L’application chinoise TikTok, bien connue des adolescents pour ses chorégraphies ludiques, est plus que jamais au cœur des débats géopolitiques. TikTok est l’application des records. Il a fallu cinq ans pour qu’un milliard d’utilisateurs mensuels visionnent ses vidéos. Ce qui a pris 8,7 ans pour Facebook ou 7,7 ans pour Instagram. En France, chaque jour quelque 9,5 millions de personnes ouvrent l’application, qui compte 14,9 millions d’utilisateurs actifs mensuels.
Pourtant, en février et mars 2023, la Commission européenne et l’État français ont annoncé l’interdiction du téléchargement de l’application sur les smartphones professionnels des agents publics.
Fin novembre 2024, l’Australie a légiféré pour qu’à partir de décembre 2025 les moins de 16 ans ne disposent plus de compte personnel sur les réseaux sociaux. Cela vaut pour toutes les plateformes, y compris TikTok ou X. Les amendes prévues vont jusqu’à 30 millions d’euros si elles acceptent encore des comptes de jeunes utilisateurs. Même les comptes préexistants.
En février 2023, les autorités américaines disposaient de 30 jours pour supprimer l’application de leurs smartphones professionnels. Mais cette mise en examen de l’éditeur chinois va plus loin. Car les Etats-Unis souhaitent que l’entité qui gère l’application accessible sur leur territoire soit séparée capitaliste de son propriétaire actuel.
La procédure s’accélère puisque le 6 décembre 2024, un tribunal fédéral de Washington a rejeté le recours déposé par la demande, contre une loi obligeant sa maison mère chinoise, ByteDance, à la vendre sous peine d’interdiction aux Etats-Unis. Uni. Et désormais, les jours sont comptés depuis que les magistrats ont validé que le Congrès était fondé à demander, à partir du 19 janvier 2025, ce blocage d’une application utilisée par 170 millions d’Américains.
Les deux principales critiques sont la collecte de données sensibles et la diffusion de propagande destinée à nuire au système politique des Etats-Unis. Les accusations se situent donc au niveau géopolitique, alors que les avocats de TikTok parlent de « censure fondée sur des informations inexactes, erronées et hypothétiques » et estiment à 1 milliard de dollars la perte de revenus que représenterait la fermeture de l’application pendant un mois pour les PME américaines qui l’utilisent pour commercialiser leurs produits.
L’arbitrage politique est entre les mains de Donald J. Trump qui sera investi le 20 janvier 2025. Le président réélu s’était vigoureusement attaqué à TikTok en 2020, allant jusqu’à proposer un arrangement financier entre le trader WallMart et l’informatique. le géant Oracle pour reprendre la version américaine de l’application. Puis il s’est prononcé contre son bannissement.
L’avis d’Elon Musk, fervent partisan de la liberté d’expression, et toujours critique à l’égard du contrôle étatique, pèsera sûrement dans la décision finale. Mais ni Trump ni Musk n’ont commenté les derniers rebondissements de ce feuilleton politico-technologique.
Le 5 décembre 2024, la justice roumaine a annulé les résultats du 1er décembre.est tour de l’élection présidentielle qui a vu Calin Georgescu, quasiment inconnu du grand public, arriver en tête. Le Conseil suprême de la défense nationale de Roumanie a souligné les campagnes de publication, orchestrées par 25 000 comptes fantômes, qui ont intensément fait la promotion de ce candidat sur TikTok. Une coordination susceptible, selon leurs analyses, de modifier les convictions des électeurs.
En application de son Règlement sur les Services Numériques (DSA), la Commission européenne a imposé à TikTok de fournir des documents internes concernant les modèles algorithmiques de recommandation des messages diffusés sur ses chaînes. Dans cette affaire, Bucarest et Bruxelles soupçonnent Moscou d’être à l’origine de cette utilisation offensive de TikTok.
La Fondation Descartes vient de publier une étude sur la « Pénétration en France des récits étrangers sur les conflits contemporains ». En se concentrant sur nos perceptions des différents récits concernant quatre conflits ou tensions contemporaines : la guerre Russie-Ukraine, le conflit Hamas-Israël, les « tensions entre la junte malienne et la France autour des opérations Serval et Barkhane », et la crise chinoise – Taïwan.
Elle démontre que si les campagnes de désinformation menées par les réseaux sociaux ont encore des impacts limités sur le débat public, les opérations existent bel et bien, et ne font que s’intensifier. L’éducation, l’esprit critique et le partage d’informations documentées font partie des moyens de protection contre la production d’images ou de vidéos basées sur l’émotion.