Chaque matin, Nicolas Turon rend hommage à son département avec un texte drôle, tendre et complice, en forme de déclaration d’amour à la Moselle. Il choisit un emblème appartenant à l’histoire ou à l’actualité et le traite de manière décalée.
Si ta copine pleure la nuit,
A-t-elle raison ou a-t-elle tort ?
Je ne peux plus rien y faire…
Personnellement, quand on me parle de magnolias, quand j’entends cette nouvelle musique,
qui résonnent comme des bruits de combat, je ne pense pas forcément au tube de Claude François, mais plus certainement au printemps messin.
Car l’avenue Foch, qui est l’aorte du cœur de notre ville, abrite quelques spécimens capables d’animer la palette de couleurs du printemps. A l’heure où, en Moselle, le Jaumont ressemble à du moutarde, des pierres mouillées par les averses de mars, où le grès rose se transforme en cochon malade, contaminé par les gaz d’échappement, où le grenat noircit, anticipant le temps de deuil qui suivra le retour du club en Ligue 2, où le soleil, enfin revenu, brille timidement sur la rouille des hauts fourneaux et change les flaques d’hydrocarbures en or, ravivant les fantômes industriels le temps d’une éclaircie, les magnolias de l’Avenue Foch laisse éclater leurs roses et leurs blancs, avec suffisamment d’intensité et de nuances pour se fondre dans le crépuscule ou l’aube. C’est précisément à ces deux points de jonction entre le jour et la nuit que la fleur a le plus de majesté : au fur et à mesure que la lumière change, elle semble vibrer, se libérer. Un souffle, une évanescence, qui contraste avec l’âge du magnolia, l’une des plus anciennes plantes à fleurs dont les origines remontent à l’époque des dinosaures. Réalisez qu’au Mésozoïque, cette essence contemplait déjà les embouteillages de l’avenue, et les ouvriers préhistoriques qui allaient gagner leur vie sur le dos du diplo…
#Français
