« Bertha et moi », le bobo qui ne voulait pas partir – Libération – .

« Bertha et moi », le bobo qui ne voulait pas partir – Libération – .
« Bertha et moi », le bobo qui ne voulait pas partir – Libération – .

Une petite fille au genou écorché et avec sa croûte dans le nouvel album de Beatrice Alemagna.

Ça a dû lui arriver, courir trop vite et sans regarder où elle met les pieds, on finit “visage et ventre au sol”. C’est la faute des pierres, explique-t-elle en regardant le genou écorché. La douleur ne s’arrête pas : “Ça a brûlé beaucoup, beaucoup, beaucoup.” Le sang coule : « Cela ressemblait à un film d’horreur sur ma jambe. Je n’en avais jamais vu autant. Un peu de sang. Le mot qu’il ne faut pas dire aux enfants. Son père désinfecte, sa mère guérit, personne ne semble s’inquiéter. « Vous aurez bientôt une belle croûte. » lui disent-ils. Béatrice Alemagna, gagnante de la Grande Ourse en 2023, prend au sérieux les petits soucis du quotidien de sa narratrice. Elle les connaît et les a vécus. L’idée de cet album lui est venue après une chute lors d’un match de football avec ses enfants. La petite fille troublée attend “un jour, un autre jour et un autre jour… mais la croûte ne se détachait pas” avant d’ajouter, “son vilain visage m’inquiétait beaucoup”. Elle lui donne alors « le nom du vieux chien de mon oncle : Bertha » s’habituer à sa présence à genoux et résoudre cette relation conflictuelle. Elle utilise l’ironie pour y parvenir. La blessure est réticente et, en protestation, ne part pas et vient “même en vacances avec mes grands-parents.”

Beatrice Alemagna n’aime pas le jaune, jugé trop agressif. Cela l’assombrit. Le pull de la mère est ocre ; les vêtements des enfants aussi. Il faut trouver l’éclat ailleurs, tout est si terne sans le rouge vermillon des croûtes. Elle travaille sa matière qu’elle garde brute. « Petit à petit, elle cuisinait sur mes genoux »la couleur tend vers le marron, comme “hamburger, mais pas comestible”. Ce qui fascine, ce ne sont ni les paysages semi-réalistes ni le visage de la grand-mère aux traits arrondis et aux pommettes tombantes, à moitié plongée dans l’ombre. Ce sont les cheveux orange mal coiffés de sa petite-fille. On ne les voit que dans ces pages réalisées au crayon gras. Il y a quelques reflets noirs. Elle ressemble à Petite ma poupée de papier, la petite fille rousse dessinée par l’écrivain et peintre finlandais Tove Jansson. Celle-ci est dotée d’une couette et d’une robe aux motifs géométriques. Celle de Beatrice Alemagna n’enlève pas son sweat-shirt vert et son short violet pour observer les effets du temps sur sa blessure.

Elle espère sa disparition : «Maman l’a recouvert de crème. “C’est très gros, mais ça va tomber”. Oh. La croûte a dû tomber aussi, comme moi. Chacun à son tour. « Et puis, un matin, ça y est »Bertha n’est plus là. “Elle dormait entre les draps” avant d’être récupéré par la petite fille pour être placé “entre les coquelicots”. Elle lui manque. Allongée sur un canapé bleu, une jambe pliée, l’autre en l’air, elle observe “une douce marque blanche” laissé à genoux par Bertha. “Une marque qui me rappelle l’odeur des journées à la campagne, de l’époque où je pleurais comme un bébé et où je n’avais pas encore de chien.”

Béatrice Alemagna, Bertha et moi, l’Ecole des Loisirs, 48 ​​pp., 14 €. A partir de 6 ans.
 
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