Dr Mamouth DIOP, Economiste Expert en développement territorial et économie sociale et solidaire – .

Dr Mamouth DIOP, Economiste Expert en développement territorial et économie sociale et solidaire – .
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Dans un contexte mondial où les structures collaboratives et solidaires prennent de plus en plus d’importance, les coopératives s’avèrent être des acteurs clés du développement durable. Ils jouent un rôle essentiel dans le renforcement des économies locales et l’amélioration des conditions de vie, tant au niveau national qu’international.

Une avancée ambitieuse pour les coopératives

Au niveau international, nées d’un besoin impératif d’entraide et de solidarité, les coopératives ont pris forme dans un environnement où les petits producteurs luttaient pour surmonter les inégalités économiques et les obstacles à l’accès aux marchés. Elles ont non seulement permis à leurs membres de vaincre la pauvreté, mais ont également favorisé des conditions de travail plus équitables, démontrant ainsi le potentiel des coopératives à transformer positivement les communautés. Outre les succès observés en Europe, l’importance des coopératives dans le développement économique et social s’étend également à l’Afrique. Au Maroc, les coopératives de la région Orientale jouent un rôle crucial dans le développement des zones rurales, notamment à travers la promotion des produits locaux et la création d’emplois. Ces coopératives ont vu leur nombre augmenter significativement, passant de 1 215 en 2015 à 5 517 en 2020, ce qui représente une croissance impressionnante de 63,9% en cinq ans (Amine ELQAITI et al, 2020).

La rupture de dépendance annoncée

Au Sénégal, l’évolution du mouvement coopératif, notamment depuis la période post-indépendance, constitue une étape cruciale dans la réduction de la dépendance des agriculteurs vis-à-vis des commerçants et dans la commercialisation de leurs récoltes. Cette initiative nationale initiée à l’époque par le Président Mamadou Dia, a permis d’améliorer le contrôle des circuits de commercialisation, augmentant ainsi la production agricole grâce à la mécanisation et à la distribution de semences et d’engrais (Fall et al, 2008). Ces coopératives ont bénéficié d’un soutien important de l’État, notamment à travers la création de structures de financement dédiées. A cette époque, les coopératives jouaient un rôle essentiel dans l’économie locale, favorisant de manière significative l’amélioration des revenus et des conditions de vie des populations rurales.

L’ingérence de la crise politique

Avec l’avènement de la crise politique de décembre 1962, les politiques socio-économiques axées sur les coopératives ont été progressivement abandonnées, marquant un tournant important dans la politique sénégalaise (Fall et al 2008). Depuis lors, les coopératives ont été confrontées à des défis d’organisation et de durabilité pour réaliser pleinement leur potentiel au sein de l’économie sénégalaise. Ces défis soulèvent une question fondamentale : quelles stratégies et approches pourraient être mises en œuvre pour surmonter ces obstacles ?

Leviers de développement endogène

Mis en place le 5 avril 2024, le nouveau gouvernement sénégalais, qui se veut proche, innovant et efficace, a posé des piliers majeurs pour répondre aux préoccupations pressantes des Sénégalaises et des Sénégalais. Parmi ces piliers majeurs on peut citer : la jeunesse, l’éducation, la formation, l’entrepreneuriat et l’emploi des jeunes et des femmes, la lutte contre la vie chère et l’amélioration des conditions de vie des populations. Pour relever les défis soulignés ci-dessus, le secteur primaire reste un écosystème essentiel dans les stratégies de développement qui seront mises en place par l’équipe du Premier Ministre, M. Ousmane SONKO. En effet, la décision pertinente du nouveau gouvernement de créer un Secrétariat d’État aux coopératives agricoles et à l’encadrement paysan est également bénéfique au vu des défis de réorganisation des producteurs ruraux. Pour assurer le succès des politiques visant à placer les coopératives au cœur du développement rural et de la souveraineté alimentaire, le nouveau gouvernement sénégalais doit adopter une approche intégrée à plusieurs niveaux :

Au niveau institutionnel

Pour que les pouvoirs publics actuels parviennent à faire des coopératives des leviers de développement endogène, il est crucial d’adopter une approche institutionnelle adéquate pour répondre aux besoins des coopératives. Cela passera par

:  l’élaboration d’une Lettre de Politique Sectorielle (LPS) dédiée aux coopératives, qui formaliserait l’engagement du gouvernement envers ce secteur.

 la création d’un établissement public spécifiquement dédié aux coopératives pour encadrer, soutenir et coordonner toutes les activités liées au secteur coopératif.

 une incitation pour les coopératives à adopter des plans stratégiques et des plans d’affaires contribuant directement aux objectifs de développement national.

 implication des autorités locales dans la promotion et le soutien des coopératives.

Au niveau organisationnel

La question organisationnelle doit être au cœur de la performance et de la pérennité des coopératives au regard de leur contribution attendue au processus d’autonomisation du monde rural. Pour ce faire, il faudra initier des dynamiques d’accompagnement à l’organisation et à l’encadrement des coopératives, notamment :
 la création d’une maison régionale des coopératives qui les accompagne en termes d’offres de services et d’encadrement (Coaching, formation, marketing, financement, investissement solidaire, communication, numérique, etc.) ;

 la mise en place d’un hub numérique pour les coopératives marquerait une étape vers la modernisation et l’intégration technologique de leurs activités.

Sur le plan économique :

Pour maximiser l’impact économique des coopératives, une attention particulière doit être portée afin qu’elles deviennent un levier de création d’emplois et de richesse. Pour cela vous aurez besoin de :
 développer des stratégies de marketing efficaces ;
 encourager la création d’emplois dans toutes les phases de la chaîne de valeur coopérative, de la production à la commercialisation.

Au niveau financier :

Il est crucial de développer des produits financiers adaptés à l’écosystème des coopératives afin qu’elles puissent être un moteur dans le processus d’autonomisation du monde rural. L’accent doit être mis en particulier sur :
 la création d’une banque coopérative territoriale ou d’une banque publique coopérative de financement.

En guise de conclusion et de recommandations, l’engagement du nouveau gouvernement sénégalais à placer les coopératives au cœur de ses stratégies de développement rural est une initiative prometteuse. Cette option des nouvelles autorités sénégalaises favorise une gestion autonome et efficace du développement à la base. Dans cet esprit, les pouvoirs publics et les acteurs coopératifs doivent se fixer les ambitions suivantes :

 Promouvoir une économie productive et diversifiée : La collaboration entre l’État et les coopératives est envisagée comme un levier pour créer de la valeur et des emplois de qualité, stimulant ainsi une économie nationale plus robuste et diversifiée.

 Renforcer le capital humain : En intégrant les coopératives dans les efforts de développement, le gouvernement doit se concentrer sur l’éducation et la formation continue pour préparer une main-d’œuvre qualifiée prête à répondre aux défis futurs, renforçant ainsi le capital humain du pays.

 Promouvoir les opportunités d’inclusion pour tous : Cette approche contribue à consolider le lien social, offrant des opportunités d’inclusion économique et sociale à toutes les couches de la population, et particulièrement à celles qui sont traditionnellement marginalisées.

 Construire des territoires durables et résilients : L’orientation politique axée sur les coopératives pour l’autonomisation du monde rural contribue également à promouvoir le développement de territoires durables et résilients, faisant des zones rurales des points d’ancrage essentiels pour le développement durable du pays.

 Assurer correctement la gestion des risques : la gestion stratégique et opérationnelle de ces coopératives doit être encadrée par des actions d’atténuation des risques, dans une perspective de durabilité.

Dr Mamouth DIOP, Economiste Expert en développement territorial et économie sociale et solidaire

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