La « renaissance » nucléaire de l’Ontario

C’est l’énergie du passé pour certains, du futur pour d’autres. En Ontario, le gouvernement de Doug Ford s’est lancé dans la plus grande expansion nucléaire de l’histoire du Canada, ramenant ainsi un vieux débat radioactif depuis des décennies.

Pickering, juste à l’est de Toronto, aurait pu être une station balnéaire. La centrale nucléaire, une immense structure en béton située au bord du lac Ontario, est entourée de verdure et de sentiers de randonnée.

Mais plus on se rapproche de l’installation, plus l’atmosphère de sérénité s’estompe. La plus ancienne centrale nucléaire du Canada est une véritable forteresse, entourée de barbelés et gardée par des policiers armés.

Les centrales nucléaires sont constamment surveillées par des gardes armés.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

L’accès est restreint : le lieu est fermé au grand public, rarement ouvert aux journalistes. Pour entrer, il faut passer un contrôle de sécurité digne d’un aéroport.

Les effets personnels – y compris les téléphones – doivent être conservés à l’extérieur, tout comme l’eau et la nourriture. Il est demandé aux visiteurs d’éviter de porter du polyester, un matériau pouvant retenir des particules radioactives.

Le niveau de radioactivité de chaque personne est mesuré à l’entrée et à la sortie de l’usine. L’objectif est, toujours, de faire en sorte qu’il n’en résulte rien. Etanchéité parfaite.

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    Des scanners sont installés à la sortie des réacteurs pour mesurer le niveau de rayonnement des travailleurs.

    Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

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    Des sas permettent l’accès des personnes et des équipements à l’intérieur des réacteurs, garantissant une parfaite étanchéité.

    Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Des sas permettent l’accès des personnes et des équipements à l’intérieur des réacteurs, garantissant une parfaite étanchéité.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Des scanners sont installés à la sortie des réacteurs pour mesurer le niveau de rayonnement des travailleurs.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Album photo: Pickering

Ed Devlin est habitué à ce protocole de sécurité strict. ans, j’entends ces bruits dans mon sommeil », « texte » : « Après 30 ans, j’entends ces bruits dans mon sommeil »}} »>Après 30 ans, j’entends ces bruits dans mon sommeil» dit celui qui travaille à Pickering depuis 1989.

Il a débuté son activité une vingtaine d’années après la mise en service des premiers réacteurs. Aujourd’hui directeur adjoint des opérations nucléaires, M. Devlin connaît la centrale comme sa poche.

Les centrales nucléaires n’ont jamais l’air modernes, dit-il en désignant les vieux boutons, leviers et tuyaux qui l’entourent. Cet équipement du siècle dernier produit pourtant 14 % de l’électricité en Ontario.

>>Un travailleur portant une combinaison hermétique et un casque.>>

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La chaleur générée par le processus de fission nucléaire est transformée en vapeur pour faire tourner les turbines.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Les deux autres centrales électriques de la province – Bruce et Darlington – répondent respectivement à 25 % et 30 % des besoins énergétiques.

À titre de comparaison, la centrale Gentilly-2, à Bécancour, a fourni moins de 2 % de l’électricité du Québec en 2012, sa dernière année d’activité.

>>Photos aériennes de la centrale nucléaire de Pickering au début du printemps. Prise le 10 avril 2024.>>

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La centrale nucléaire de Pickering, en Ontario.

Photo : Radio-Canada / Patrick Morrell

La centrale électrique de Pickering devait arrêter ses moteurs en 2024. Production d’électricité en Ontario avait déjà préparé son plan de fermeture. Des centaines d’employés comme Ed prendraient leur retraite ou seraient affectés à une nouvelle usine.

Mais en janvier, le ministre de l’Énergie de l’Ontario, Todd Smith, a annoncé son intention de prolonger la durée de vie de Pickering de 30 ans.

Quatre des six réacteurs de la centrale seront remis à neuf – un projet qui coûtera des milliards de dollars, mais dont le budget final n’a pas encore été déterminé.

>>Todd Smith lors d'une conférence de presse devant la centrale électrique de Pickering.>>

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En janvier, le ministre Todd Smith a annoncé le plus grand projet d’expansion nucléaire de l’histoire de l’Ontario.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

L’Ontario connaît une croissance explosiveassure le ministre Smith en entrevue. Les entreprises commencent à revenir en Ontario après l’avoir quitté parce que le prix de l’électricité était trop imprévisible et trop élevé.

Le gouvernement progressiste-conservateur invoque trois raisons pour justifier l’expansion du nucléaire : la croissance démographique, l’électrification des transports et les besoins de l’industrie.

ans, la demande d’électricité augmente en Ontario », « texte » : « Pour la première fois en 20 ans, la demande d’électricité augmente en Ontario »}} »>Pour la première fois en 20 ans, la demande d’électricité augmente en Ontariosouligne Todd Smith, responsable de ce portefeuille depuis trois ans et qui est rapidement devenu un champion du nucléaire.

>>Des ouvriers assemblent un CR-V à l'usine Honda d'Alliston le 5 avril 2023.>>

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L’usine Honda d’Alliston, au nord de Toronto, va être transformée pour la production de véhicules électriques. (Photo d’archives)

Photo : - Canadienne / Cole Burston

Le gouvernement de Justin Trudeau semble également plus favorable à l’idée de privilégier le nucléaire, une Source d’énergie qui génère des déchets radioactifs, mais très peu d’émissions polluantes.

En février, Ottawa a investi 50 millions de dollars dans le projet d’agrandissement de la centrale nucléaire de Bruce, sur la côte est du lac Huron – le premier investissement de ce type depuis plus de 30 ans.

Je pense que le gouvernement fédéral se rend compte qu’il ne pourra pas atteindre son objectif de neutralité carbone [en 2050] sans énergie nucléaire.

