Bertrand de Wolf, le bègue belge en prestation à Nancy

Bertrand de Wolf, le bègue belge en prestation à Nancy
Bertrand de Wolf, le bègue belge en prestation à Nancy

La Journée mondiale du bégaiement est répétée chaque automne depuis 27 ans. Vendredi 18 octobre, l’antenne lorraine de l’association « Parole bégaiement », présidée par l’orthophoniste nancéienne Catherine Daubié, reviendra en action pour rappeler que le bégaiement n’est pas qu’une plaisanterie, un sujet de ridicule, un ralentissement. Elle a invité pour l’occasion l’artiste belge Bertrand de Wolf.

Le comédien animera un atelier d’improvisation théâtrale à Malzéville avant de se produire dans une pièce fluide, drôle, sarcastique et didactique. En deux actes, Bertrand de Wolf racontera sur la scène de la Douëra, les aventures d’un ballade bègue. « Mots – Les vicissitudes d’un acteur bègue » est l’histoire d’une vie, la sienne, mais aussi de toutes celles que l’expression hachurée a tourmentées, fragmentées, assignées au silence. Si l’on aime en rire par paresse intellectuelle, le bégaiement reste un fardeau à porter tout au long de notre existence dans un monde où la performance, l’élocution et l’éloquence sont portées aux nues. Le fond n’a pas d’importance tant que la forme provoque l’ivresse.

Un bègue masqué

A l’inverse, le bègue est moqué pour ses hésitations, pour ses silences et son incapacité à s’exprimer clairement. Ce poids des autres, des codes et des conventions, la souffrance silencieuse qu’il provoque, Bertrand de Wolf le décrit avec acuité dans son panorama d’un bègue confronté dès l’enfance à l’incompréhension et au rejet. À propos de vous-même d’abord : « J’ai longtemps été un bègue masqué, comme dans le déni. Alors que je bégayais très très fort », confie celui qui, paradoxalement, a suivi le parcours de la prise de parole en public dans une école de théâtre de Louvain-la-Neuve : « Quand j’étais plus jeune, je ne me voyais pas comme un bègue. C’est très étrange. Comme si je niais le problème. En fait, en développant des stratégies pour masquer mon bégaiement, j’ai fini par croire que je n’étais pas un bègue. » Sauf que ces astuces pour se cacher des autres coûtent cher : « Cela représente des efforts incommensurables. »

Un bazar intérieur

Dans ses sketchs, Bertrand de Wolf, qui a un temps étudié pour devenir orthophoniste, l’équivalent de l’orthophoniste en Belgique, explique avec une précision presque clinique ce qui se passe en lui lorsqu’il parle, ces chocs qui le secouent parfois : « Je partager avec le public cette tragi-comédie qui bégaie. Ces quelques secondes où la parole est bloquée et ne sort pas. » Un gâchis interne : « Il y a les muscles de la langue et de la mâchoire qui râlent, qui viennent montrer que ce n’est pas possible. Les cordes vocales se ferment. » Dans son one-in-scene, Bertrand de Wolf montre ce conflit entre désir et résistance organique. Son bégaiement s’atténue sur scène, mais ne disparaît pas. A 57 ans, il se dit désormais « expert en synonymes » et en « art de se taire ».

Ouvert aux bègues de plus de 15 ans sur inscription, l’atelier que le comédien animera en préambule de son spectacle portera sur cette alternative à la parole. Lui-même président de la branche belge de « Parole bégaiement », Bertrand de Wolf aborde son sujet par la gestuelle. « Aux yeux de la plupart des gens, le caractère bègue réside dans une seule action, celle du bégaiement, poursuit-il. Le bégaiement obscurcit l’individu. L’interlocuteur assiste au spectacle du chaos. Dans mes ateliers, je travaille donc l’expression en général. J’aime que les gens s’engagent avec le corps, les yeux, la voix… La parole est le dernier segment de la communication. Cela affinera la communication. Autrement, hormis au téléphone, nous n’avons pas besoin de la parole pour communiquer. » Bref, regardons nous-mêmes. Laissez-nous nous percevoir. « N’oublions pas que dans une rencontre amoureuse, les premiers instants se passent dans le silence. » Méditer.

Atelier d’improvisation théâtrale à la Douëra de Malzéville réservé aux bègues de plus de 15 ans, vendredi 18 octobre, de 14h à 18h, animé par le comédien Bertrand de Wolf. Elle sera suivie, à 20h30, du spectacle « Mots – Les vicissitudes d’un acteur bègue ». Inscriptions et réservations : 06 83 05 72 46.

 
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