La grippe dont vous êtes le coupable (pour les médias)

La grippe dont vous êtes le coupable (pour les médias)
La grippe dont vous êtes le coupable (pour les médias)

Chers amis,

L’épidémie de grippe qui sévit cet hiver est assez intense.

Assez intense, en tout cas, que la semaine dernière, 87 hôpitaux français déclenchent le « plan blanc »permettre le déplacement de certaines opérations non urgentes et le rappel du personnel en congé[1].

On parle donc un peu partout dans la presse d’un niveau d’hospitalisations « exceptionnellement élevé ».[2].

Pourtant, selon les statistiques de médecine de ville… » l’épidémie est intensité modérée[3]» !

Comment expliquer ce paradoxe ?!

Tout simplement, et pourtant aucun article de journal, de télévision ou de radio n’en parle.

Car, à la place, on vous répète l’éternel refrain : « c’est parce que la couverture vaccinale n’est pas suffisante ! » »

C’est Exactement le discours prononcé mardi dernier[4] de Nicolas Revel, directeur général de l’AP-HP (Assistance publique-hôpitaux de Paris), qui a déclaré, en réponse à ce niveau d’hospitalisations exceptionnellement élevé : « Il faut remettre l’accent sur la vaccination, notamment pour les personnes âgées et les personnes vulnérables. »

Traduction : s’il y a autant d’hospitalisations à cause de la grippe saisonnière, c’est parce que vous n’êtes pas raisonnable et que vous ne vous êtes pas fait vacciner !

Bref, C’est ta faute !

Je précise que, bien que directeur général de l’AP-HP, Nicolas Revel n’est pas pas médecin.

Dans notre beau pays où l’exercice illégal de la médecine est un délit étroitement surveillé par le Conseil de l’Ordre des médecins, vous serez peut-être surpris de voir un non-médecin ordonnant ainsi à des millions de ses concitoyens d’aller se faire vacciner.

Nicolas Revel n’est pas médecin, non : c’est un haut fonctionnaire.

C’est un pur énarque, passé par la Cour des comptes et ancien directeur de cabinet de Bertrand Delanoë, François Hollande (en tandem avec Emmanuel Macron), Edouard Philippe et Jean Castex.[5].

Son CV montre qu’il est à 100% aligné sur le parti présidentiel, c’est-à-dire promoteur de l’industrie pharmaceutique ; et dans ce registre, la méthode consiste à culpabiliser le citoyen non vacciné.

Encore…

Pourtant, le vaccin contre la grippe est bel et bien un outil « identifié » dans la lutte contre le virus, chaque année…

Cet argument a son utilité, mais il est spécieux ; On peut d’abord discuter de l’efficacité absolue des vaccins antigrippaux, comme le fait brillamment, preuves à l’appui, un médecin libre comme Michel de Lorgeril dans un livre au titre clair : Vaccins contre la grippe : illusions et désinformation[6].

Mais bizarrement, là n’est pas la question.

Car la démarche de culpabilisation de Nicolas Revel brandissant l’argument de la couverture vaccinale ne relève pas seulement du réflexe pavlovien : elle vient de le tabagisme.

Pour deux raisons.

Le vaccin contre la grippe est un outil à l’efficacité extrêmement variable.

Pour une raison imparable : chaque année, les industriels sont obligés de concocter un « nouveau » vaccin en misant sur la souche qui circulera majoritairement l’hiver suivant.

Les vaccins actuellement administrés ont donc été conçus il y a un an.

Rendons à César ce qui est à César : cette année, l’OMS (qui « prédit » les souches dominantes du virus de la grippe et fait ses recommandations) a eu plutôt raison de recommander des vaccins quadrivalents incluant les souches suivantes[7] :

  • Virus de type A (H1N1) : A/Victoria/4897/2022 (H1N1)pdm09 pour les vaccins produits dans des œufs, ou A/Wisconsin/67/2022 (H1N1)pdm09 pour les vaccins recombinants ou produits en culture cellulaire.
  • Virus de type A (H3N2) : A/Thailand/8/2022 (H3N2) pour les vaccins sur œufs, ou A/Massachusetts/18/2022 (H3N2) pour les autres vaccins.
  • Virus de type B (Ligne Victoria) : B/Austria/1359417/2021.
  • Virus de type B (Ligne Yamagata) : B/Phuket/3073/2013

Actuellement, en , les principaux virus grippaux en circulation sont :

  • Virus A (H1N1)pdm09 : c’est le virus le plus fréquemment détecté ;
  • Virus B/Victoria : également présent de manière significative ;
  • Virus A (H3N2) : circule activement, bien que moins dominant que les deux précédents.

Or, en incitant les « personnes âgées » à se faire vacciner, Nicolas Revel commet, volontairement ou non je ne sais, une bévue remarquable : la grippe de cette année touche davantage les jeunes et moins les personnes âgées (à partir de 60 ans). ans) comme d’habitude.

Il y a une raison très simple à cela, comme l’explique l’épidémiologiste Bruno Lina sur Europe 1 :

« Toute personne née avant 1957, la première fois qu’elle a été touchée par un virus, c’était le virus H1N1. Cette immunité initiale induit une protection particulière contre ce type de virus. Et inversement, ceux nés après 1957 se défendit moins bien face aux AH1N1 »[8].

Autrement dit: S’il fallait inciter une catégorie de population à se faire vacciner contre la grippe, ce ne serait pas les « personnes âgées »… mais au contraire les personnes de moins de 58 ans ans, qui ne sont pas naturellement immunisés contre cette grippe !!!

Une curieuse « prescription » donc de la part de notre énarque.

