En novembre 2018, Yves Germain fait la queue pour faire le plein d’essence chez Costco de la région de Montréal. Cela fait une trentaine de minutes qu’il attend son tour.
Youssef Fraikech fait également la queue, mais se rend compte qu’il est du mauvais côté de la pompe à essence. Il tente donc de corriger son erreur en tentant de se placer devant Germain, dans le couloir suivant, en activant son clignotant.
«Le défendeur s’est alors mis en colère et a décidé de l’attaquer physiquement pour l’avoir dépassé», a écrit la juge Brigitte Gouin dans son jugement, à la division des petites créances.
Germain descend alors de son véhicule pour se diriger vers la voiture de Fraikech dont la vitre est baissée. Il introduit ses mains dans le véhicule pour le saisir par le col.
Selon Fraikech, le quinquagénaire l’a secoué, en plus de lui porter plusieurs coups à la mâchoire et aux épaules. Pour se défendre, la victime repousse Germain à deux mains.
Un employé de Costco est alors intervenu entre les deux hommes pour mettre fin à l’altercation. La police a été immédiatement appelée sur les lieux, mais Germain a fait le plein d’essence et a quitté le parking avant leur arrivée.
Fraikech apparaît « très secoué » par les événements.
Accusations
Un rapport d’accident a été complété par la police de Montréal, puis des accusations d’agression ayant causé des blessures ont été déposées contre Germain.
En septembre 2020, le quinquagénaire a été reconnu coupable par le tribunal municipal. Il a ensuite obtenu une libération conditionnelle pour plusieurs heures de travaux d’intérêt général et de bonne conduite.
-Suite à cette condamnation, Fraikech a adressé une mise en demeure à son agresseur en novembre 2022 ; il demande des dommages et intérêts pour les préjudices subis. La demande est contestée par Germain.
Fraikech réclame 15 000 $ de dommages et intérêts pour perturbations et inconvénients. Il dit avoir subi un traumatisme, une perte de revenus et plusieurs blessures : lésions cervicales, coup du lapin, spasmes musculaires, traitements de physiothérapie médicale. L’homme affirme également avoir subi un énorme préjudice émotionnel et psychologique après l’incident.
Des preuves médicales sont fournies au tribunal afin d’étayer toutes les allégations de la victime.
Germain, de son côté, maintient qu’il n’a « jamais touché » Fraikech. Il juge que les poursuites sont abusives, sans justification. L’accusé réclame à son tour 5 000 dollars de dommages et intérêts. Selon lui, Fraikech n’a jamais subi de dégâts ni de séquelles.
«La Cour est d’avis que la poursuite contre Fraikech, conséquence directe des actes criminels commis par Germain, est loin d’être frivole, bien au contraire», écrit le juge Gouin.
Elle estime que la victime a prouvé la présence d’un préjudice. Le tribunal n’a même pas besoin de se pencher sur les événements, puisque Germain a déjà été reconnu coupable de ces mêmes faits devant la Cour municipale de Montréal. La faute lui incombe donc automatiquement.
La décision finale a été prise en décembre 2024 ; Germain devra donc verser 15 000 $ à sa victime. De plus, le juge Gouin rejette la demande de poursuite abusive de Germain, car elle est mal fondée.