C’est désormais officiel : le mot wokisme rejoint les 59 000 termes de la langue française dans le neuvième édition de Dictionnaire de l’Académie française. Derrière cette reconnaissance se cache bien plus qu’une simple inscription linguistique.
Ce mot, né d’un courant de pensée visant à sensibiliser aux injustices, est devenu le symbole d’une époque en quête de justice sociale, mais aussi le théâtre de polémiques passionnées.
Cependant, la définition qui lui est attribuée, bien que nécessaire, semble incomplète. Le wokisme, ce mot chargé de sens, méritait mieux.
Un mot ancré dans l’histoire
Réduire le wokisme à un mouvement des années 2000 né aux États-Unis, comme le propose l’Académie française, c’est occulter ses origines profondes.
Ce terme est avant tout un cri d’avertissement de la culture afro-américaine, un appel à rester « éveillé » face aux injustices raciales et systémiques. De la lutte pour les droits civiques dans les années 1960 au mouvement Black Lives Matter, le wokisme porte en lui l’héritage des luttes pour l’émancipation et l’égalité.
Ces racines historiques, absentes de la définition actuelle, sont pourtant essentielles pour comprendre la profondeur, la légitimité et les éventuelles déviations de ce concept.
Un phénomène qui transcende les frontières
Au fil du temps, le wokisme s’est mondialisé, embrassant de multiples causes : sexisme, homophobie, écologie, justice sociale. Cette perspective intersectionnelle, qui relie diverses formes de discrimination, est au cœur de sa résonance actuelle.
Aujourd’hui, cela influence des pratiques telles que le langage inclusif, les politiques de diversité des entreprises et même les mouvements environnementaux.
Mais cette mondialisation a aussi généré des résistances, notamment face aux idéaux républicains et à la laïcité.
Ce choc de perspectives, reflétant des visions divergentes de l’inclusion et de la justice, méritait d’être inclus dans la définition.
Un miroir tendu à nos sociétés
Le wokisme révèle les tensions qui traversent nos sociétés. Cela soulève des questions fondamentales : jusqu’où pouvons-nous aller pour réparer les injustices historiques ? Comment concilier liberté d’expression et respect des différences ?
Ses partisans y voient un réveil nécessaire, un levier pour construire une société plus équitable. Ses détracteurs y voient une dérive dogmatique, une menace pour les traditions et le débat d’idées. Ces controverses ne sont pas des détails périphériques : elles sont au cœur de la façon dont nos sociétés se redéfinissent.
En omettant ces dimensions, la définition actuelle illustre les limites de l’Académie française face à l’évolution rapide des phénomènes sociaux. Inclure le wokisme dans le Dictionnaireest cependant bien plus qu’un acte lexicographique : c’est l’occasion de réfléchir sur un mouvement qui façonne nos discours et nos institutions. Réduire ce mot à une définition simpliste, c’est ignorer ses ambiguïtés et son impact, mais passer à côté des tensions et des espoirs d’une époque en quête d’éveil.
Et vous, quelle place accordez-vous à cet éveil dans nos sociétés en mutation ?