Mais en centrant une fois de plus tout sur le vaccin et la responsabilité du patient, notre énarque remplit son rôle : elle détourne l’attention du public de la vraie raison de la surcharge d’hospitalisations de l’hôpital public.

Souvenez-vous de l’apparent paradoxe que j’évoquais au début de cette lettre : l’épidémie de grippe est d’« intensité modérée », et pourtant 87 hôpitaux sont obligés d’initier le plan blanc pour faire face au nombre « exceptionnellement élevé » d’hospitalisations.

L’explication ?

Elle est simplement arithmétique.

Si l’hôpital public est débordé, ce n’est pas parce que cette grippe est d’une intensité incroyable – on a vu que ce n’était pas le cas – mais tout simplement parce que les capacités d’accueil des hôpitaux ont augmenté. tragiquement dégradé.

Entre 2013 et 2023, 43 500 lits d’hospitalisation complète ont été supprimés[9].

Vous souvenez-vous, au lendemain de la première année de Covid – 2020 –, lorsque le gouvernement annonçait qu’il allait réduire les efforts sur les capacités d’hospitalisation ?

Eh bien, c’était le cas, pardonne-moi, folieparce qu’en réalité Après 2020 le rythme de suppression des lits d’hôpitaux s’est accéléré.

Rien qu’en 2022, l’hôpital public a perdu plus de 6 700 lits d’hospitalisation complets. Puis autour de 4900 en 2023.

A ce stade, il faut comprendre une chose : lorsque l’État supprime un lit d’hospitalisation complet, il ne supprime pas « seulement » du matériel médical : ça supprime aussi le personnel soignant qui va avec.

Pourtant, sans surprise, depuis la fin de la dernière décennie, les personnels soignants n’ont cessé d’alerter sur la baisse des effectifs : c’est ce qu’on appelle la « crise d’urgence », et vous avez vous-même pu le faire. vois si tu devais y aller.

Posez-vous maintenant cette question : 87 Les hôpitaux auraient-ils dû initier ce « plan blanc » face à une épidémie de grippe un peu plus virulente que d’habitude ? si ces 43500 les lits, et le personnel soignant qui les accompagne, n’avaient pas été supprimés ?

Autrement dit, l’incitation à la vaccination de Nicolas Revel n’est pas qu’un réflexe conditionné qui fait des affaires pour l’industrie pharmaceutique : c’est un écran de fumée, culpabilisant en plus, masquant la dégradation programmée du service public de santé de notre pays.

Ce réduction drastique de la capacité hospitalière limite notre capacité à faire face aux pics épidémiques saisonniers.

Les services d’urgence, déjà sous pression, peinent à absorber l’afflux de patients, entraînant des retards de prise en charge et une dégradation de la qualité des soins.

Par ailleurs, la stratégie gouvernementale privilégiant la vaccination comme principal moyen de défense contre la grippe montre clairement ses limites.

Si la vaccination est un instrument de prévention utile mais non miraculeux, elle ne peut à elle seule compenser les insuffisances structurelles de notre système de santé.

La fermeture continue de lits d’hôpitaux et le manque de personnel soignant qualifié compromettent sérieusement notre capacité à répondre efficacement aux crises sanitaires.

Dans ces conditions, vous avez tout intérêt à mettre toutes les chances de votre côté pour vous protéger et améliorer votre immunité.

Cela peut être réalisé grâce au vaccin contre la grippe, si vous y croyez.

Mais je suis convaincu que cela ne suffit pas : seule une stratégie immunitaire globale peut permettre de constituer un bouclier hivernal véritablement efficace.

J’ai eu cette grippe juste après les vacances. Mais mes symptômes étaient bénins, en toute humilité car je sais depuis longtemps quoi faire pour augmenter mes chances d’y résister !

Portez-vous bien,

Rodolphe


[1] https://www.ledauphine.com/magazine-sante/2025/01/14/epidemie-de-grippe-pourquoi-est-elle-si-severe-cette-annee – « Épidémie de grippe : pourquoi est-elle si grave cette année? “, dans. Le Dauphiné libéré14 janvier 2025

[2] https://www.sciencesetavenir.fr/sante/grippe-pour-le-patron-de-l-ap-hp-il-faut-remit-l-accent-sur-la-vaccination_183363 – « Grippe : hospitalisations de » un niveau « exceptionnellement élevé », Sciences & Avenir14 janvier 2025

[3] Le Dauphiné libéréart. cit.

[4] Sciences & Avenirart. cit.

[5] https://en.wikipedia.org/wiki/Nicolas_Revel – « Nicolas Revel » (fichier Wikipédia)

[6] Michel de Lorgeril, Vaccins contre la grippe : illusions et désinformationChariot D’or, 2020

[7] https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/nouvelles-missions/vaccination/vaccin-antigrippal-2024-2025-sa-composition-devoilee?utm_source=chatgpt.com – Yolande Gauthier, « Vaccin antigrippal 2024-2025 : sa composition révélé », dans. Le moniteur de pharmacie27 février 2024

[8] https://www.europe1.fr/sante/grippe-2025-presente-sur-tout-le-territoire-pourquoi-lepidemie-touche-tout-particulierement-les-jeunes-238378 – Yasmina Kattou, « Grippe 2025 : présent Dans tout le pays, pourquoi l’épidémie touche-t-elle particulièrement les jeunes ? “, dans. Europe 18 janvier 2025

[9] https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications-communique-de-presse/etudes-et-resultats/241031_ER_SAE-2023 – Bénédicte Boiguérin, « En 2023, la baisse du nombre de lits et l’augmentation du le nombre de places continue – Premiers résultats de la réduction administrative de la statistique annuelle des établissements de santé (SAE) 2023 », 31 octobre 2024

 
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