Un exercice d’équilibriste. François Bayrou invite les forces politiques, hors LFI et RN, à Matignon jeudi 19 décembre, avant d’annoncer son gouvernement, un exercice délicat entre les revendications des différents partis et les Républicains qui menacent de ne pas y participer.
Le Premier ministre invite jeudi à 14 heures les présidents de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet et du Sénat Gérard Larcher, ainsi que « les présidents des partis et groupes qui ont eu la responsabilité des affaires du pays à une période ou à une autre ». à un autre de la Ve République ». A savoir tous sauf La France insoumise – qui n’a pas souhaité se rendre à Matignon pour des entretiens bilatéraux -, le Rassemblement national et l’UDR de son allié Éric Ciotti.
Dans sa lettre, François Bayrou évoque, à côté de la crise politique et budgétaire, la situation à Mayotte, « probablement la plus grave catastrophe naturelle de l’histoire de France depuis plusieurs siècles », mais aussi en Nouvelle-Calédonie, estimant que « ces deux situations s’additionnent ». « Placer les dirigeants politiques « confrontés à des responsabilités sans précédent ».
Matignon a par ailleurs démenti mardi après-midi auprès de l’AFP que le chef du gouvernement ait remis une première liste de ministres au chef de l’Etat.
François Bayrou poursuit son délicat exercice de formation d’un gouvernement “de personnalités”, après avoir essuyé une intense polémique sur sa présence lundi soir au conseil municipal de Pau, en pleine crise à Mayotte.
Il a notamment reçu mercredi à Matignon les dirigeants du Parti radical, alors Éric Ciotti, et le président des sénateurs macronistes François Patriat, avant la présidente du groupe RDSE à la Chambre haute, Maryse Carrère.
Menaces de censure
François Bayrou avait auparavant reçu le ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau. Ce dernier venait d’estimer que les conditions n’étaient « pas réunies » pour qu’il reste au gouvernement. S’exprimant au nom de son parti, il a expliqué que LR “va essayer de voir dans les prochains jours si un certain nombre d’obstacles sont levés”. “Ce serait dommage que le gouvernement se déplace à gauche alors que la France est à droite.”
L’extrême droite a également formulé des revendications. Le président LR des Hauts-de-France Xavier Bertrand ou l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne dans l’équipe ne sont pas, pour la députée RN Laure Lavalette. Ils « n’incarnent pas la rupture » avec le macronisme souhaitée par les Français, a-t-elle expliqué sur France Inter.
Au-delà de cela, ce sont des menaces de censure de plus en plus clairement exprimées qui ont fait monter les enchères mercredi.
“Si François Bayrou ne prend pas en compte les erreurs qu’a pu commettre Michel Barnier, tant sur la forme que sur le fond, il se dirigera aussi vers les mêmes conséquences, c’est-à-dire tôt ou tard vers la censure”, a ainsi prévenu le vice-président. président du RN Sébastien Chenu.
Soufflant le chaud et le froid sur le président du MoDem, qui entretient des relations cordiales avec Marine Le Pen, le parti frontiste commence à hausser le ton sur la préparation du budget.
Car, si le Parlement a définitivement adopté une « loi spéciale » pour autoriser l’exécutif à lever des impôts et à emprunter pour financer l’État et la Sécurité sociale, cela n’épargnera pas au gouvernement de travailler dans l’urgence pour doter la France d’un budget pour 2025.
Quand y aura-t-il un gouvernement ?
L’extrême droite n’est pas la seule à faire pression sur Matignon.
François Bayrou, “jour après jour, heure après heure, écrit l’histoire de sa propre censure”, a ainsi estimé la patronne des Écologistes, Marine Tondelier, pour qui “les inscriptions ratées ne peuvent se rattraper”.
“S’il vient nous proposer le même budget que celui proposé par M. Barnier, c’est-à-dire qu’on change juste les gens, mais on a les mêmes, les mêmes budgets, les mêmes difficultés pour les Français, on va censurer ce budget”, là », a insisté le communiste Fabien Roussel, dont le groupe envisage de voter la censure dès que la déclaration de politique générale sera faite le 14 janvier.
Plus modérée, Johanna Rolland, première secrétaire adjointe du PS, a appelé à « des interlocuteurs, des hommes et des femmes qui s’assoient autour de la table et qui nous indiquent la voie du compromis, pour aller vers la non-censure, qui peut se poser ».
Au milieu de chacun de ces obstacles surgit une autre inconnue : quand François Bayrou pourra-t-il présenter son gouvernement ?
Une nouvelle réunion à l’Élysée a eu lieu mercredi après-midi entre les deux chefs de l’exécutif. Auparavant, François Bayrou avait reçu son prédécesseur Gabriel Attal, désormais chef des députés macronistes.
En tout cas, il n’y aura pas d’annonce gouvernementale a priori avant dimanche, le président de la République se rendra à Bruxelles (Conseil européen) mercredi, puis à Mayotte jeudi et enfin auprès des troupes françaises à Djibouti jusqu’à son retour en France le Dimanche matin.
Avec l’AFP