Au CHU de Toulouse, l’attente longue et incompréhensible des futurs greffés rénaux

Au CHU de Toulouse, l’attente longue et incompréhensible des futurs greffés rénaux
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l’essentiel
Faute de créneaux opératoires, de nombreux patients doivent attendre avant de recevoir une greffe de rein, même s’ils ont trouvé un donneur proche de chez eux. Le CHU de Toulouse, meilleur centre de France en 2023, pourrait voir son activité chuter entre 18 % et 30 % en 2024.

Manque de médecins, de soignants, de moyens, de logistique, l’hôpital souffre. Partout. De nombreuses activités peinent à retrouver leur niveau d’avant Covid-19, impactant fortement les patients. Le mois dernier, dans une tribune publiée par le journal Le Parisien, des organisations de médecins et de patients alertaient sur la situation de l’activité de transplantation, « vitale mais en danger » aujourd’hui en France.

En cause, l’accès difficile aux salles d’opération, y compris pour les greffes de rein provenant de donneurs vivants, plus faciles à programmer qu’une greffe de rein provenant d’un donneur décédé. En 2023, le Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Toulouse a ainsi réalisé 74 greffes de rein à partir d’un donneur vivant sur les 201 greffes de rein totales, ce qui en fait le premier centre de France, bien au-dessus de la moyenne française (37 % de greffes avec donneur vivant contre 16 % au niveau national).

Meilleure qualité de vie et économies pour la société

« C’est un de nos leviers pour réduire les délais d’attente pour une greffe de rein, qui se situent entre 3 et 7 ans selon les patients. A Toulouse, nous en avons 1 300 sur notre liste d’attente. La greffe de rein permet une meilleure qualité de vie des patients et une économie importante par rapport à la dialyse qui coûte 80 000 € par patient chaque année », souligne le professeur Nassim Kamar, coordinateur du service de néphrologie et de transplantation d’organes au CHU de Toulouse.

« Les incitations financières sont conséquentes pour soutenir l’activité de transplantation qui, tous organes confondus, a rapporté 4,150 millions d’euros en 2023 au CHU de Toulouse sur la base de l’activité 2022. Si le CHU de Toulouse a réussi à atteindre ces 37% de greffes avec donneurs vivants, c’est parce que tous les néphrologues de Midi-Pyrénées sont impliqués, que des consultations avancées ont lieu dans 7 hôpitaux périphériques, que notre équipe de coordination est extraordinaire et que le Les urologues du CHU ont beaucoup investi dans l’innovation», ajoute le spécialiste.

« Toulouse pourrait être numéro 1 en Europe !

Sauf que les bons chiffres de 2023 marquent un coup d’arrêt et le professeur Nassim Kamar n’hésite pas à le dénoncer, comme ses confrères de la Société francophone de transplantation (SFT) dont il est membre du conseil d’administration. Tous réclament la protection du temps opératoire dédié à l’activité de transplantation à partir de donneurs vivants. « En raison du manque d’infirmières de bloc opératoire, d’infirmières anesthésistes, d’anesthésiologistes, le temps opératoire des chirurgiens urologues (qui effectuent l’activité de transplantation rénale) est réduit et il n’y a pas de priorisation pour les greffes de reins provenant de donneurs vivants. Pour moi, c’est un manque de volonté politique institutionnelle. Il faut mettre tout le monde autour d’une table et voir quelle spécialité peut donner du temps. La transplantation ne doit pas être en concurrence avec les prothèses de genou, la cataracte ou toutes les activités que le patient peut trouver ailleurs ! La transplantation est notre monopole, nous devons l’assumer à 100%. Sur les 48 000 interventions par an au CHU de Toulouse, si l’on y consacre 40 à 50 dates – en plus des 40 déjà inscrites au planning des urologues – c’est vraiment epsilon. Parce que nous avons ce qu’il faut pour être le centre leader en Europe», affirme le professeur Nassim Kamar.

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« Les patients dont le dossier est prêt devront peut-être attendre un an et aller en dialyse »

Avec son calendrier devant lui, il ne s’emporte pas. « Pour les six premiers mois de 2024, j’ai 24 dates. Au mieux, on fera 50 greffes en 2024 mais j’ai 80 dossiers en cours au 21 mars… Les patients qui ont un donneur, qui sont prêts, devront attendre un an, peut-être en dialyse, soit 156 séances de 4 heures. Les associations sont folles de rage et elles ont raison. La greffe à partir de donneurs vivants est en dehors de tout ce que l’on connaît en médecine, on est dans des liens intimes. Que dire à toutes ces familles stoppées dans leur élan de générosité ? Les maladies rénales chroniques augmenteront avec le vieillissement, l’hypertension artérielle, le diabète et l’excès de poids. Et notre liste d’attente aussi », conclut le spécialiste.

 
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