jeil y a deux ans, en octobre 2022, Elon Musk acquérait Twitter, pour la somme astronomique de 44 milliards de dollars [la même somme en euros à l’époque]. Selon de nombreux analystes, l’opération est un amer désastre pour lui comme pour ses investisseurs : le nombre d’utilisateurs du réseau social a chuté, selon certaines estimations, de 33%, et sa valorisation de 75%.
Mais loin de ruiner son image de visionnaire des affaires et de la technologie, Twitter a catapulté la notoriété d’Elon Musk à des niveaux vertigineux. Tout au long de la campagne présidentielle américaine, il s’est imposé comme une figure extraordinaire, à la fois adulée et injuriée, à la croisée des mondes technologique et politique. L’homme qui a précipité la naissance du marché de la voiture électrique est devenu le roi de la désinformation et des théories du complot qui le présentent comme une victime (au choix) du gouvernement, du wokisme, des migrants.
Le rôle polarisant qu’il assume et sa décision de faire de Twitter, qu’il a rebaptisé X, une plateforme de propagande d’extrême droite peuvent sembler sans précédent. En réalité, sa montée en puissance n’est qu’un élément particulièrement visible d’un phénomène plus vaste, amorcé il y a plusieurs décennies : Internet favorise les conservateurs, adeptes de l’utilisation de ses plateformes pour diffuser leurs messages toujours plus près de l’extrême droite.
Héros de la droite
Le fait est que lorsque la droite exploite Internet à des fins politiques, elle s’en sort bien mieux que la gauche – une asymétrie au cœur de mes recherches depuis près de quinze ans. S’il est tentant de considérer un Elon Musk ou un Donald Trump comme les instigateurs de ce mouvement d’extrême droite naissant, en réalité, ils n’en sont que les produits inévitables, propulsés en avant par un écosystème médiatique numérique conservateur dont les racines s’étendent loin et profondément.
L’ascension de Musk jusqu’à devenir l’oligarque le plus important de la planète révèle des aspects importants de la façon dont ces dynamiques remodèlent notre monde. Les messages qu’il soutient et diffuse ont une forte résonance non pas parce qu’ils sont originaux, mais parce qu’ils amplifient des idées qui définissent aujourd’hui non seulement l’extrême droite, mais aussi le Parti républicain moderne.
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Ce n’est certainement pas Musk qui a inventé l’écosystème numérique d’extrême droite. Il est néanmoins intéressant d’essayer de comprendre comment il a pris conscience de la puissance de cet écosystème et comment il l’utilise à ses propres fins. Le soutien d’Elon Musk à l’extrême droite peut sembler une anomalie. L’homme a longtemps voté démocrate, comme il l’admet lui-même, et nombre de ses entreprises – dont Tesla et SpaceX – ont bénéficié de contrats et de subventions gouvernementales.
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