Première cartographie complète du cerveau de la drosophile

⇧ [VIDÉO] Vous pourriez également aimer ce contenu partenaire

La première cartographie complète des neurones et des connexions synaptiques de la mouche du vinaigre a été récemment achevée. Cet exploit monumental est l’œuvre du Flywire Consortium, une collaboration internationale. Ce connectome constitue une avancée majeure dans le domaine des neurosciences et permettra sans doute de mieux comprendre le cerveau humain.

Les traitements des maladies neurodégénératives comme la démence (dont Alzheimer) ou la maladie de Parkinson restent quelque peu expérimentaux et manquent d’efficacité. La complexité du cerveau humain et la méconnaissance des circuits qui le composent rendent difficile le développement de traitements ciblés. ” Pour comprendre comment le cerveau génère des perceptions, des pensées et des actions, il est crucial de comprendre comment les informations transitent des récepteurs sensoriels jusqu’aux sorties motrices. », déclare le Dr Mala Murthy, co-responsable du projet Flywire à l’Université de Princeton.

Des recherches antérieures avaient partiellement cartographié le cerveau d’une larve de mouche des fruits, comprenant 3 016 neurones, ainsi que celui d’un ver nématode, avec 302 neurones. Une carte partielle du cerveau d’une souris avait également été publiée. Cependant, ce nouveau connectome complet de mouche vinaigrée (ou drosophile), réalisé dans le cadre du projet Flywire, est le premier à détailler l’intégralité du cerveau adulte de l’insecte. Les scientifiques ont identifié la position, la forme et les connexions des 139 255 neurones du cerveau du Drosophile melanogasterainsi que les 50 millions de synapses qui les relient.

Cette prouesse a nécessité dix années de travail aux chercheurs du Flywire Consortium, du laboratoire de biologie moléculaire du Medical Research Council (MRC), de l’université de Princeton, de l’université du Vermont et de l’université de Cambridge. Le choix s’est porté sur la drosophile adulte en raison de son importance en neurosciences. Cette mouche, capable de marcher et de voler, démontre également des comportements complexes tels que l’apprentissage et une bonne mémoire. Les mâles peuvent même « chanter » pour attirer les femelles.

« Pourquoi s’intéresser au cerveau d’une mouche du vinaigre ? », demande Sebastian Seung, professeur d’informatique et de neurosciences à l’université de Princeton et co-responsable du projet Flywire, dans un communiqué. ” Si nous parvenons à comprendre un cerveau, cela nous apprendra nécessairement quelque chose sur tous les cerveaux. ».

Un processus minutieux et complexe

Pour établir le connectome, les chercheurs ont commencé à découper le cerveau d’une mouche des fruits, pas plus gros qu’une graine de pavot, en 7 000 sections. Chaque section a été photographiée à l’aide d’un microscope à haute résolution, capturant des structures d’une épaisseur minimale de 40 nanomètres. Les images résultantes ont ensuite été assemblées pour former une représentation tridimensionnelle du cerveau.

Analyser près de 100 téraoctets de données d’images pour retracer le parcours de 139 255 neurones et de leurs 50 millions de connexions synaptiques constitue un processus complexe. Les chercheurs ont donc eu recours à l’intelligence artificielle. Gregory Jefferis, du laboratoire de biologie moléculaire de Cambridge, explique : « Nous avons commencé par identifier manuellement les neurones, mais cela aurait nécessité plus de 4 000 ans de travail humain. ».

Cependant, les modèles d’IA, bien que formés sur la base du travail des scientifiques, ont commis des erreurs dans la reconstruction des neurones, nécessitant une intervention manuelle pour les corriger. L’équipe a ensuite ouvert les données à la communauté scientifique, permettant aux chercheurs et bénévoles de collaborer (depuis 2019) pour relire et annoter les résultats des modèles d’IA.

Une fois le connectome terminé, les scientifiques ont pu étiqueter les différents types de neurones et de connexions synaptiques, classant ainsi plus de 8 400 types de cellules différents. “
Cet ensemble de données est comme Google Maps, mais pour un cerveau : le schéma de câblage entre les neurones révèle quelles structures dans les images satellite de la Terre correspondent aux rues et aux bâtiments. », explique le Dr Philipp Schlegel du laboratoire MRC. Cette nouvelle carte est mise à disposition de la communauté scientifique mondiale pour toute recherche future.

Voir aussi

type="image/webp">>

type="image/webp">connectome de la mouche des fruits>

Les chercheurs ont classé plus de 8 400 types de cellules différents. © Tyler Sloan pour FlyWire, Université de Princeton

Le schéma cérébral réalisé a également permis aux chercheurs de faire des découvertes prometteuses. Ils ont par exemple identifié des neurones qui combinent différents types d’informations et d’autres, appelés diffuseurs, qui coordonnent l’activité des circuits neuronaux. Les neurones impliqués dans le mouvement sont situés à la base du cerveau, tandis que ceux qui traitent la vision sont situés latéralement. L’utilisation de l’IA a également permis de mieux comprendre le rôle des neurotransmetteurs dans l’amplification ou l’inhibition des messages neuronaux. Les détails du projet Flywire ont été publiés dans neuf articles de la revue Nature.

type="image/webp">cellules cérébrales des circuits auditifs de la mouche des fruits>

type="image/webp">cellules cérébrales des circuits auditifs de la mouche des fruits>

Image montrant les cellules cérébrales des circuits auditifs de la mouche du vinaigre, cartographiées et annotées par FlyWire. © Université de Princeton

Selon les chercheurs, le connectome de la drosophile servira de tremplin pour cartographier des cerveaux plus complexes, notamment le cerveau humain, avec ses 86 milliards de neurones et ses cent mille milliards de synapses.

À ce jour, seul un millimètre cube du cerveau humain a été cartographié. La prochaine étape pour le Consortium Flywire est la cartographie complète du cerveau de la souris, un projet en cours qui devrait être achevé d’ici cinq à dix ans. ” La tâche reste titanesque pour décrypter le fonctionnement du cerveau », conclut John Ngai, directeur de la Brain Initiative aux National Institutes of Health des États-Unis.

Source : Nature
 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Un enfant meurt de la rage, une chauve-souris trouvée dans sa chambre
NEXT Transpirez-vous beaucoup ? Vous avez probablement la peau sensible