Une citation de Todd Smith, ministre de l’Énergie de l’Ontario

En plus de rénover ses centrales nucléaires, l’Ontario souhaite devenir la première province en Amérique du Nord à exploiter des petits réacteurs modulaires (PRM).

>>Panneaux de signalisation sur un chantier de construction. Sur une pancarte, on peut lire « Localisation future de la première PMR au Canada ».>>

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Les quatre petits réacteurs modulaires que l’Ontario souhaite construire seront situés tout près de la centrale électrique de Darlington.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Ces mini-réacteurs sont relativement rapides à construire et prennent moins de place qu’une centrale électrique traditionnelle. Chaque PMR peut produire 300 mégawatts, soit suffisamment pour alimenter 300 000 foyers.

L’Ontario espère une première commercialisation en 2029, à condition d’obtenir le feu vert de la Commission canadienne de sûreté nucléaire.

Le nucléaire connaît une renaissance en Ontariodéclare Subo Sinnathamby, chef de projet pour leProduction d’électricité en Ontario.

>>Un ouvrier en uniforme.>>

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Travailleurs s’entraînant au chargement d’un réacteur dans un centre de formation de la centrale nucléaire de Darlington.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Cette entreprise publique est le plus grand producteur d’électricité de la province. Elle s’attend à ce que la demande énergétique double d’ici 2050 – une réalité qui nécessitera la construction de petits réacteurs, mais aussi de nouvelles centrales électriques.

Selon l’Independent Electricity Network Operating Company, la demande passera de 47 000 à 88 000 mégawatts d’ici 2050, dont plus de 18 000 mégawatts devront provenir du nucléaire.

Nous aurons probablement besoin de cinq usines de la taille de Darlington pour combler cet écart.précise Mme Sinnathamby.

>>Subo Sinnathamby photographié à la centrale nucléaire de Darlington>>

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Subo Sinnathamby est gestionnaire de projet pour Ontario Power Generation. L’ingénieur de formation travaille dans le domaine nucléaire depuis plus de 20 ans.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Mili Roy est attristé par cette expansion du nucléaire, une énergie du passé, contraire à l’intérêt publicd’après elle.

Ophtalmologiste, professeur à l’Université de Toronto et militante de l’Ontario Clean Air Alliance, elle décrit l’énergie nucléaire comme une Source d’énergie coûteuse, dangereuse et nocive pour l’environnement, notamment en raison de la création de déchets nucléaires. , qui restent radioactifs pendant des millions d’années.

En cas d’accident, les conséquences sont si graves qu’il ne vaut pas la peine de prendre des risques, surtout lorsqu’on dispose d’autres options nettement supérieures.estime-t-elle, en faisant référence aux énergies renouvelables comme le solaire ou l’éolien, qui représentent actuellement moins de 10 % de l’apport énergétique en Ontario.

>>Mili Roy dans une salle d'examen.>>

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Mili Roy est un militant antinucléaire de longue date.

Photo : Radio-Canada / Maxime Beauchemin

Greenpeace partage cet avis. En janvier (Nouvelle fenetre)l’organisation environnementale a dénoncé l’expansion nucléaire de l’Ontario et accusé le gouvernement Ford d’avoir pris une décision basé sur l’idéologie, pas sur l’économie.

Toute analyse coûts-avantages indépendante et crédible démontrerait que nous devrions investir dans le système d’énergies renouvelables du futur, plutôt que de consacrer des milliards supplémentaires à la reconstruction des réacteurs nucléaires bien après leur date d’expiration.a déclaré Keith Stewart, stratège énergétique principal chez Greenpeace Canada.

Le nucléaire bloque les progrès possibles dans le développement des énergies renouvelables […] qui sont devenus les moins chers du monde.

Une citation de Mili Roy, militant antinucléaire

Le ministre Todd Smith répond que l’énergie nucléaire est une option abordable si l’on considère la durée de vie des centrales électriques.

Quant aux énergies renouvelables, un champ de panneaux solaires ou d’éoliennes devrait occuper beaucoup plus de terre qu’une centrale nucléaire pour produire la même quantité d’électricité, souligne-t-il.

  • >Un travailleur d'Ontario Power Generation est photographié à la centrale nucléaire de Pickering>

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    La centrale électrique de Pickering a une capacité de production de 3 100 mégawatts.

    Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

  • >Vue de la piscine de combustible usé située à la centrale nucléaire de Pickering, près de Toronto.>

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    Vue de la piscine de combustible usé située sur le site de la centrale nucléaire de Pickering, à l’est de Toronto.

    Photo : Reuters / Carlos Osorio

  • >Cartes d'accès à la centrale nucléaire de Pickering, près de Toronto.>

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    Cartes d’accès à la centrale nucléaire de Pickering, près de Toronto.

    Photo: Reuters / CARLOS OSORIO

Vue de la piscine de combustible usé située sur le site de la centrale nucléaire de Pickering, à l’est de Toronto.

Photo : Reuters / Carlos Osorio

La centrale électrique de Pickering a une capacité de production de 3 100 mégawatts.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Album photo: Pickering 2

Malgré de nombreuses préoccupations environnementales, l’Ontario a choisi de se concentrer sur l’énergie nucléaire.

La province croit également que d’autres gouvernements pourraient emboîter le pas : l’Alberta, la Saskatchewan et peut-être même le Québec.

L’Ontario et le Québec partagent l’électricité, donc les Québécois reçoivent déjà de l’énergie nucléaire de l’Ontariosouligne Todd Smith, selon lequel l’opinion publique est de plus en plus favorable au nucléaire, compte tenu de la demande en électricité qui ne cesse de croître.

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Virage nucléaire

 
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