De presque rien à plus de 220’000 francs, combien gagnent les syndics fribourgeois ? – .

De presque rien à plus de 220’000 francs, combien gagnent les syndics fribourgeois ? – .
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Les données exclusives recueillies par La Liberté montrent une très grande disparité dans la rémunération des syndics fribourgeois. Financièrement intéressant dans certaines communes, le métier s’apparente davantage à un sacerdoce dans d’autres. D’autant que la fonction devient de plus en plus complexe, et le citoyen toujours plus exigeant.

Combien gagne le syndic de votre commune ? Découvrez la réponse avec notre infographie ci-dessous. © Corinne Aeberhard/Photomontage : Florence Cerouter

Combien gagne le syndic de votre commune ? Découvrez la réponse avec notre infographie ci-dessous. © Corinne Aeberhard/Photomontage : Florence Cerouter

Publié le 05.04.2024

Temps de lecture estimé : 11 minutes

Fonction clé du fédéralisme suisse, le syndic est souvent le visage, voire l’âme de sa commune, le plus proche des citoyens et de leurs préoccupations. Mais cette position est inégalement valorisée selon les régions. Enquête.

1 Pas de norme

L’autonomie municipale exige que la rémunération des conseillers varie grandement d’une communauté à l’autre. Et si le métier peut être financièrement intéressant dans certaines communes, il s’apparente plutôt à un sacerdoce dans d’autres. Liberté a interrogé les 126 communes du canton de Fribourg afin d’en dresser un panorama global. Verdict : c’est logiquement, en valeur absolue, dans la plus grande commune du canton que le syndic est le mieux payé. À Fribourg, il perçoit environ 226’000 francs bruts par an, auxquels il faut ajouter un forfait mensuel de 600 francs pour frais de déplacement et de représentation. Suit le syndic de Guin, qui a droit à près de 138 000 francs bruts par an ainsi qu’à une indemnité annuelle de 1 200 francs pour dépenses diverses.

SELON SALAIRE ANNUEL FIXE SELON LE SALAIRE HORAIRE

Mais attention, car lorsqu’il s’agit du salaire des élus municipaux, la comparaison n’est pas bonne. Et il n’est guère possible d’établir un classement des administrateurs les mieux ou les moins bien payés. De plus, le terme même de salaire n’est pas forcément pertinent. Secrétaire municipale à Granges-Paccot, Bénédicte Laville rappelle : « Les élus communaux, qu’ils soient membres des commissions ou du conseil municipal, ne sont pas des employés municipaux. Nous avons ainsi un exécutif de milice et les membres du Conseil municipal exercent généralement une activité lucrative sur une base dépendante ou indépendante, leur rémunération ne leur permettant pas de se substituer à une autre Source de revenus.

2 Deux systèmes cohabitent

Dans le canton de Fribourg, deux systèmes principaux cohabitent. La première, principalement utilisée par les plus grandes administrations, consiste à octroyer un salaire fixe couvrant la plupart des tâches exercées par les conseillers municipaux. A Estavayer, par exemple, le syndic perçoit un salaire de 120 000 francs bruts par an, tout compris. Dans certaines communes, ce revenu fixe dépend du nombre d’habitants. A Marsens, le syndicat touche 3 francs par habitant, soit environ 6’200 francs. Le deuxième système, quant à lui, repose sur un salaire horaire (vacances). Cela va de 25 francs de l’heure, comme à Auboranges et Fétigny, jusqu’à 70 francs de l’heure à Schmitten et même 80 francs à Corminboeuf.

« Il y a de grandes attentes de la part des citoyens »
David Bonny

Mais la majorité des communes ont adopté un système mixte : une partie fixe de rémunération et une partie variable, pour des tâches dont la nature peut également varier. À cela s’ajoutent divers montants tels que le remboursement des frais de téléphone et des jetons de présence aux séances du Conseil municipal, du Conseil général ou des assemblées municipales. Dans la plupart des collectivités, les frais de déplacement en transports en commun et autres frais ponctuels liés à la fonction (hôtel, repas…) sont remboursés sur présentation de justificatifs. Par ailleurs, une indemnisation d’environ 70 à 80 centimes par kilomètre est souvent accordée pour les déplacements en véhicule privé, éventuellement limitée aux déplacements en dehors de la commune ou du district.

Parfois, la rémunération est moins formelle. A Broc, un administrateur sortant recevra également un cadeau de départ équivalent à 200 francs par année de syndication. A noter enfin que les jetons de présence que perçoit un élu lorsqu’il participe à une assemblée au nom d’une intercommunale sont souvent payés par l’association elle-même, et non directement par la commune.

3 Différents chaque année

Toutes ces particularités, propres à chaque commune, font que le salaire des syndics peut varier d’une année à l’autre. Par exemple, Nicolas Hassler, syndic de Sâles, détaille ses revenus pour l’année 2022. Dans un premier temps, il a reçu une somme forfaitaire de 5 000 francs servant à rémunérer le travail accompli pour préparer les séances du Conseil municipal, répondre aux mails. ou des appels téléphoniques ou pour valider des factures. A cela s’ajoutent 44 séances du Conseil communal et des assemblées communales (d’une durée moyenne de 2h30), rémunérées à 100 francs chacune.

