La réduction de nos émissions accélère-t-elle le réchauffement climatique ? – .

La réduction de nos émissions accélère-t-elle le réchauffement climatique ? – .
La réduction de nos émissions accélère-t-elle le réchauffement climatique ? – .

La réduction des gaz à effet de serre (GES)… pourrait-elle accélérer le réchauffement climatique ? Une idée contre-intuitive, mais bien réelle. En réduisant nos émissions polluantes, nous réduisons également les aérosols qui contribuent à rafraîchir l’atmosphère. Explications.


Publié à 1h52

Mis à jour à 9h00



Les GES ne sont-ils pas censés être la cause du réchauffement climatique que nous connaissons actuellement ?

C’est toujours le cas. Les activités humaines à l’origine des émissions de gaz à effet de serre restent la principale cause du réchauffement observé depuis le début de l’ère préindustrielle. Entre 1850 et 2024, la concentration de CO2 dans l’atmosphère est passée de 285 parties par million (ppm) à 426,95 ppm le 26 juin. La courbe de hausse des températures suit également de manière presque identique celle de la concentration de dioxyde de carbone (CO2).

Regardez une animation de la NASA illustrant le réchauffement climatique depuis l’ère préindustrielle (en anglais)

Visualisez l’évolution des niveaux de CO2 dans l’atmosphère (en anglais)

Mais si je comprends bien, nos émissions polluantes réchauffent la planète tout en la refroidissant. Est-ce que c’est nouveau ?

Non, ce n’est pas nouveau. Lorsque nous brûlons du charbon ou du pétrole, nous rejetons également du dioxyde de soufre (SO2) dans l’air. Or, le dioxyde de soufre joue un rôle rafraîchissant en bloquant les rayons du soleil, explique Alejandro Di Luca, professeur au département des sciences de la Terre et de l’atmosphère de l’UQAM.

“C’est le même phénomène qui se produit après une éruption volcanique qui libère des quantités importantes de dioxyde de soufre dans l’atmosphère”, ajoute Kent Moore, professeur à l’Université de Toronto et spécialiste des changements climatiques.

Le dioxyde de soufre est également une source majeure de pollution atmosphérique et a des effets sur la santé humaine. En Chine par exemple, les émissions de dioxyde de soufre ont été réduites de plus de 70 % depuis 2005. Le même scénario est vrai pour le transport naval, où les nouvelles normes entrées en vigueur en 2020 ont réduit les émissions de ce polluant de 80 %. Bref, c’est l’exemple parfait d’une question complexe qui ne peut se limiter à des réponses simplistes.

Si ce n’est pas nouveau, pourquoi en parler maintenant ?

Un rapport récent de Washington Postintitulé « Nous avons accidentellement refroidi la planète – et cela est sur le point de s’arrêter », abordait le thème des aérosols comme le dioxyde de soufre et de leur effet refroidissant. Le texte a été repris par plusieurs climato-sceptiques, qui soutiennent en substance qu’il faut continuer à brûler du pétrole car il contribue à refroidir la planète…

Lire l’article de Washington Post (en anglais ; abonnement requis)

La chroniqueuse Nathalie Elgrably a également partagé le reportage de Washington Post sur le réseau X qui écrit : « Nous avons donc « refroidi la planète tout en la réchauffant ». J’en déduis qu’au final, la température n’a pas changé. Excellente nouvelle ! Il ne reste plus maintenant qu’à supprimer toutes les taxes que nous payons au nom de la « lutte contre le changement climatique ». »

Est-il vrai que la température n’a pas changé ?

C’est faux. Les aérosols ont quelque peu masqué le réchauffement climatique, mais la planète s’est bel et bien réchauffée depuis le début de l’ère préindustrielle, estime Kent Moore. « Les aérosols nous ont aidés au cours des dernières décennies en masquant le réchauffement. Si nous les supprimons, le réchauffement sera plus important. »

Dans quelle mesure ce réchauffement serait-il encore plus important sans ces aérosols ?

Il ne semble pas y avoir de consensus sur la question. « Nous sommes dans une zone d’incertitude très profonde. Il pourrait s’agir d’un refroidissement masqué », a déclaré le climatologue Zeke Hausfather au Washington Post.

« L’ampleur du refroidissement associé à nos émissions de dioxyde de soufre et d’autres aérosols est l’une des plus grandes incertitudes du système climatique et a de grandes implications sur l’ampleur du réchauffement que nous connaîtrons à l’avenir à mesure que nous assainissons et que nos émissions diminuent », a ajouté Hausfather sur X le 25 juin.

Alejandro Di Luca, de son côté, nous renvoie au dernier rapport du GIEC, qui estimait en 2021 que le dioxyde de soufre avait un effet refroidissant d’environ 0,5 degré. Selon Kent Moore, le réchauffement pourrait être jusqu’à 40 % plus élevé sans ces aérosols.

Voir un graphique montrant les facteurs anthropiques responsables du réchauffement climatique

Alors, en réduisant nos émissions, c’est vrai qu’on accélère le réchauffement climatique…

À court terme, c’est effectivement le cas, affirment les experts. Mais il faut aussi prendre en compte la durée de vie du CO2 un toi tellement2 dans l’atmosphère, explique Alejandro Di Luca. « Le CO2 “restera dans l’atmosphère pendant des centaines d’années, alors que pour le dioxyde de soufre, il est beaucoup plus court”, ajoute-t-il, précisant que l’effet de ces aérosols sur le climat s’estompera plus rapidement que dans le cas du CO.2.

Les experts s’accordent à dire que l’incertitude règne également quant à la façon dont le climat réagira à ces différents aérosols. « Notre meilleure solution est de réduire nos émissions. Si nous continuons à brûler des combustibles fossiles, la planète continuera de se réchauffer », affirme Kent Moore.

 
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