« Nous souhaitons offrir une alternative aux 78 % de patients atteints de mucoviscidose qui ne bénéficient pas actuellement de la trithérapie standard. » Les chercheurs de l’Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA) Frédéric Velard et Stéphane Gérard travaillent en effet sur une autre solution, un médicament visant à prolonger l’espérance de vie des personnes atteintes de cette maladie génétique rare. Leur start-up, VG2D Pharma, basée à Reims et dirigée par Imane Wild, vient d’être récompensée par le concours national i-Lab. Cette prime leur octroie une aide de 375 000 euros qui leur permettra de poursuivre la recherche et le développement de cette solution thérapeutique, en recrutant deux ingénieurs de recherche pour chacune de leur spécialité (biologie et chimie).
Espérance de vie sous trithérapie à 49 ans
Aucun traitement ne permet actuellement de guérir cette maladie génétique rare qu’est la mucoviscidose. Mais les patients ont littéralement pu mieux respirer grâce à la trithérapie lancée en France en 2021. Elle permet de prolonger l’espérance de vie de quelque 52 % des patients traités en France jusqu’à environ 49 ans. « Peut-être 70 ans dans la décennie à venir », indiquent le docteur Frédéric Velard, spécialiste de la mucoviscidose, et le professeur Stéphane Gérard, expert en chimie médicinale et en conception de médicaments. La trithérapie, qui coûte en moyenne 300 000 euros par an et par patient, est prise en charge par le système de santé français. Le sort de milliers d’autres patients atteints de mucoviscidose dans le monde est très différent. « Une étude de 2022 estime que seulement 22 % de ces patients bénéficient d’une trithérapie dans le monde », indiquent les deux chercheurs. « Notre slogan est de mettre l’innovation thérapeutique au service du plus grand nombre. »
Une innovation prometteuse
Comment ces deux chercheurs ont-ils réussi à détecter une solution ? En travaillant sur la protéine CFTR dont la mutation est responsable de la mucoviscidose. Au cours de leurs recherches, Frédéric Velard et Stéphane Gérard ont découvert l’action correctrice d’une famille de molécules sur la fonction de cette protéine CFTR. « Lorsque cette mutation se produit, la protéine ne fonctionne plus correctement. Notre approche vise à l’aider à faire son travail, alors qu’il n’est normalement pas en mesure de le faire », explique Frédéric Velard, qui travaille depuis plus de 12 ans sur la maladie. Cette découverte a donné lieu au dépôt d’un brevet deux ans plus tard.
Un milliard d’euros pour développer un médicament
Concrètement, pour obtenir un médicament, « il faut environ 12 ans et un milliard d’euros de fonds », explique Stéphane Gérard. « Cela fait environ 6 ans que nous sommes en activité et nous avons encore une tonne de fonds à collecter. » C’est pourquoi, en janvier 2024, après deux ans de réflexion, les deux chercheurs décident de créer une start-up pour faciliter et accélérer la recherche financière. Soutenu par l’incubateur Innovact et l’URCA, qui leur a accordé un statut leur permettant, à côté de leurs fonctions, d’être co-inventeurs et de développer l’activité de la start-up, le duo a également accueilli comme PDG un docteur en neurosciences, Imane Wild, basé à Cardiff. « Elle possède des compétences commerciales et une expérience au sein de Big Pharma sur la question du marketing qui nous complètent très bien.
Espoir de premières phases cliniques en 2027
A ce stade, des travaux de laboratoire ont lieu in vitro et des tests sur animaux ont été réalisés. Des phases de recherche pour affiner la compréhension du phénomène biologique sont encore nécessaires avant de passer à une phase de tests sur l’homme. Les deux chercheurs sont optimistes. « Nous espérons envisager les premières phases cliniques en 2027 et, idéalement, une AMM en 2031-2032. »
Pour atteindre ces objectifs, VG2D Pharma cherche à lever entre 1 et 1,5 million d’euros dès 2025. Le soutien d’i-Lab leur est précieux, d’autant qu’il leur permet d’entretenir un ancrage territorial en générateur d’emplois. « On part d’une levée de fonds relativement modeste, mais il faut crédibiliser la démarche, susciter la confiance », explique Stéphane Gérard. « C’est un développement à long terme, mais quand on croit en son projet, il faut persévérer. »