Juliette Binoche se confie sur les « blessures » et les pressions qu’elle a subies à ses débuts

Juliette Binoche se confie sur les « blessures » et les pressions qu’elle a subies à ses débuts
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Dans une interview à « Libération », Juliette Binoche revient sur les violences qu’elle a subies au début de sa carrière.

Une époque où elle ne lisait pas « un scénario sans scène nue » et où il fallait obéir sans broncher aux exigences des cinéastes.

Des « blessures » qui « provoquent la rage, la révolte » et qui lui ont appris à se fixer des limites au fil des années.

Elle est l’une des plus grandes actrices de sa génération. Dans un long témoignage publié samedi 27 avril par Libérer, Juliette Binoche, 60 ans, raconte pour la première fois les pressions et les agressions sexuelles dont elle dit avoir été victime au début de sa carrière. Un discours qui intervient alors que le cinéma français semble enfin faire son MeToo suite aux accusations de Judith Godrèche contre Benoît Jacquot et Jacques Doillon.

Fille d’acteurs, elle raconte avoir pris un café avec un célèbre agent lorsqu’elle était encore au lycée. “Il m’a proposé de venir à son cabinet pour lui apporter une photo de moi nue, détail qui m’avait gêné, au cas où elle serait prise en Randonnée mortelle, par Claude Miller. Elle ne sera pas fiancée, mais le ton est donné.

Son premier réalisateur l’embrasse par surprise

En 1983, Juliette Binoche tourne son premier film pendant deux jours. Le réalisateur l’invite « dîner à l’hôtel dans les hauteurs d’une tour pour me parler d’un autre projet. Pendant qu’il me montre la vue sur la Seine, il se jette sur moi pour m’embrasser […] J’ai eu quelques signes de méfiance après avoir été touché par un professeur des écoles à 7 ans […] Le choc a été de réaliser que ce réalisateur utilisait aussi un stratagème et ma bonne foi pour parvenir à ses fins..

L’année suivante, la jeune actrice enchaîne avec La vie de famille de Jacques Doillon, un réalisateur contre lequel Judith Godrèche a récemment porté plainte. “Sur place, tout de suite, j’ai dû enlever ma robe t-shirt dans la première scène en criant […] Rétrospectivement, certaines répliques que m’a adressées Sami Frey, qui incarne mon beau-père, me font froid dans le dos. : « Ta mère veut que je t’aime. Elle rêve que nous fassions l’amour ensemble. Alors je t’aimerai. Je ne suis pas sûr d’avoir compris ces lignes à l’époque.

Froid, nudité, humilité. Et parfois de l’humiliation. J’ai tout accepté avec enthousiasme

Juliette Binoche dans « Libération »

De cette période justement, Juliette Binoche se souvient qu’il y avait «pas de scénario sans scène de nu. C’était difficile. J’ai appris à sauter, comme on plonge dans une mer froide, la tête la première. J’ai vu arriver avec effroi la date des scènes de nu sur le plan de travail : plus qu’une semaine, plus que deux jours. L’anxiété est montée comme le courage« .

Une confiance aveugle qui n’a aucune conséquence. Sur un plateau, » une main, alors que nous nous tournions, vint soudain toucher mon sexe. Personne ne m’avait prévenu, encore moins demandé mon accord. J’étais abasourdi. Mais je n’ai pas pu le dire […] Il m’a fallu beaucoup de temps pour comprendre que je pouvais exiger, lorsque les scènes l’exigeaient, un décor fermé. Ou remettre en question une scène de nu dans un scénario que je n’ai pas trouvé nécessaire

Essais surréalistes avec Godard

Parfois, des dérapages surviennent hors du plateau. Lors du tournage de son premier grand film international, le réalisateur «est venu dans ma caravane pour me peloter“, elle se souviens. “Je l’ai repoussé, il n’a pas insisté. Lena Olin, qui jouait l’autre rôle féminin, m’a dit qu’elle avait fait les mêmes tentatives

Lors de cet entretien, Juliette Binoche raconte des essais avec un réalisateur qui lui a demandé de «courir nu autour d’une table en lisant un poème tout en me peignant les cheveux pendant qu’il filme« . Ou le jour où une amie actrice l’a invité à un tournage et l’a découverte avec «son partenaire de jeu, la tête entre les jambes. Elle était nue sans aucune protection […] Je suis parti vite, vaincu

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Lauréate des César, des Oscars, de Cannes ou encore de Venise, l’actrice souligne que «toutes ces blessures provoquent une rage, une révolte. Mais aucune envie d’arrêter. Les coups bas, les gestes déplacés, les propos sexistes : je ne les oublie pas, ils empoisonnent la vie, mais ils restent secondaires. Au fond tout se transforme, tout m’a sculpté. L’envie de se donner par le jeu reste plus forte

Ce qui ne l’empêche pas de saluer la prise de parole de ses confrères, dans le sillage du mouvement MeToo , né aux Etats-Unis à la suite de l’affaire Weinstein, en 2017.Je suis soulagé de voir et d’entendre les témoignages d’hommes et de femmes qui osent dénoncer les abus qu’ils ont subis.», insiste-t-elle. “Ce n’est pas facile d’exposer sa vie privée et nous devrions tous les remercier.


Jérôme VERMELIN

 
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