Par ailleurs, Nicolas Hassler a effectué au total 168 heures de travail en 2022, rémunérées selon un système posté, à 40 francs de l’heure. Cela correspond à des séances supplémentaires (hors conseil) et à des travaux spécifiques comme la rédaction d’articles pour le journal municipal, des études diverses ou de la représentation. Au total, le syndic de Sâles a donc perçu 16’130 francs brut, incluant quelques frais de stationnement. Somme à laquelle il faut ajouter une dépense pour les déplacements effectués en véhicule privé : 418 kilomètres à 70 centimes, soit environ 293 francs.

4 Taux d’occupation variable

S’il est difficile de comparer les communes, c’est aussi parce que le taux d’occupation des syndics n’est pas le même partout. Dans le canton, un seul d’entre eux occupe officiellement un poste à temps plein : celui de Fribourg. Et à Bulle, Estavayer ou Guin, l’emploi représente un taux d’activité de 80 %. A l’inverse, à Auboranges, le primus inter pares du Conseil Municipal n’est occupé qu’à 5%. A noter que dans certaines communes, le taux d’activité est officiellement défini, tandis que d’autres fournissent une estimation. A Estavayer, on parle d’un taux de « 80 % sur le papier, 120 % en réalité ».

Quoi qu’il en soit, pour pouvoir réellement comparer les salaires des élus locaux, il faudrait savoir combien ils gagnent par heure de travail, tout compris. Syndic de La Sonnaz, Denis Grandgirard détaille : « Pour ma part, pour l’année 2023, j’ai perçu la somme totale, tout compris, de 13 900 francs, ce qui représente en moyenne 30 francs de l’heure. Mais de nombreuses communes refusent de définir précisément le taux d’occupation de leur responsable politique. Car pour les syndics, les soirées de réunion sont souvent longues, les appels téléphoniques nombreux, la charge de travail inégale d’une saison à l’autre.

Et beaucoup le disent, la fonction a tendance à s’alourdir, à se complexifier. Sans compter que l’administration devient de plus en plus exigeante. Syndic de Prez, David Bonny remarque : « Nous sommes très sollicités, il y a des attentes élevées de la part des citoyens. Mais nous devons accepter les critiques de manière constructive, car cela nous permet aussi d’améliorer les services à la population.» Le syndic de Ponthaux Pierre Bourgnon ajoute : « Le travail du syndic dépend aussi de l’administration qui l’anime. Certaines communes peuvent s’appuyer sur de grandes administrations. Dans d’autres, l’administration est plus petite.

Un sujet encore tabou dans certaines communes

Afin de connaître la rémunération des syndics des 126 communes du canton de Fribourg, Liberté leur a envoyé un questionnaire par email, en français et en allemand. Un premier email a été envoyé début décembre, puis un message de rappel a suivi entre fin janvier et début février. Au final, 93 communes ont accepté de divulguer les informations demandées concernant les sommes perçues par leurs élus, soit un taux de réponse de 74 %. D’ailleurs, de nombreuses administrations mettent spontanément ces informations à la disposition du public sur leur site internet.

Cependant, 24 communes n’ont pas répondu du tout. Et 7 autres (Le Châtelard, Le Pâquier, Ried bei Kerzers, Chevrilles, Bösingen, Plasselb et Saint-Sylvestre) n’ont pas souhaité que cette information soit communiquée publiquement. A noter qu’à Plasselb, le syndic indique que les revenus ne peuvent être estimés.

La question se pose néanmoins : les revenus des fiduciaires sont-ils une information publique ou confidentielle ? La responsable cantonale à la transparence et à la protection des données, Martine Stoffel explique : « La loi cantonale sur l’information et l’accès aux documents, dans son article 12, dit que l’intérêt prépondérant du public à l’information est présumé lorsque les données personnelles concernent un membre d’un groupe. organisme public et les informations concernent ses fonctions. La question de la rémunération des élus n’est pas évoquée directement dans la loi. Mais les administrateurs sont des magistrats élus et ils exercent des fonctions publiques. Donc a priori, on peut penser qu’il y a un intérêt public à connaître ces informations, notamment les classes salariales respectivement les fourchettes concernant leur rémunération.

Le responsable cite l’exemple des salaires des employés de l’Etat à Fribourg. « La classe salariale dans laquelle ils se trouvent, c’est-à-dire l’échelle salariale, est une information publique. On sait ainsi qu’une personne exerçant une profession particulière gagne entre tel montant et tel montant. Après, faut-il annoncer chaque centime gagné ? C’est une autre question. Mais à mon avis, il devrait y avoir un système similaire pour les élus municipaux. En effet, les règles concernant la rémunération des élus municipaux figurent en principe dans un règlement. Et en principe, les bases juridiques sont publiques, y compris les règlements communaux. Car pour respecter une loi, il faut bien sûr pouvoir la connaître.

À noter que deux municipalités n’ont pas pu répondre à nos questions en raison de leur situation particulière. En effet, Ecublens, qui fusionnera l’année prochaine avec ses voisines Auboranges, Chapelle et Rue, est actuellement sous tutelle, et n’a donc plus de syndic. Par ailleurs, à Chénens, le préfet de Sarine a prononcé l’ouverture d’une enquête administrative sur le fonctionnement du Conseil communal et une mesure provisoire de soutien à l’exécutif, en nommant trois membres intérimaires.

 
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