Avant le Studio Ghibli, découvrez les débuts du maître Hayao Miyazaki

A l’occasion de la sortie de la version remasterisée de « Lupin III : Le Château de Cagliostro » (1979) ainsi que de la distinction imminente du Studio Ghibli avec une Palme d’Or d’honneur au Festival de Cannes, revenons aux débuts du grand maître de l’animation japonaise, Hayao Miyazaki, depuis ses premiers pas dans le monde du cinéma jusqu’à la création du studio emblématique.

(Un article de Damien Brodard)

Une vocation : les débuts de Miyazaki en tant qu’animateur

Né dans le Japon ravagé du début 1941, très jeune Hayao Miyazaki a passé les premières années de sa vie secoué par les horreurs de la Seconde Guerre mondiale, contraint notamment de fuir avec sa famille la ville de Tokyo bombardée par l’armée américaine en 1944. Quelques années plus tard, alors qu’il était sur les bancs de l’école, Miyazaki s’adonne à son passe-temps favori : le dessin. Le petit garçon s’amuse effectivement à reproduire les personnages de son manga-ka préféré, tout en essayant d’améliorer son trait de crayon en dessinant ses propres bandes dessinées. C’est à cette époque que son père, ingénieur aéronautique et amateur de cinéma, l’emmène régulièrement au cinéma pour découvrir les nouveautés.

Et un jour, le choc ! « Le Serpent blanc » (1958), premier long métrage d’animation japonais en couleur, lui apparaît comme une révélation, comme il l’explique en 1979 : « C’est grâce à lui que j’ai choisi de devenir animateur. Depuis quinze ans, j’ai toujours eu un fil conducteur dans mon travail : « Regardez une bonne animation, puis créez quelque chose qui la surpasse. ». C’est dans cette optique que Miyazaki perfectionne sa technique et s’intéresse à la littérature jeunesse, parallèlement à ses études d’économie et de sciences politiques.

Il débute ensuite sa carrière à la Toei Animation en 1963 comme animateur intervalliste, c’est-à-dire responsable des dessins entre deux étapes importantes d’un mouvement. Là, sa vie prend un tournant majeur, alors que Miyazaki rencontre ses futurs collaborateurs, dont Isao Takahata – futur réalisateur de « Pompoko » (1994) ou « Le Tombeau des Lucioles » (1988) – et Akemi Ota, qui deviendra sa femme. Il a également commencé à être politiquement actif en devenant secrétaire en chef du syndicat des travailleurs de la Toei.

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Hayao Miyazaki rencontre Isao Takahata, réalisateur de « Le Tombeau des lucioles », à la Toei Animation en 1963.
© « Le Tombeau des Lucioles »

Dix ans d’expérimentations

S’ensuivent ensuite divers projets à la Toei avec Miyazaki comme animateur, le plus notable d’entre eux étant le long métrage « Horus, Prince du Soleil » (1968), inhabituellement destiné à un public adulte et pour lequel toute l’équipe a voulu insuffler des messages politiques forts. . L’échec du film et les tensions avec la Toei poussent cependant Miyazaki et Takahata à quitter le studio en 1971 pour poursuivre leur carrière à travers le Japon pendant une dizaine d’années.

Tout ne se passe pas tout de suite comme prévu bien sûr, certains projets sont avortés, dont une série sur Fifi Brindacier ce qui a quand même permis au duo de quitter le Japon pour la première fois de leur vie, direction la Suède. De nombreuses séries d’animation ont suivi et ont effectivement vu le jour. Parmi elles, on peut noter la première saison mettant en scène le gentleman cambrioleur « Lupin III » (1971-1972) que Miyazaki a co-réalisé en partie ; « Heidi fille des Alpes » (1974) qui a nécessité un voyage en pour découvrir ce décor exotique auprès du public japonais ; ou encore « Conan, le fils du futur » (1978), seule série entièrement supervisée par le maître et portant ses préoccupations thématiques et politiques comme l’écologie.

