Entre compétitions de sosies et démonstrations de voltige, quand l’Open d’Australie se transforme en parc d’attractions pour attirer son public

Quand le public vient à l’Open d’Australie, ce n’est pas seulement pour voir du tennis. Dans le parc de Melbourne, tout est fait pour que les spectateurs se divertissent. L’Open d’Australie, surnommé leL’été australien ou le Joyeux Chelemn’a pas ces surnoms par hasard. Au-delà des nombreux bars et restaurants implantés aux quatre coins de l’enceinte sportive, plusieurs activités se succèdent.

Un peu partout entre les courts, il y a des espaces où l’on peut pratiquer le tennis de table ou le turnball (sport de raquette). Une zone, appelée Topcourt, situé à l’extrémité ouest du stade, est même entièrement dédié à ces « fan expériences ». Sans grand lien avec le tennis, on trouve aussi des stands avec les dernières tendances mode et beauté ou encore des DJ sets dans les allées. Ici, les terrains de padel et de mini-basket ne désemplissent pas. Conférences sur le tennis, tutoriels de danse et concours de sosies battent leur plein, tandis qu’une démonstration d’acrobatie ravit les spectateurs présents à l’ouverture des portes vendredi 17 janvier.

Un court de padel a été installé dans la zone Topcourt de l’Open d’Australie. Dans ce domaine, d’autres activités ludiques et sportives sont proposées. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

« Tout est fait pour les familles, avec un côté ludique et festif. Sans toutes ces activités, il y aurait beaucoup moins de monde. » assure Luc, un habitué du tournoi, entre deux échanges avec sa fille au tennis de table. Amber, habitante de Geelong, la deuxième plus grande ville de l’État de Victoria après Melbourne et également habituée du tournoi, vient pour la première fois avec ses jumeaux, profondément endormis dans la poussette. « J’aime l’ambiance ici, et avec les enfants, il y a plein de choses à faire pour passer la journée. Parce que vous ne pouvez pas les emmener au tribunal toute la journée. » avoue cette jeune maman, qui passera plus de temps ici qu’à regarder les matchs.

Chaque jour, sur l’une des places centrales du site, plusieurs artistes se relaient sur une petite scène installée à proximité d’un écran géant, de quelques poufs colorés et de tables hautes. Les groupes alternent entre des mélodies douces le matin et des rythmes plus festifs en fin de journée. “Une brochette d’étoiles”, majoritairement australien, se produit également certains soirs sur la Rod Laver Arena, avant le séance de nuitafin d’offrir « encore plus de valeur ajoutée pour les fans », communiquent fièrement les organisateurs. “La programmation d’avant-match de cette année à la Rod Laver Arena est la plus importante jamais organisée et apportera encore plus d’excitation, d’atmosphère et de divertissement à l’AO”, s’est réjoui Craig Tiley, directeur du tournoi.

Open d’Australie
Chaque jour, des artistes se relaient et proposent une offre musicale du matin au soir, sur l’une des grandes places du site.
(APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Pour ceux qui veulent mélanger les plaisirs, le court numéro 6 est doté depuis l’année dernière d’un bar attenant, avec une vue imprenable sur le court. Sous les parasols, les canapés rayés blancs et bleu ciel, situés juste derrière la balustrade du court, ont été pris d’assaut par les spectateurs, venus assister au match entre la Française Varvara Gracheva et l’Allemande Eva Lys, jeudi 16 janvier.

Cocktails et bières à la main, ces spectateurs sont encore plus proches du terrain que le public assis dans les tribunes, juste en face. Si les premiers rangs sont attentifs, les consommateurs situés plus en retrait et à l’étage sont moins disciplinés. Le brouhaha est incessant, quand les tribunes n’exultent qu’à la fin d’un point. En plein match, une odeur de grillades envahit le court, tandis qu’un petit groupe, assis au premier rang, lance une reprise de la célèbre chanson de Bruce Channel, Hé bébé !, pour encourager l’Allemande Eva Lys. «J’adore ce nouveau conceptse réjouit Julia, une habitante de Sydney qui fait le déplacement chaque année. On voit très bien les joueurs et l’ambiance est festive avec de la musique. Même si je viens avant tout pour le tennis, j’aime ces endroits décontractés.


