Obligés de déclarer les dons et invitations reçus tout au long de l’année, nos élus ne sont pas tous logés à la même enseigne. Anthologie des cadeaux reçus par les députés élus en juillet dernier.
Pour les députés de la 17e législature, le Père Noël est arrivé un peu en avance. Élus en juillet dernier, ils doivent faire preuve de transparence, en communiquant régulièrement les cadeaux reçus tout au long de l’année, comme leurs prédécesseurs. Et, comme le notaient nos confrères de Politico dans un article publié cette semaine, les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ont été l’occasion de nombreux dons aux parlementaires.
En France, pour rappel, les cadeaux aux parlementaires sont évidemment réglementés par la loi et les destinataires sont soumis à une obligation de transparence. Les élus doivent déclarer les dons reçus lorsque leur valeur dépasse 150 euros, afin d’éviter tout conflit d’intérêt. Les voyages financés par des tiers doivent également être déclarés. Toutefois, la règle ne s’applique qu’aux cadeaux susceptibles de créer un conflit d’intérêts, et non à tous les cadeaux reçus. Ce qui explique notamment pourquoi les déclarations des députés n’occupent que quelques pages, comme le souligne Politico.
Accessible à tous, la liste des cadeaux reçus par les députés n’est donc pas exhaustive, mais elle recèle quelques surprises. Les Jeux olympiques de Paris (JOP) ont été particulièrement favorables aux offrandes faites aux parlementaires, avec treize cadeaux déclarés en août et dix en septembre, contre trois en moyenne le reste de l’année. Nos élus ont cependant rencontré un traitement plus ou moins égal. Le député des Hauts-de-Seine Philippe Juvin (LR), membre de la commission des Finances, conseiller régional et conseiller métropolitain, a par exemple reçu treize places pour sept épreuves des JOP, de la part de la Métropole du Grand Paris. D’autres, comme Annaïg Le Meur, Agnès Firmin Le Bodo ou Jean-François Rousset, ont également reçu des places. Stéphane Mazars a également été invité par France Télévisions à assister aux épreuves d’athlétisme en remerciement de son « implication dans la préparation des JOP Paris 2024 sous la 16e législature, notamment au sein de la commission des affaires culturelles et de l’éducation »déclare-t-il.
Chips, concerts et livres
Parmi les autres élus gâtés, la députée de la 3e circonscription de Loire-Atlantique, Ségolène Amiot, a notamment obtenu un t-shirt floqué JOP et RadioFrance, ainsi que deux livres à l’occasion des Jeux : « Le sport, une histoire de femmes ?de Camille Andrieu, et “Sport et Politique, l’important c’est de participer”publié par la Revue Politique et Parlementaire. De leur côté, Sylvain Maillard et Anaïg Le Meur ont pu assister au dernier concert de Mylène Farmer au Stade de France, tandis que Constance Le Grip a été invitée par France Télévisions au concert de Paul McCartney à l’arène de La Défense. Les amateurs de sport ne sont pas en reste non plus puisque l’insoumis Carlos Martens Bilongo a reçu des billets pour un match de football. « entre Monaco et Angers dans une loge VIP »lorsque sa collègue (EPR) Françoise Buffet a pu assister à un match au Parc des Princes, invitée par le PSG.
Plus surprenant mais moins exotique, en octobre, le député d’Ille-et-Vilaine, Tristan Lahais, a reçu sept paquets de chips estimés à 15 euros de la part de la société Brets. Zélé, l’élu précise dans sa déclaration d’éthique qu’il souhaite les conserver « pour les longues soirées d’examen du PLF »sans y avoir touché : « Vous pourrez donc les récupérer si nécessaire ». Enfin, la vice-présidente insoumise de l’Assemblée nationale, Clémence Guetté, a reçu deux sacs de voyage du groupe ADP, ainsi que… deux bouteilles d’eau, de la part du Syndicat de l’eau d’Île-de-France.
Des rames pour les sénateurs
Les députés ne sont pas les seuls à déclarer certains cadeaux par souci de transparence. Une procédure similaire existe pour leurs homologues de la Chambre haute. S’ils n’avaient pas été en nombre impair, les membres de la mission sénatoriale en Polynésie, par exemple, auraient presque pu rentrer chez eux en avril dernier. Cinq sénateurs ont reçu une rame traditionnelle polynésienne des mains du président de l’Union pour la promotion des communes de Polynésie française, dans le cadre de la mission d’information sur la situation institutionnelle, administrative et judiciaire en Polynésie française. Une référence au va’a, ce sport roi à Tahiti et dans le reste des îles polynésiennes, très ancré dans la culture locale. Embarqués dans une pirogue à balancier inspirée de la pirogue traditionnelle, les rameurs s’élancent seuls, par groupe de trois, six ou douze dans des courses allant de 500 mètres à 150 km pour les épreuves longues.
Les autres élus, comme les maires, ne sont soumis à aucune règle particulière en matière de cadeaux, mais restent bien entendu tenus au respect de la loi sur la corruption et peuvent être sanctionnés s’il est prouvé qu’un cadeau donne lieu à une faveur en retour, ou si le les montants estimés atteignent des sommets. Comme dans le cas de Jack Lang, par exemple, qui a reçu des costumes d’une valeur alors estimée à 500 000 euros entre 2013 et 2018. Il était toutefois justifié que ces cadeaux n’étaient liés à aucune contrepartie directe, mais « une élégance connue dans le monde entier » de l’ancien ministre de la Culture, comme le précise la marque de luxe Smalto. D’autant que Jack Lang n’était plus en fonction à l’époque, mais avait déjà rejoint l’Institut du monde arabe.