Transition énergétique –
« Il ne faut pas compter sur une nouvelle centrale nucléaire avant 20 ans »
La directrice d’Alpiq, Antje Kanngiesser, met en garde les entrepreneurs vaudois : mieux vaut ne pas trop miser sur l’atome.
Publié aujourd’hui à 11h58
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- La directrice d’Alpiq, Antje Kanngiesser, soutient une approche nuancée de l’avenir de l’énergie nucléaire suisse.
- Alpiq a quitté EconomieSuisse pour renforcer son engagement ailleurs.
- Il souligne l’urgence de l’adaptation aux énergies renouvelables.
- La transition énergétique nécessite des investissements importants dans le réseau.
Nous nous sommes précipités au SwissTech Convention Center de l’EPFL il y a quelques jours. Plus d’un millier de personnes ont répondu à l’invitation de la Banque Cantonale Vaudoise pour une soirée « Conjoncture et perspectives » dédiée à la transition énergétique. Un détail pimentant de cette rencontre a été l’une des présentations les plus applaudies par ces multiples représentants de l’économie vaudoise: celle de la directrice générale d’Alpiq, Antje Kanngiesser. Si le Parti libéral-radical, proche des milieux économiques, fait partie de ceux qui soutiennent un retour du nucléairele PDG d’Alpiq tient un discours plus nuancé.
« Les quatre centrales nucléaires suisses viennent de recevoir un prix qui souligne leur excellence ; nous sommes donc bien armés pour continuer à les exploiter, a lancé Antje Kanngiesser. Mais à condition que la population l’accepte, il ne faudra pas compter sur une nouvelle centrale nucléaire en Suisse avant vingt ans.»
Alpiq a défrayé la chronique en quittant l’association EconomieSuissequi milite également pour un retour au nucléaire. Mais ce n’est pas la raison principale, précise le directeur : « Nous avons rejoint EconomieSuisse en 2020 avec l’idée d’avoir un impact. Mais nous nous sommes rendu compte que ce n’était pas le bon endroit pour le faire, puisqu’il s’agit d’une association faîtière qui regroupe d’autres associations, mais pas des entreprises. Nous avons donc renforcé notre implication dans d’autres instances, comme l’Association des entreprises suisses d’électricité (AES) ou l’Association faîtière pour l’économie des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique (aeesuisse).»
Une « vraie » urgence
Pour le patron d’Alpiqqui détient des participations dans deux centrales nucléaires en Suisse, ce n’est pas le moment de disperser les forces. “Il faut poursuivre la recherche sur le nucléaire, mais sans détourner notre attention de la véritable urgence, qui est l’adaptation de l’ensemble du secteur à l’arrivée massive des énergies renouvelables.” Les particuliers comme les entreprises se tournent vers l’énergie solaire, constate Antje Kanngiesser, ce qui posera des problèmes aux exploitants d’un réseau électrique qui n’est pas conçu pour cela.
Comme d’autres opérateurs, Alpiq rappelle que la création du système électrique suisse a nécessité d’énormes investissements dans les années 1960, s’élevant à 4% du PIB. Alors que le monde évolue avec la transition énergétique, les efforts pour améliorer le réseau se limitent aujourd’hui à 0,2% du PIB.
Devant les milliers d’invités de la BCV, Antje Kanngiesser a rappelé que l’énergie nucléaire ne pouvait pas être une option rapide. En raison du manque de savoir-faire, de compétences et de chaîne d’approvisionnement, sans parler des risques politiques d’une telle entreprise, la Suisse ne pourra pas compter pendant longtemps sur une nouvelle centrale électrique.
Le directeur d’Alpiq n’est d’ailleurs pas le seul à prononcer ce discours. «Toutes les grandes compagnies d’électricité (Alpiq, BKW et Axpo) suivent la même ligne : nous devons augmenter rapidement nos capacités de production d’électricité», rappelle Antje Kanngiesser.
Et l’énergie nucléaire dans l’immédiat ne réussit pas entièrement dans les rangs du PLR lui-même. L’ancienne ministre vaudoise de l’Energie et conseillère nationale du PLR Jacqueline de Quattro partage un point de vue similaire. “Je ne suis pas aussi convaincue que mon parti du nucléaire, mais je suis ouverte aux nouvelles technologies et je soutiens la recherche dans ce domaine”, a-t-elle déclaré par téléphone. Mais il est incontestable que la technologie de la fusion n’est pas mature. En attendant, nous devons avancer résolument dans la transition énergétique.»
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Alain Détraz est journaliste à la rubrique vaudoise des «24 Heures» depuis 2005. Après avoir couvert différents domaines de l’actualité locale, il est responsable de la page Vaud Economie depuis 2022.Plus d’informations
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