Pour les parents d’enfants TDAH, le combat jusqu’au diagnostic est marqué par « des années de culpabilité »

Pour les parents d’enfants TDAH, le combat jusqu’au diagnostic est marqué par « des années de culpabilité »
Pour les parents d’enfants TDAH, le combat jusqu’au diagnostic est marqué par « des années de culpabilité »
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parmuratdeniz / Getty Images Tant pour les parents que pour leurs enfants, le diagnostic errant du TDAH est vécu comme une souffrance.

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Tant pour les parents que pour leurs enfants, le diagnostic errant du TDAH est vécu comme une souffrance.

TDAH – « Notre fils bougeait constamment et faisait de grosses crises de colère. Alors, à son arrivée dans la section principale de la maternelle, sa maîtresse nous a conseillé de consulter. » Ce que Céline raconte sur le parcours de son fils, aujourd’hui âgé de 10 ans, a été vécu par de nombreux parents dont l’enfant souffre d’un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), entre 3,5 et 5 % des enfants vivant en sont concernés par cette pathologie.

Peu connu du grand public, le TDAH a longtemps eu mauvaise réputation. Tout comme les enfants atteints de ce trouble neurodéveloppemental, à qui les étiquettes de « petits monstres », “bruyant”, “turbulent” ou “mal élevé” étaient souvent réunis. « Ce sont des enfants impulsifs, qui bougent beaucoup, qui ont des problèmes de concentration importants, à qui il faut répéter plusieurs fois les consignes… »confirme Naoual Massaoui, qui exerce comme infirmière dans le programme « Mieux vivre avec le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité » au CHU de Montpellier. « Pour leurs parents, c’est extrêmement fatiguant, ça demande beaucoup d’énergie. »

Un trouble mal compris et mal diagnostiqué

Gérer le TDAH de leur enfant est d’autant plus éprouvant pour eux qu’ils doivent aussi composer avec les regards accusateurs des enseignants et de leurs proches. «Nous avons vécu des années de culpabilité à propos de notre rôle parental»avoue Céline. Bien que sa fille de huit ans ait également reçu un diagnostic de TDAH, c’est le trouble de son fils qui lui a valu le plus de reproches. A l’époque, le petit garçon avait trois ans et venait tout juste de rentrer à l’école maternelle. « On nous a fait comprendre, mon mari et moi, que nous ne savions pas comment gérer notre enfant, que nous ne savions pas comment l’éduquer. Les autres parents nous ont également pris à partie parce qu’il frappait et mordait. »

« Nous nous sentons incompétents et impuissants »dit Amélie. Concernant son premier fils, aujourd’hui âgé de seize ans, elle se souvient qu’aucune solution ne lui avait été proposée à l’époque. « On m’a fait comprendre qu’il était difficile en classe, mais quand j’ai demandé à sa professeure ce que je pouvais faire, je suis restée sans réponse car, pour elle, cela ne constituait pas un trouble. »

La délivrance est venue lorsqu’un pédopsychiatre a identifié que le manque total de production écrite de son fils aîné à l’école n’était pas dû à un manque de motivation. « Pendant six ans, le refus de reconnaître le TDAH de mon fils nous a mis en danger. Avant le diagnostic, je pensais même qu’il n’irait pas jusqu’à la fin de ses études.”lâche la mère. “Nous avons vu un pédopsychiatre à la PMI, deux psychologues qui se disent spécialisés dans les troubles neurodéveloppementaux et qui ont complètement raté l’essentiel”explique Céline en détail pour raconter cette errance diagnostique.

« Pendant longtemps, le TDAH est resté sous-diagnostiqué car mal compris par les professionnels de santé »explique le Dr Julie Majorel, pédopsychiatre et coordinatrice du programme « Mieux vivre avec le TDAH » au CHU de Montpellier. Ces dernières années, le médecin a néanmoins constaté des améliorations dans la prise en charge grâce notamment à « aux derniers plans de santé du gouvernement sur les troubles neurodéveloppementaux ». Les dernières recommandations émises par la HAS en septembre attestent également d’une meilleure reconnaissance de ce trouble.

De faux ennuis et « mauvais parents »

Cela n’empêche toutefois pas les idées préconçues sur le TDAH de persister dans le débat public. Et les détracteurs de ce désordre ont trouvé une porte-parole de choix en la personne de Caroline Goldman. Dans ses livres comme dans la chronique sur laquelle elle écrivait France Inter l’année dernière, le psychologue pour enfants médiatique est allé à l’encontre de la littérature scientifique en affirmant que le TDAH serait un mot “fourre-tout” utilisé par les parents pour justifier le comportement perturbateur de leur enfant, mais aussi « une invention des laboratoires pharmaceutiques » pour vendre un traitement médicamenteux, le Méthylphénidate.

Céline, qui a consulté un premier psychologue « pro-Caroline Goldman » quand son fils avait cinq ans, témoigne des résultats “catastrophique” de cette approche. « Elle nous a dit qu’on ne savait pas poser de limites, qu’il fallait être plus sévère en l’isolant dans sa chambre à la moindre inconduite. Nous avons vécu l’enfer”détaille la mère, qui a également été confrontée à ce type de discours dans son entourage familial. « Mes parents ont eu des paroles très dures sur la façon dont nous élevions nos enfants. » Pour éviter de se sentir jugée, elle a préféré couper les ponts avec eux il y a deux ans. « On fait du mieux qu’on peut, on a à cœur de les élever avec des valeurs et ce n’est pas en culpabilisant qu’on réussira mieux. »

« Avec le traitement, on nous a laissés seuls »

Pour ces deux familles, le diagnostic et ce qu’il implique (reconnaissance de la maladie au centre départemental des personnes handicapées, aménagement en classe et traitement médicamenteux) a été vécu comme un véritable soulagement. “Cela a permis d’expliquer son comportement, de normaliser les relations avec les professeurs”dit Amélie. ” Avec le traitement, nous sommes restés seuls, nous avons enfin été considérés comme de bons parents. » adds Céline.

Les soins ont également sauvé la vie des enfants. “Mon fils dit qu’avant le diagnostic, il n’avait pas de souvenirs heureux”» souffle Amélie, tandis que Céline soutient que la sienne a aussi « énormément souffert » des conséquences de son TDAH. « C’est ce qui nous a donné envie de nous battre en tant que parents. » Pour aider d’autres familles comme elles, les deux mamans sont désormais bénévoles au sein de l’association HyperSupers, qui milite pour un meilleur accès aux soins pour les enfants TDAH et propose des espaces de rencontres entre parents.

Ces derniers peuvent également échanger au sein de structures spécialisées, comme le programme développé au sein du CHU de Montpellier. Comme le souligne Naoual Massaoui, ce partage d’expériences est non seulement crucial pour les sortir de leur isolement, mais également bénéfique pour le partage de bonnes pratiques. Ce que confirme Céline. « Pendant longtemps, nous avons eu l’impression que seul notre enfant avait un problème et que nous étions les seuls parents à ne pas savoir comment le gérer. Retrouver d’autres familles comme la nôtre a été un vrai réconfort. »

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