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« Lupin III : Le Château de Cagliostro », premier long métrage du maître Hayao Miyazaki
© Film Verleih Groupe Waldner

Un premier long métrage : « Lupin III : Le Château de Cagliostro »

Fort de son expérience acquise sur la série éponyme, Miyazaki se chargera in fine de la réalisation de « Lupin III : Le Château de Cagliostro » (1979), mais prendra également en charge l’écriture du scénario ainsi que toute la création des décors. Avec ces multiples casquettes, l’artiste parvient alors à imposer sa touche et ses propres influences, la plus remarquable étant l’architecture du château empruntée au long métrage français écrit par Jacques Prévert“Le Roi et l’Oiseau”, sorti pour la première fois en 1953, puis achevé par son réalisateur Paul Grimault en 1980.

Le Japonais a gardé cette imagerie en tête tout au long de sa carrière, l’utilisant occasionnellement dans ses œuvres, par exemple pour les armes apocalyptiques de « Nausicaä de la Vallée du Vent » () ou encore pour les robots présents dans « The Château dans le ciel » (1986). Ce film d’animation français a constitué au fil des années une Source d’inspiration fondamentale pour les artistes du monde entier : difficile de ne pas voir un vibrant hommage dans « Le Géant de fer » (1999) de Brad Birdpour n’en citer qu’un.

Miyazaki a donc bouclé la réalisation de son premier long métrage en seulement sept mois, offrant au passage sa propre vision du personnage de Lupin III. Si la série ne jouit pas d’une grande renommée en Occident, elle connaît en revanche un énorme succès au Japon. La réalisation de ce film représente donc pour lui une étape des plus cruciales. L’auteur du manga original, Kazuhiko Katô» a déclaré Monkey Punch, déclaré à propos du projet : “Ils ont appelé Miyazaki pour qu’il soit davantage adapté au public des enfants”. Katô aurait préféré que le réalisateur reste plus proche de l’œuvre originale, plus violente et adulte que du résultat final, qu’il décrit comme ancré dans l’univers de Miyazaki.

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Hayao Miyazaki
© Frenetic Films AG

Un nouveau départ : la création du Studio Ghibli

N’ayant jamais arrêté ses activités manga, Miyazaki a eu l’opportunité de publier une de ses histoires en 1982, « Nausicaä de la vallée du vent », dans le magazine Animage, propriété de la société Tokuma Shoten. Ladite société, familière avec le travail du réalisateur et manga-ka, lui propose de produire un film adapté de sa propre histoire, qu’il réalisera en 1984 au sein du studio Topcraft. Le succès retentissant du long-métrage permet ensuite à Miyazaki et Takahata, resté à ses côtés toutes ces années, de fonder le Studio Ghibli en 1985, emmenant avec eux les membres de l’équipe qui ont travaillé sur Nausicaä.

« Ghibli » est avant tout un mot emprunté à l’arabe libyen pour désigner un vent chaud venu du désert du Sahara, le sirocco. Le choix d’un tel surnom s’explique, poétiquement, par le fait que Miyazaki souhaitait redonner un nouveau souffle au monde de l’animation, alors qu’à cette époque au Japon, il était très majoritairement destiné aux enfants. De manière plus pragmatique, le nom « Ghibli » fait également référence au modèle d’avion de reconnaissance italien « Caproni Ca.309 Ghibli ». Éternel fan d’aviation ou mêmeAntoine de Saint-Exupéryle réalisateur ne manquera pas d’y faire allusion dès qu’il le pourra dans la plupart de ses œuvres, « Porco Rosso » (1992) et « Le Vent de leva » (2013) en tête.

L’histoire suivante est connue de tous. A travers un travail acharné et des films tous plus extraordinaires les uns que les autres, aux orientations artistiques marquées et destinés à tous les publics, le Studio Ghibli voit son rayonnement international grandir de projet en projet. A 83 ans et aujourd’hui réalisateur de douze longs métrages, Hayao Miyazaki s’est imposé comme l’un des artistes les plus importants de l’animation japonaise et mondiale, inspirant de nombreux artistes, qu’ils soient issus du monde du cinéma ou d’autres horizons.

Bande-annonce de “Lupin III : Le Château de Cagliostro”

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