Réduire les primes ? | Tribune de Genève – .

Réduire les primes ?

Emmanuel Deonna, Pierre Nicollier

Publié aujourd’hui à 10h15

L’initiative de réduction des primes lancée par le Parti socialiste a atteint le stade des votes fédéraux. Le 9 juin, les Suisses choisiront s’ils souhaitent ou non qu’aucun ménage ne doive consacrer plus de 10% de son revenu disponible aux primes d’assurance maladie. Il est prévu que la réduction des primes soit financée au moins aux deux tiers par la Confédération, le solde étant financé par les cantons.

Il est temps de corriger une situation intolérable

Les primes que nous versons mensuellement aux caisses d’assurance maladie ne cessent d’augmenter et ont plus que doublé en vingt ans. Nous savons que les salaires et les pensions de la plupart des Suisses stagnent. Il faut également accompagner la hausse des loyers et des prix de l’énergie. Dans ce contexte, l’initiative socialiste de réduction des primes d’assurance maladie est une solution nécessaire à une situation inacceptable.

Sous réserve d’un vote le 9 juin, il demande que les primes soient plafonnées à 10 % du revenu imposable. Les réductions de primes, financées aux deux tiers par la Confédération (le reste revenant aux cantons), seront accordées aux ménages consacrant plus de 10% de leurs revenus aux primes santé. Actuellement, les montants versés sous forme de subventions par la Confédération augmentent au même rythme que les primes. Mais, à quelques exceptions près comme le canton de Vaud, ce n’est pas le cas des montants financés par les cantons. Dix-sept cantons ont réduit les ressources allouées aux réductions de primes au cours des dix dernières années ! Actuellement, une famille ayant les mêmes revenus peut payer un montant très différent selon son canton de résidence. L’initiative socialiste garantit l’égalité de traitement.

Depuis l’introduction de la LAMal, tous les citoyens suisses sont tenus d’adhérer à une caisse d’assurance maladie privée. Selon l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), le coût des primes nettes (après déduction des éventuelles subventions) s’élevait en moyenne à 6,6% du revenu disponible en 2000. Cette charge représentait en 2020 14% du revenu disponible ! Au 1er janvier 2024, la hausse moyenne des primes santé est de 8,7 % par rapport à 2023. Le système actuel aggrave les inégalités sociales en incitant à souscrire une franchise plus élevée pour économiser. Si ces personnes tombent malades, elles n’ont d’autre choix que de renoncer à se faire soigner. Toujours selon l’OFSP, la proportion de la population ayant renoncé aux soins pour cause de coût a triplé en douze ans, passant de 6 % à 18 % !

La prime moyenne du canton de Genève a connu une forte augmentation en 2024: de 44 francs. par mois pour un adulte, 110 fr. par mois pour un couple avec un enfant. Ces augmentations sont considérables dans un canton où les primes sont supérieures à la moyenne suisse et où le coût de la vie est très cher. De nouvelles hausses de primes sont prévues pour septembre 2024. Si la machine n’est pas stoppée, les primes continueront de s’envoler à un rythme infernal année après année. Il est urgent d’agir sur ce qui représente une charge intolérable pour les ménages, les personnes âgées, les familles pauvres et moyennes ainsi que les jeunes adultes en formation. Le vote du 9 juin sur le plafonnement des primes à 10 % constitue une opportunité unique. Ne le manquons pas !

Cette initiative n’est pas la bonne solution

Les primes d’assurance obligatoire représentent sans aucun doute une charge importante pour le budget des ménages. L’initiative de réduction des primes, à laquelle s’opposent le Conseil fédéral et le Parlement, prévoit de plafonner ces primes à 10% du revenu disponible au niveau national.

Pour rappel, en mai 2019, les Genevois avaient choisi une prolongation des subventions plutôt que l’instauration d’un plafond à 10%. Résultat, Genève dispose déjà d’un mécanisme de limitation avec plus de 120’000 concitoyens qui reçoivent chaque mois une aide pour payer leur prime, en fonction de leurs revenus et de leur patrimoine.

Le contre-projet, qui n’entrera en vigueur qu’en cas de refus de l’initiative, doit renforcer ce système en liant le montant des réductions de primes que doit consentir un canton aux dépenses de santé dudit canton.

Sachant que l’initiative n’aura qu’un impact limité pour la population genevoise, on peut examiner les deux raisons qui devraient nous convaincre de mettre un non dans les urnes.

La première est que l’initiative contraint les cantons qui ont choisi de ne pas proposer de mécanisme d’aide à entrer dans un système géré par la Confédération avec une hausse des coûts estimée entre 3,5 et 5 milliards de francs. Alors que le financement de la 13e rente n’est pas clos et que les budgets liés à la recherche et aux hautes écoles sont menacés, ces surcoûts se traduiront par une augmentation générale de la TVA ou une augmentation de l’impôt fédéral direct, y compris pour les populations des cantons qui ont déjà disposent de mécanismes de soutien.

La deuxième raison, la plus importante, est que cette initiative réduit les incitations à la maîtrise des coûts. Les cantons sont responsables de la politique de santé et de l’admission des prestataires de soins. Ils gèrent la planification, la numérisation, attribuent des mandats de services aux hôpitaux et financent principalement les soins hospitaliers.

Les cantons ont donc une influence directe sur les coûts de santé et il est cohérent de leur demander d’en assumer la majorité comme le propose le contre-projet indirect qui n’entrera en vigueur qu’en cas de rejet de l’initiative.

Les débats sur le partage de la charge ne doivent pas nous détourner des problèmes structurels de la politique de santé afin de maintenir la qualité des soins et une accessibilité adéquate, à un coût qui peut être assumé dans le temps.

Il faut continuer à réformer le système pour une meilleure coordination entre les prestataires de soins, un financement uniforme des services afin de favoriser les traitements les plus adaptés (vote en septembre), un dossier patient électronique efficace (soutien voté par le parlement en avril) et une révision des gestion des réserves (projets en cours de traitement dans les Chambres).

Votez non à une initiative qui fera payer aux Genevois les baisses de primes des autres cantons et qui étouffera les incitations à une bonne gestion du système de santé !

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