découvrez le pays à travers la musicalité et la saveur du mot

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SIMOHAMED DRISSI POUR LE PORTRAIT DE L’AUTEUR

Mots arabes « chûkran ! » », “grippe” ou “mechwi” ça te rappelle quelque chose ? Les deux premiers ont la traduction merci et argent. Quant au troisième, il désigne le mouton rôti des fêtes qui, abrégé en “Chwa” moyens au sens figuré, pour intimider, malmener ou même causer une douleur intense. Alors on dit : « Chwa li qalbi, il m’a brisé le cœur. »

Ces différentes explications se retrouvent dans 80 mots du Maroc, ouvrage récemment publié par la journaliste et essayiste Kenza Sefrioui. Les amateurs de langues et de culture seront ravis de trouver, derrière une œuvre en apparence modeste, une œuvre d’une grande richesse et une véritable invitation littéraire à la découverte du Maroc.

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L’une des difficultés majeures rencontrées par l’auteur lors de l’élaboration de l’ouvrage a été de faire les choix nécessaires à chaque étape. D’abord celui de la langue – l’arabe ou l’amazigh, les deux langues officielles du pays. « L’aperçu du Maroc proposé dans ce livre est en arabe marocain que je vous le propose. Non pas pour exclure ou minimiser les autres langues, notamment les langues amazighes, mais parce que le darija est finalement le dénominateur commun de la majorité des Marocains. (…) “, décide-t-elle, après avoir dressé un inventaire historico-linguistique du pays.

Deuxième difficulté et non des moindres : la sélection même des mots. 80 seulement selon le principe de la collecte, qui nécessite un tri d’autant plus important que la langue arabe en compte plus de 12 000. Un coup d’œil à la table des matières de l’ouvrage ainsi qu’aux autres éléments du paratexte – préface de la linguiste Zakia Iraqui Sinaceur, page dédiée à la transcription, guide de prononciation – permet de comprendre le principe général qui a guidé l’auteur. À savoir un savant mélange entre une approche scientifique et l’ivresse d’un récit subjectif.

Passion pour la langue arabe

L’érudition du sujet est bel et bien là. On le comprend dès l’introduction du livre, lorsque Kenza Sefrioui raconte comment sa passion pour la langue arabe l’a poussée en 2005, alors qu’elle était critique littéraire à Journal hebdomadaire, créer une section intitulée « L’essence des mots » dédié à Darija.

Cet espace “autorisé [s]attardez-vous chaque semaine sur un mot, souvent lié à l’actualité ou aux discussions du jour. A cette époque, dans le sillage du festival Boulevard des Jeunes Musiciens, les musiques urbaines, le rap, le slam et même le cinéma renouvellent la création à Darija.

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Ces connotations lexicales se retrouveront dans 80 mots du Maroc où chaque fin d’article est agrémentée de citations, titres de chansons et autres clins d’œil à la création artistique. Mais la référence scientifique incontournable – indispensable ? – sur lequel s’appuie l’auteur est le monumental Dictionnaire Colin de l’arabe dialectal marocain, ouvrage en huit volumes développé par Georges Séraphin Colin, fonctionnaire français arrivé au Maroc en 1921.

Diplômé de Langues Orientales à Paris, Colin parlait arabe et « s’intéressait à tous les domaines lexicaux : musique, architecture, noms de plantes et d’animaux, arts culinaires, coutumes, pratiques religieuses, médecine, magie. Chez ses informateurs, des gens de tous horizons, il glanait des mots, des proverbes, des expressions idiomatiques, des métaphores. explique Kenza Sefrioui.

Une promenade culturelle et littéraire

Les 60 000 cartes Bristol qu’il a écrites avant sa mort en 1977 fournissent le contenu de son dictionnaire et « constituent une photographie de la civilisation marocaine au XXee siècle “. Publié en 1993, l’ouvrage devient introuvable au début des années 2000. Kenza Sefrioui plaide pour sa réédition et estime son 80 mots du Maroc en véritable hommage à Colin, « une réécriture, dans le but de le faire redécouvrir », souligne-t-elle modestement.

Il serait cependant insuffisant de réduire les choix de l’auteur à un hommage. Car au-delà de ce socle référentiel, son livre peut être apprécié pour ce qu’il est : une promenade culturelle et littéraire au Maroc à travers 80 mots clés choisis pour la pluralité de leurs sens, leur dimension patrimoniale, mais aussi les résonances qu’ils peuvent avoir dans différents domaines. . Un exemple parmi d’autres : le terme Nouba, devenir en anglais La Nouba.

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« C’est la forme centrale de l’al-Âla, la musique andalouse, qui remonte au VIIee siècle, nous apprenons. Au XVIIIe sièclee siècle, il y en avait vingt-quatre, un pour chaque heure de la journée. C’était la musique jouée à chaque relève de la garde. Le corpus marocain a alors été réduit à onze (…) » Nouba, évoluera vers « Alternativement », alors deviendra « celui à qui c’est le tour, lli fîh ennûba, à qui il revient d’agir » avant de passer à l’idée de délégation de pouvoir…

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Structuré en sept chapitres thématiques, l’ouvrage fait voyager le lecteur avec fluidité entre les éléments de notre environnement terrestre (la mer, l’étoile, la pluie, etc.), les êtres que nous sommes, traversés d’émotions ou amenés à vivre des relations sociales (conversation , politesse), y compris les questions monétaires, commerciales, professionnelles, qui sont également abordées, ainsi que le monde des arts ou encore le très attendu pour le Maroc de la cuisine et des saveurs culinaires. .

A chaque page de ce répertoire qui se lit comme un roman, Kenza Sefrioui relève avec brio le défi de nous faire découvrir son pays à travers la musicalité et la saveur de ses paroles. Le Maroc sur le bout de la langue.

80 mots du Maroc, de Kenza Sefrioui (éd. L’Asiathèque, 208 pages, 16,50 euros).

Kidi Bebey

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