Dans un environnement marqué par une baisse de l’inflation, on pourrait assister à un découplage avec les Etats-Unis et à une meilleure performance des obligations d’État européennes.
Alors que Trump s’apprête à prendre ses fonctions en janvier, potentiellement exalté par la victoire écrasante des Républicains, la presse financière explique que c’est une excellente nouvelle pour les marchés boursiers, mais une mauvaise nouvelle pour les marchés obligataires. Mais cela ne signifie pas que les marchés obligataires passeront les quatre prochaines années en hibernation.
Nous verrons dans quelques mois si, une fois au pouvoir, Trump honorera ses promesses de campagne. En attendant, il convient de considérer les États-Unis et l’Europe comme deux marchés obligataires bien distincts, et d’analyser en détail les sous-classes d’actifs de chaque marché. Chaque fois que l’incertitude règne, il est généralement préférable d’adopter une approche nuancée, spécifique à la région concernée.
Concernant les États-Unis, Trump a promis des mesures de relance budgétaire, qui prendront la forme de réductions d’impôts et de droits de douane visant à protéger les entreprises locales. Cela devrait soutenir les dépenses de consommation, la croissance américaine et l’appétit pour le risque sur les marchés financiers. Il y a fort à parier que cette politique sera inflationniste, ce qui devrait créer un environnement quasi parfait pour les marchés boursiers. Mais nous pensons qu’il y aura également des gagnants dans le domaine des titres à revenu fixe, en particulier dans le segment du haut rendement américain.
Les spreads sont actuellement faibles sur le marché américain du haut rendement, mais ils pourraient encore se resserrer à mesure que les perspectives de croissance s’améliorent, ce qui devrait se traduire par de meilleurs résultats d’entreprises, une réduction des taux de défaut et une évolution favorable de la relation entre l’offre et la demande. Et même si les écarts de taux ne se contractaient pas, les investisseurs recevraient quand même des coupons généreux, malgré le risque d’une récession imminente. Nous sommes optimistes sur le haut rendement américain depuis un certain temps, et la victoire de Donald Trump ne fait que renforcer l’idée que cette classe d’actifs va bien se comporter.
Concernant la dette d’entreprise en général, la présidence Trump devrait également profiter à certaines sociétés américaines de l’univers Investment Grade, même si ce segment peut s’avérer plus sensible aux taux d’intérêt que le secteur High Yield, selon où l’on se situe sur la courbe des taux. Quoi qu’il en soit, nous prévoyons un resserrement des écarts de rendement, ce qui devrait soutenir la performance de la dette des entreprises.
Le principal risque pour les obligations américaines résidera dans le marché du Trésor, car le déficit budgétaire pourrait encore se creuser pendant le mandat de Trump.
Étant donné que les mesures de Trump vont probablement alimenter l’inflation, le marché révise à la baisse le nombre de baisses de taux qu’il prévoit. Il y a à peine six semaines, le marché s’attendait à une baisse de 50 points de base en novembre. Cependant, la Fed n’a abaissé ses taux que de 25 points de base. La probabilité d’une baisse des taux en décembre est tombée à 50 %. La Fed envisage toujours de baisser ses taux, mais cela dépendra beaucoup des statistiques économiques, dont la trajectoire est de plus en plus incertaine.
En Europe, l’effondrement du gouvernement de coalition en Allemagne accentue le risque que courait déjà la France, et la probable mise en place de droits de douane par le gouvernement américain pourrait freiner la croissance économique. Cela nous pousse à redoubler de vigilance sur le haut rendement européen, ce segment étant largement exposé aux secteurs de l’automobile et de la consommation. Nous préférons donc nous tourner vers des dettes mieux notées en Europe, en attendant de voir comment évolue la situation économique. Il nous semble judicieux de privilégier les actifs libellés en euros de meilleure qualité alors que les obstacles à la croissance économique se multiplient.
La Banque centrale européenne aura un rôle à jouer ; elle devra probablement continuer à baisser les taux pour compenser le ralentissement de l’activité économique. Dans un environnement marqué par une baisse de l’inflation, on pourrait assister à un découplage avec les Etats-Unis et, éventuellement, à une meilleure performance des obligations d’État européennes.