En France, l’ensemble du territoire, à l’exception de la Martinique qui est encore en phase pré-épidémique, est touché par une épidémie de grippe selon un communiqué de SPF du 26 décembre. En semaine 51, 2% des décès certifiés électroniquement mentionnent le grippe, contre seulement 0,5% la semaine précédente. Pour contenir cette épidémie, la vaccination est recommandée depuis le 14 octobre. Or, pour l’organisme de santé, lors de la saison 2023/2024, 54% des personnes de 65 ans et plus ont été vaccinées, contre seulement 25,4% des moins de 65 ans.
L’incitation électronique à la vaccination donne des résultats significatifs
Parmi les 299 881 participants danois âgés de 18 à 64 ans (âge médian 52,0) atteints d’une maladie chronique, 39,6 % de ceux qui ont reçu une lettre électronique ont été vaccinés, contre seulement 27,9 % dans le groupe qui n’a reçu aucune lettre (une augmentation significative de 11,7 points de pourcentage). L’étude, réalisée entre le 24 septembre 2023 et le 31 mai 2024, a pris en compte les vaccinations réalisées au plus tard le 1er décembre 2024 pour cette saison vaccinale.
Cependant, les chercheurs précisent dans l’étude que « Malgré la forte augmentation observée de la couverture vaccinale contre la grippe, les interventions n’ont généralement pas entraîné de différences dans notre évaluation exploratoire prédéfinie des résultats cliniques. »
La signature d’un médecin ainsi que d’un expéditeur connu et gouvernemental sont des éléments incitatifs de l’email
Les lettres électroniques ont toutes été envoyées le 24 septembre 2023, soit une semaine avant le début de la période de vaccination danoise. La procédure d’expédition utilisait un système gouvernemental officiel, pour garantir la crédibilité du message selon les auteurs de l’étude. Précisons d’ailleurs que les Danois ont l’habitude de recevoir et de reconnaître ces emails de l’autorité sanitaire du pays. Pour renforcer cette crédibilité, les lettres étaient signées par des médecins spécialistes. Enfin, les courriers comportaient un lien direct vers la plateforme de réservation de vaccination, ainsi qu’une possibilité de prise de rendez-vous par téléphone.
Les répétitions de l’expédition et les informations sur les risques cardiovasculaires incitent encore davantage à la vaccination.
Six modèles de lettres différents ont été utilisés. Parmi eux, la lettre renvoyée une deuxième fois 10 jours après la première, a donné les meilleurs résultats avec un taux de vaccination atteignant 41,8%, soit une augmentation de 13,9 points de pourcentage par rapport au groupe témoin. Un autre modèle efficace a mis en évidence les bénéfices cardiovasculaires potentiels de la vaccination, atteignant un taux de 39,8 %.
Une étude à grande échelle sur l’impact des lettres électroniques
Déjà étudiée pour la saison grippale 2022/2023, cette stratégie a été publiée en 2023 dans La Lancette. Il a montré que les personnes âgées de 65 ans et plus étaient davantage vaccinées lorsqu’elles recevaient un e-mail du gouvernement danois. L’augmentation observée a toutefois été plus modérée, puisque plus de 80 % des Danois de cette tranche d’âge étaient déjà vaccinés.
Pour la saison 2023/2024, l’étude a également ciblé des patients ayant des antécédents d’infarctus du myocarde. Les résultats, publiés dans JAMA Cardiologie en novembre, révèlent des tendances similaires : les patients qui ont reçu la lettre électronique ont été davantage vaccinés. Ces résultats renforcent l’idée selon laquelle les rappels numériques peuvent être efficaces même auprès de populations déjà sensibilisées.
Les biais de l’étude limitent sa transposition en dehors du Danemark
Certaines personnes ne savaient peut-être pas qu’elles étaient éligibles à la vaccination gratuite avant de recevoir la lettre. Cela pourrait expliquer une partie de l’augmentation observée, quels que soient la forme et le contenu de la lettre. Par ailleurs, les chercheurs reconnaissent un autre biais dans l’étude et précisent que « Les citoyens étant légalement tenus de lire et de répondre aux messages gouvernementaux importants transmis via ce système, nos interventions ont peut-être été considérées avec une importance accrue. ».
Comment les chercheurs danois ont-ils pu accéder aux patients ?
L’étude s’est appuyée sur les registres administratifs nationaux danois, considérés comme complets et de haute qualité. Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont obtenu des autorisations spéciales pour utiliser ces données sans consentement individuel, tout en respectant les directives éthiques et juridiques en vigueur. ” L’Autorité danoise des données de santé a accordé l’accès aux données du registre national et approuvé le contenu des lettres d’intervention », peut-on lire dans l’article.
https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/vers-une-gestion-simplifiee-du-diabete-de-type-2-linsuline-hebdomadaire-confirme-son
Cibler électroniquement les populations en France, est-ce possible ?
La mise en œuvre d’une stratégie similaire en France nécessiterait l’accès aux bases de données de santé et l’utilisation d’une plateforme électronique sécurisée de transmission des courriers. Actuellement, la messagerie sécurisée MSSanté pourrait être utilisée pour ce type de communication. Toutefois, des ajustements législatifs et logistiques pourraient être nécessaires pour garantir le respect des règles de confidentialité et faciliter l’identification des patients éligibles. Une telle approche pourrait améliorer les taux de vaccination, en particulier parmi les populations vulnérables et sous-vaccinées.
Pour aller plus loin :
– Un article rédigé sous la direction de notre conseillère médicale éditoriale, le Dr Cyrielle Rambaud.