Shilpi Somaya Gowda, « Un pays merveilleux » (Mercure de France)

Shilpi Somaya Gowda, « Un pays merveilleux » (Mercure de France)
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Le cauchemar américain. Fille d’Indiens de Bombay immigrés à Toronto (Canada) où elle est née en 1970, Shilpi Somaya Gowda, qui vit aujourd’hui à Los Angeles, est l’exemple parfait de ce que l’on considère comme « l’intégration à l’Américaine ». Elle appartient à un «minorité exemplaire», les Asiatiques (au sens large) qui travaillent, s’enrichissent, offrent à leurs enfants la meilleure éducation. Ils ne font pas de vagues et ne subissent pas, a priori, de discrimination en raison de la couleur de leur peau – basanée, mais pas noire comme celle de George Floyd, dont le meurtre à Minneapolis, par des policiers blancs, en 2020, a déclenché la crise mondiale des Noirs. Mouvement Lives Matter.

A la fois très indien dans sa culture et sa façon de penser, mais très conditionné parle mode de vie américainy compris dans son écriture, Shilpi Somaya Gowda s’est inspirée de tous ces éléments – ainsi que d’un stage qu’elle a effectué lors de ses études au commissariat de Minneapolis (on ne s’invente pas) – pour construire ce roman touffu, sensible et désenchanté.

Trois familles indiennes vivent dans le comté d’Orange, près de Los Angeles : Vikram et Veena Sharma, des brahmanes gujarati, qui vivent dans le quartier (fictif) très bourgeois de Pacific Hills, Vikram étant le patron d’une grande entreprise ; Shrikesh et Archana Dhillon, Punjabis plus classe moyenne, et leurs enfants, qui vivent dans le quartier d’Irvine ; et leurs meilleurs amis Shah, Ashok, Priya et leurs trois enfants, Deepa, Maya et Ajay. Deepa, l’aînée, rebelle et contestataire, a pour meilleur ami Paco, un jeune gay mexicain dont les parents sont des sans-papiers. Son père, ouvrier du bâtiment, est décédé dans un accident. Sa mère, femme de ménage, n’a reçu aucune compensation. Deepa et Paco manifestent leur solidarité avec les migrants à Tijuana, à la frontière. Maya, la plus jeune, brillante, bien intégrée, fréquente la famille Baker, les WASP, dont le père est le patron, responsable de la mort du père de Paco. Maya est amie avec leur fille et flirte avec leur fils. Enfin, Ajay, le plus jeune, est un surdoué légèrement autiste, passionné d’informatique et particulièrement de drones. Il s’en est fabriqué un qu’il a décidé de tester un jour près de l’aéroport. Mais l’avion s’écrase, la police intervient et emmène, non sans l’avoir tabassé, ce grand garçon déboussolé, qui pourrait bien être un terroriste islamiste pakistanais ! En vérité, il est hindou, il a 12 ans mais en paraît plus. Le voilà arrêté, conduit au commissariat, puis à la prison d’État, par des policiers particulièrement paranoïaques, obtus et limite racistes. Un en particulier, O’Reilly. Puis Ajay est libéré sous caution.

Commence alors pour les Shahs un véritable calvaire de plusieurs semaines pour aider Ajay, élucider les circonstances de son arrestation, ce qui lui est reproché. Il faudra attendre l’audience, le début du procès, pour que la justice, sensible au tollé général provoqué par l’association Justice Pour Tous, annule toutes les procédures. Les Shahs ont pu compter, dans leur épreuve, sur la solidarité de leurs proches, mais ils ont aussi senti les limites de leur américanité. Après cela, plus rien ne sera plus comme avant, surtout pour Priya, la mère courageuse. C’est elle qui convainc Ashok de quitter Pacific Hills et de « redescendre » à Irvine. Tout un symbole.

Shilpi Somaya Gowda
Un pays merveilleux
Mercure de France
Tirage : 6 000 exemplaires.
Tarif : 23 € ; 336 p.
ISBN : 9782715263109

 
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