Un bar avec terrasse et un étage a été installé en bordure du court 6 pour offrir une nouvelle expérience aux fans de l'Open d'Australie. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Un bar avec terrasse et un étage a été installé en bordure du court 6 pour offrir une nouvelle expérience aux fans de l'Open d'Australie. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Un bar avec terrasse et un étage a été installé en bordure du court 6 pour offrir une nouvelle expérience aux fans de l’Open d’Australie. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

L’ambition du directeur du tournoi, Craig Tiley, est d’en faire une nouvelle attraction. «Nous espérons qu’il deviendra rapidement le ‘tribunal du parti’. C’est un modèle que nous aimerions développer davantage sur le site à l’avenir », il a estimé en 2024 pour son inauguration avec nos confrères de Forbes. Les joueurs sont divisés par l’idée. Si beaucoup ignorent le bruit, d’autres avouent être parfois dérangés. Varvara Gracheva a dû s’adapter lors de son premier match sur ce court : « 90 % du temps, ça ne me dérange pas, mais quand quelqu’un se met à crier pendant le point, c’est un peu dur. Le public est très proche, mais c’est comme ça, on ne peut pas supprimer la barre, elle a souri. Il faut juste qu’il y ait un peu plus de respect pour le jeu. »

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« Chaque Grand Chelem est représentatif d’un style de tennis, d’une surface, et apporte à son tournoi la culture et la façon d’être locales, glisse François Thomazeau, écrivain, journaliste et ancien chef de presse à Roland-Garros. Vous pouvez le sentir. Les Australiens ont un état d’esprit plus détendu et festif, et le sport fait partie intégrante de leur vie. »

Le pari s’avère gagnant, selon les organisateurs, qui communiquent chaque matin à la presse leurs chiffres de fréquentation. Six jours seulement après le début du tableau principal, l’Open d’Australie en compte déjà 449 070 visiteurs, et même 565 598 si l’on ajoute la semaine de référence. A titre de comparaison, à Roland-Garros, 670 000 places ont été vendues sur l’ensemble du tournoi en 2024, selon la Fédération française de tennis (FFT).

Plusieurs stands d'activités ont été installés sur le terrain de l'Open d'Australie, notamment le turnball.

Open d’Australie 2
Plusieurs stands d’activités ont été installés sur le terrain de l’Open d’Australie, notamment le turnball.
(APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Grâce à un lieu bien plus grand qu’à Paris, l’Open d’Australie mise sur le volume de spectateurs. “Ils n’ont pas le même public, avec des spectateurs ici moins avertis qu’à Londres ou Paris”, confirme Lionel Maltese, spécialiste du marketing sportif et ancien membre du comité exécutif de la FFT. Wimbledon et Roland-Garros sont synonymes de tradition, d’économie de rareté et de business haut de gamme. L’US Open s’appuie sur le divertissement américain, où tout est permis, avec de nombreux concerts. “L« L’Open d’Australie est dans un modèle « parc d’attractions et festivals », avec le plus de monde possible, avec de nombreux partenaires proposant des activités de plein air. C’est le seul à réellement se concentrer sur le tourisme et la notion de marketing de destination, soutenu par l’État de Victoria. analyse Lionel Maltese, maître de conférences à l’université d’Aix-Marseille.

“C’est là qu’ils se démarqueront pour rechercher d’autres revenus et une exposition différente.”

Lionel Maltese, spécialiste du marketing sportif

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Ce modèle économique, différent des autres Grands Chelems, s’explique aussi par son marché, plus petit que les trois autres. « Ils sont limités parce qu’ils sont géographiquement excentriques. Leur économie n’est pas comparable à celle des trois autres Majors, situées dans les grandes villes, remarque Lionel Maltese. Surtout, poursuit ce spécialiste, ils n’ont pas les mêmes droits . Aujourd’hui, les droits TV des trois autres tournois du Grand Chelem sont bien supérieurs à ceux de l’Open d’Australie car le marché n’est pas le même. [notamment à cause du décalage horaire important].»

Pour obtenir les droits TV internationaux, le tournoi a dû adapter sa programmation, surtout avec l’ultra-domination européenne et américaine parmi les meilleurs joueurs mondiaux. C’est pourquoi deux matchs sont disposés sur les courts principaux en soirée, afin de correspondre au plus grand nombre de fuseaux horaires possible, en plus de proposer une double billetterie. “Ils ont aussi peu d’hospitalité, qui est la deuxième source de revenus à Roland-Garros, et qui est aussi très importante à Londres, et même à New York”, détaillé Lionel Maltesse. Ils n’ont pas beaucoup de grandes entreprises et les grands groupes préféreront aller à Paris ou à Londres.»

Leur modèle économique, plus fragile que les trois autres, ne les empêche pas d’investir largement. Ils ont été les premiers à installer un toit sur le terrain principal de la Rod Laver Arena à la fin des années 1980.. “Ils n’ont pas le choix, tranche Lionel Maltesse. Contrairement aux autres, ils ne sont pas propriétaires de leur stade. Ils dépendent donc de l’État de Victoria [les autres sont indépendants]qui investit énormément parce qu’il Le tournoi est le fer de lance de l’Océanie. C’est leur seul grand événement avec le Grand Prix de Formule 1. C’est une marque pour le continent, alors que nous sommes sur une marque nationale. Le tournoi cherche également à attirer un public asiatique, un autre continent proche de ses frontières, afin de continuer à accroître encore sa visibilité. Reste à savoir si, à terme, ce modèle ne deviendra pas une référence, voire le standard, pour toutes les compétitions sportives.

 
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