs expliquent les raisons de la colère. « Nous nous attendions également à une hausse de 4,3 %. Le gouvernement avait fait des promesses par rapport à l’inflation, d’autant plus que l’augmentation des horaires de nuit et de week-end n’a pas été mise en œuvre pour le secteur privé”, déplore Floriane Nambert, directrice de la clinique Bonnefon et de l’Institut du Cancer du Gard (ICG) qui est cogéré avec le CHU.

Maternité et urgences, des services sous pression

La maternité et les urgences sont des services sous-financés et les contraintes réglementaires sont lourdes. « 80 % du coût de l’hospitalisation correspond aux premières 48 heures, chirurgie, réanimation, personnel qualifié… ça ne change pas !

« À la maternité, nous avons besoin d’un pédiatre, d’un obstétricien, de deux sages-femmes, d’une infirmière de bloc opératoire. » explique Valérie Bazin, de la PGS. « Aujourd’hui, ce qui nous pénalise le plus, c’est la maternité. Jusqu’à quand pourrons-nous le soutenir avec un déficit ? La volonté du groupe Elsan est de le maintenir mais s’il fermait, le CHU pourrait-il absorber 1 600 naissances supplémentaires par an ?demande Floriane Nambert.

La fermeture des urgences de la clinique du 3 au 9 juin aura un impact sur l’hôpital. A l’hôpital de Bagnols, les urgences sont sous pression, à Nîmes, on compte 500 visites par jour. Comment pourront-ils absorber des centaines de patients supplémentaires ?

« 40 % de l’activité médicale dans le Gard »

«On oscille entre inquiétude et incompréhension», insiste Valérie Bazin, la directrice opérationnelle de la polyclinique Grand Sud (PGS). Dans le Gard, les cliniques représentent environ 40 % de l’activité médicale, avec 76 000 patients par an plus 27 000 pour les urgences (35 % de l’activité et neuf millions de patients au niveau national).

L’arrêt d’activité du 3 au 5 juin s’annonce total dans le Gard. « Il n’y aura plus d’admissions, de chirurgie, de chimiothérapie, de maternité, de cardiologie… », énumère Valentin Viala, directeur de la clinique Valdegour. Et pour les urgences, le mouvement est prévu jusqu’au 9 juin. « Les salariés ont validé la cessation d’activité en CSE. Les cliniques vont perdre du chiffre d’affaires mais de toute façon nous perdons déjà de l’argent”, ajoutent-ils d’une seule voix. Au niveau national, l’hospitalisation privée s’attend à un mouvement suivi à 90% dans 1030 établissements. Et cinq syndicats de médecins sur six sont également mobilisés.

«Nous travaillons main dans la main avec le CHU»

Une mobilisation qui aura un gros impact sur les hôpitaux obligés d’absorber en urgence une partie de l’activité des cliniques. “Nous ne sommes pas en concurrence avec l’hôpital public, insiste Floriane Nambert. Les deux sont complémentaires mais quand on affaiblit le secteur privé, c’est tout le système de santé qui est impacté. Le secteur privé représente 40% de l’activité mais seulement 18% du budget..

« Et 90 % de nos revenus proviennent de l’Assurance Maladie »renchérit Benjamin Viala, le directeur de la clinique de Valdegour, qui montre un schéma pour démontrer que les prix public/privé ont évolué de la même manière depuis 2000 avant de fortement baisser ces dernières années.

« Nous avons une offre de soins complète et nous travaillons vraiment en lien avec le CHU, complète Valérie Bazin. À la maternité PGS, ils nous envoient des bébés lorsque leur service de néonatalogie est plein, par exemple. Nous sommes dans un partenariat au quotidien, et c’est normal.

Inégalité salariale

L’argument du ministère de la Santé pour justifier cette différence de prix est que la reprise d’activité post-Covid a été bien plus importante dans les cliniques. Le Covid a également accéléré la conversion vers les soins ambulatoires. « Mais plus d’activités signifie aussi plus de personnel, plus d’équipements et donc plus de dépenses. Et plus de soins ambulatoires signifie moins de revenus. » » dénoue Valérie Bazin. En effet, il y a eu une augmentation de 10% de l’activité mais seulement 4% du chiffre d’affaires. « Parce que l’inflation nous affecte évidemment aussi. Le prix du matériel chirurgical a augmenté de 50 %.

Le CHU renforce ses équipes pour faire face

Comment absorber dans de bonnes conditions les patients qui ne se rendront pas aux urgences du PGS du 3 au 9 juin ou les accouchements qui ne seront plus pris en charge du 3 au 5 juin ?
Le CHU Carémeau se met en « ordre de bataille ». « Depuis que nous avons été informés de cette grève, les équipes du CHU travaillent sur plusieurs scénarios en fonction du niveau d’activité du secteur privé, afin de garantir la continuité de la population dans la prise en charge des patients ».

Président de la Commission médicale d’établissement (CME), le professeur Michel Prudhomme est en contact avec ses confrères CME présidents de cliniques privées afin de déterminer le bon niveau de mobilisation, explique-t-on au CHU.

Les services d’urgence, du SAMU et d’obstétrique et gynécologie seront renforcés si nécessaire par du personnel supplémentaire de médecins et soignants.
Quatre médecins, deux sages-femmes, neuf paramédicaux et deux assistants de régulation médicale au Samu seront mobilisés durant cette période, « soit 17 professionnels supplémentaires par 24 heures. Plus généralement, l’ensemble de l’hôpital se prépare à une réduction significative des soins en clinique. »
Cette anticipation est réalisée avec la délégation territoriale de l’ARS et en coordination avec les autres établissements publics de santé du territoire ainsi que la médecine privée.
Le CHU se veut rassurant pour les patients : « Nous réagirons en toutes circonstances comme nous l’avons fait pendant les trois années de pandémie de Covid ».

Cliniques en déficit

Les risques de cela « sous-financement » sont multiples, expliquent-ils. Sur les salariés d’abord alors que les inégalités salariales avec le public se creusent. « Un infirmier dans le public est payé 400 € de plus par mois ». Et structurellement, de nombreuses cliniques déjà déficitaires vont se retrouver en grande difficulté. Avec des risques de fermeture de certains services. 40% des cliniques privées étaient en déficit fin 2023, la FHP estime que ce sera 60% fin 2024.

Et le Gard ne fait pas exception. A Bonnefon, le budget prévisionnel 2024 qui prévoyait une hausse des tarifs de l’assurance maladie de 3 % aurait déjà fait apparaître un résultat net de moins 900 000 €. “Mais à terme, avec 0,3%, le déficit sera de 480 000 euros supplémentaires.” déplore Floriane Nambert. Au PGS, les pertes s’élèvent à 1,20 M€, aux Franciscaines et à Valdegour autour de 500 000 €.. « Dans quelle mesure pouvons-nous maintenir une offre de santé complète ?demande Valentin Viala.

«Nous voulons un plan pluriannuel»

Que nécessite une hospitalisation privée ? « Pour 2024, les prix ne changeront plus. Nous voulons une enveloppe urgente de 500 millions d’euros mais surtout un plan pluriannuel avec un vrai financement dans le futur. Pour investir, nous avons besoin d’une visibilité à moyen terme », lance Floriane Nambert qui n’hésite pas à voir dans les choix du gouvernement « une volonté politique de démanteler le secteur privé alors qu’en France on a un grand système de santé qui marche sur deux jambes !

 
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