Ne touchez pas à mon vitrail ! – .

Polémique autour de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Faut-il changer ce qui n’est pas cassé ?


Publié à 1h17

Mis à jour à 6h00

  • Nom : Cathédrale Notre-Dame de Paris
  • Âge : 861 ans
  • Fonction : Lieu de culte, lieu de culture, site touristique
  • Mots clés : Restauration, vitrail, patrimoine, opposition

Pourquoi en parle-t-on

Cinq ans après le spectaculaire incendie qui a ravagé sa flèche, sa voûte et une partie de son mobilier (15 avril 2019), la cathédrale Notre-Dame est sur le point de renaître. Mais sa restauration reste controversée. La semaine dernière, l’Archevêché de Paris a lancé un appel à candidatures pour la création de vitraux figuratifs contemporains dans une partie du bâtiment historique. Comme on peut l’imaginer, cela ne fait pas l’unanimité.

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PHOTO BENOIT TESSIER, ARCHIVES REUTERS

Une des rosaces monumentales de la cathédrale

Des gris, pas des vitraux

Pas de panique, on ne touchera pas aux trois rosaces monumentales qui ont miraculeusement survécu à l’incendie… Il s’agit plutôt de remplacer les grisailles de six chapelles situées dans le bas-côté de la nef, côté Seine, conçues par l’architecte Eugène. Viollet-le-Duc entre 1855 et 1865, et resta intact après le désastre. Si l’on a bien compris, l’idée derrière ce projet est de profiter de la restauration pour « replacer » la cathédrale dans son époque et marquer sa renaissance. Le thème imposé n’est cependant pas moderne : il tourne autour de la Pentecôte.

Pas la première fois

Ce ne serait pas la première fois que des modifications seraient apportées au bâtiment. Au fil des années, Notre-Dame de Paris est devenue une sorte de « patchwork » d’époques et de styles, avec des ajouts au XIIe siècle.e et au 13e siècle, ainsi qu’au XVIIeeau 19èmee et au 20e siècle. « De la cathédrale originelle, il reste surtout les murs, les voûtes, les vitraux des trois grandes roses, le décor de l’enceinte du chœur et une partie de la statuaire extérieure », souligne l’historien Mathieu Lours, auteur du livre Cathédrales dans le monde. Pour cet expert des cathédrales, Notre-Dame serait la somme d’une “tradition évolutive”, sa pureté ancien relatif à une « vision romantique ».

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PHOTO HUBERT HITIER, ARCHIVES DE L’AGENCE FRANCE-PRESSE

Incendie ravageant la cathédrale, le 15 avril 2019

Protestation et pétition

Malgré tout, l’opération a créé la polémique. Début décembre, l’historien de l’art Didier Rykner a lancé une pétition pour s’opposer au projet et préserver les vitraux de Viollet-le-Duc. Depuis, cent quarante mille noms ont été recueillis et M. Rykner ne s’emporte pas. « La cathédrale est classée monument historique. On ne peut pas remplacer les vitraux d’une église classée historique, point barre ! », fustige le fondateur du magazine La plateforme artistique, spécialisé dans l’histoire de l’art et du patrimoine occidental du Moyen Âge aux années 1930. L’initiative est d’autant plus « choquante », dit-il, que les grisailles n’ont pas été détruites par l’incendie et ont même été restaurées au passage ! « Qu’est-ce qui a justifié leur remplacement ? », demande-t-il, criant au « vandalisme ».

Dans un musée ?

Mathieu Lours juge que Didier Rykner “exprime un point de vue recevable”. Il constate que tant d’efforts ont été déployés pour reconstruire à l’identique la flèche de la cathédrale (également conçue par Viollet-le-Duc) à l’extérieur, tandis que les vitraux de l’architecte ont été retirés à l’intérieur. ‘intérieur. « Il est légitime que cela pose question. » Il souligne toutefois que les grisailles démontées seront exposées au musée Notre-Dame, et donc toujours accessibles. Pas de quoi apaiser M. Rykner, pour qui les vitraux “n’ont plus de sens” en dehors de leur contexte. Les chartes d’Athènes et de Venise semblent aller dans le même sens. Mais Mathieu Lours précise que ces grandes conventions internationales sur la conservation et la préservation du patrimoine sont « sujettes à interprétation ».

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PHOTO LUDOVIC MARIN, ARCHIVES DE L’AGENCE FRANCE-PRESSE

Travaux de reconstruction de la cathédrale le 14 mars

Brûlez le patrimoine

A noter que l’enquête n’a toujours pas permis de déterminer les causes du désastre qui a détruit Notre-Dame. Didier Rykner rappelle cependant que 80 % des incendies sur les monuments historiques ont lieu lorsqu’il y a des chantiers. Ce fut le cas en 2019 à Paris, mais aussi cette semaine à Copenhague, où l’ancienne Bourse (XVIIee siècle) et sa flèche ont été ravagées par les flammes, dans un quasi-remake de Notre-Dame. «À un moment donné, il faudra arrêter de brûler les monuments quand on les restaurera», estime Didier Rykner. Un site classé monument historique n’est pas un site comme les autres. Cela nécessite des précautions supplémentaires. »

Ironie de l’histoire

Les candidats ont jusqu’au 24 mai pour soumettre leur projet. Un « binôme gagnant » (un verrier, un artiste) sera choisi par un comité de 20 membres en novembre, afin de proposer un prototype pour la réouverture officielle de la cathédrale prévue le 8 décembre. Ils ne seront pas installés avant 2026. Coïncidence de calendrier : la Cité du vitrail de Troyes expose actuellement des vitraux figuratifs contemporains réalisés pour Notre-Dame dans les années 1930. Ils furent supprimés au bout d’un an… à cause d’une controverse entre les anciens et les modernes !

 
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