dans le froid glacial d’avril, des familles dans les rues

Dans le grand froid du printemps, l’abri du dehors

Publié aujourd’hui à 16h34

Ils se couchent avec les poules et se lèvent au chant du coq. Il n’y a ni poules ni coqs là-bas. Des chiens, oui, en nombre. On les croise sur les pelouses lors de la première sortie matinale, habillés comme en hiver, on les retrouve plus tard dans « l’espace de liberté » entouré de clôtures toutes neuves, créées pour eux dans la partie haute du parc.

Le parc est celui de Geisendorf, sur la rive droite, un modèle en matière de politique inclusive. Une cohabitation harmonieuse de différentes populations et pratiques aimant le plein air. Le week-end, ce lieu aux entrées multiples, via les rues de Lyon et Liotard notamment, reste très animé. Sans oublier bien sûr les trois cours de l’école publique proposant une musique d’ambiance tous les jours de la semaine. La cohésion sociale et le vivre-ensemble vivent à la même adresse.

Les dormeurs dehors l’ont à leur tour adopté. Le soir, Geisendorf est peuplée de familles sans abri, notamment issues de la communauté rom. Par beau temps l’été dernier, pendant les vacances scolaires, l’herbe suffisait à leur confort. A l’automne, ils prenaient leurs quartiers sous le couvert en dur de toilettes publiques rénovées à grands frais il y a une dizaine d’années.

Une rampe a été aménagée pour faciliter l’accès aux toilettes des personnes handicapées, une terrasse podium à trois marches a été aménagée à l’avant du bâtiment, visant à « enrichir l’usage qui peut être fait du lieu », pour citer les concepteurs du temps. A l’arrière, une seconde terrasse, plus petite, également couverte par un avant-toit, séparée par un muret de la partie boisée donnant sur la cour voisine.

Ce nouvel usage est donc devenu celui d’un dortoir communautaire devant lequel passent et s’arrêtent les bus. Ici, le sans-abrisme n’est pas caché. Tous les âges de l’enfance y sont représentés, le plus jeune du groupe termine sa nuit dans sa poussette au petit matin, au moment où les adultes préparent leurs affaires, juste avant le passage des premiers écoliers.

Le couvert boisé sert de consigne à bagages improvisée.

Les caddies des supermarchés, qui servent de bagages de voyage, se remplissent à vue d’œil ; ils regorgent de matelas noués à la main et de literie d’occasion. Le tout est recouvert d’une bâche en prévision de la pluie annoncée, avant de se diriger vers un lieu de stockage partiellement abrité pour la journée.

Cette manipulation quotidienne – elle se répète à cet endroit depuis plus de six mois – ne laisse personne indifférent. Elle a son propre horaire, précédant celui des employés de la voirie vidant les poubelles et des équipes mandatées nettoyant les toilettes. Elle fait surtout preuve d’une résilience à toute épreuve dans l’exercice de la survie.

L’épreuve est celle d’un hiver qui s’éternise. Des aubes flirtant avec des températures négatives, le froid glacial du printemps s’installe tous les jours et toutes les nuits, malgré des épisodes d’ensoleillement trompeurs. Mais ce froid, tardif et hors saison, ne répond pas aux critères d’un refuge à but humanitaire.

Alors le camp de fortune résiste. Elle s’est même agrandie, jusqu’à 30 personnes à la fin du week-end. Le bâtiment est occupé comme la place devant une église. L’image a quelque chose de médiéval. Une cour des miracles nichée sur elle-même, entre l’arrêt de bus et le chemin de l’école.

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