Pierre-Karl Péladeau se mouille les pieds

Pierre Karl Péladeau, le patron numéro un, pour ne pas dire le « grand patron » du paysage médiatique québécois, s’est retrouvé dans une position délicate après des déclarations qui ont fait grincer des dents.

Avec un ton de confiance presque excessif, il proclame aujourd’hui le succès fulgurant du Groupe TVAmontrant des statistiques impressionnantes sur la portée de sa chaîne.

« Toujours au sommet cet hiver : 6 millions de Québécois sont rejoints chaque semaine, soit 78 % d’entre eux. Les chaînes du groupe détiennent 41 parts de marché, soit plus du double des parts de ses deux concurrents.»

Il y a quelque chose de louche. Pourquoi, malgré les figures brillantes qu’il brandit, la vérité reste-t-elle implacable et impitoyable ?

On pensait que Groupe TVA traversait une période de turbulences financières majeures. Les licenciements massifs qui ont précédé ses déclarations triomphales ont mis en lumière une vérité bien moins glorieuse.

Se vanter aujourd’hui alors que vous venez de licencier plus de 31 % de vos effectifs est interrogateur, pour ne pas dire ridicule et frustrant.

547 salariés se sont retrouvés au chômage il y a quelques mois, traduisant une crise profonde au sein de l’entreprise.

Nous parlons de plus de 500 pères et mères de famille qui ont du mal à mettre du pain sur la table en ce moment même.

Depuis l’an dernier, on parle de près d’un millier d’employés licenciés à TVA.

Les propos de Péladeau semblent presque déconnectés de cette amère réalité. Aujourd’hui, il se vante, mais hier il pointait du doigt l’évolution rapide du paysage médiatique, attribuant notamment à l’émergence des plateformes de streaming comme Netflix et Disney+ les difficultés rencontrées par les médias traditionnels.

« La réalité est clairement difficile. Les chiffres cumulés des derniers mois le confirment. La situation déficitaire dans laquelle se trouve le Groupe TVA n’est pas viable.» » a déclaré Péladeau pour expliquer les licenciements.

« Dans ce contexte, Groupe TVA n’a d’autre choix que de prendre des décisions difficiles pour assurer son avenir et sa pérennité »

Cette analyse, bien que partiellement vraie, n’a toutefois pas effacé les questions soulevées par les décisions de gestion prises au sein du Groupe TVA.

Les licenciements annoncés, conjugués à la fin des productions de divertissement internes et aux déménagements majeurs, ont semé l’incertitude et la tristesse parmi les salariés du secteur.

Tous ces licenciements avaient une certaine odeur. On sentait la fin d’une époque pour la télévision traditionnelle et le début de la fin pour TVA.

Il nous semble que proclamer aujourd’hui le succès de TVA est pour le moins étrange. Péladeau est-il confus ? A-t-il oublié tous les licenciements de l’année dernière ?

Pierre Karl Péladeau a certainement réclamé une révision des règles régissant les médias, réclamant une plus grande équité entre les diffuseurs traditionnels et les géants du numérique.

« Les chaînes généralistes canadiennes sont réglementées et paient pour tout, tandis que les plateformes mondialisées font ce qu’elles veulent et ne paient rien du tout »

Cependant, ses appels à l’aide du gouvernement ont suscité une certaine suspicion, certains pointant du doigt les choix passés de la direction du Groupe TVA comme faisant partie du problème.

Dans ce contexte, les discours des autorités politiques ont oscillé entre la reconnaissance des défis auxquels sont confrontés les médias traditionnels et la nécessité de repenser les mécanismes de soutien à l’industrie.

Mais aujourd’hui, à entendre Péladeau se vanter, il ne faut pas que le gouvernement veuille l’aider davantage. Pourquoi aider un homme qui gagne autant d’argent et qui se gonfle la poitrine à ce sujet ?

La crise du Groupe TVA a ainsi révélé de profondes fissures entre ce que dit Péladeau un jour et le contraire qu’il dit le lendemain.

Nous sommes donc perdus. TVA va bien ou est-ce que ça va mal ? Péladeau veut l’aide du gouvernement, mais se vante d’être le numéro un dans le secteur des médias ?

Voilà un cruel rappel que les titans de l’industrie ne sont pas transparents dans ce phénomène appelé « crise des médias ».

Si nous étions le gouvernement, nous y réfléchirions à deux fois avant de donner de l’argent au Groupe TVA.

Le ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe, doit se sentir floué.

«Clairement, nous devons avoir une discussion»

« J’ai reçu plusieurs demandes du Groupe TVA visant une augmentation des crédits d’impôt sur la masse salariale des médias.» a reconnu le ministre.

Imaginez son visage aujourd’hui lorsqu’il a entendu Péladeau gonfler son torse et se comporter en beauté. A la place du ministre, on voudrait tout détruire….

 
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