Pour les salariés des sous-traitants automobiles, le chemin périlleux vers l’électrification – le 06/05/2024 à 09:26 – .

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Emrullah Karaca, mécanicien employé par l’équipementier automobile Continental à Gifhorn, dans le nord de l’Allemagne, le 23 avril 2024 (AFP / Léa PERNELLE)

Dans quelques mois, Emrullah Karaca sera prêt à assembler des pompes à chaleur. Un nouveau métier pour ce mécanicien allemand qui fabrique des freins automobiles depuis plus de vingt ans mais dont l’usine est vouée à fermer.

Fin 2027, l’équipementier automobile Continental va délocaliser la production de son site de Gifhorn, dans le nord de l’Allemagne, vers la Croatie, la République tchèque et le Pays de Galles pour rester « compétitif ».

Pour les 800 salariés qui vont perdre leur emploi, comme Emrullah Karaca, la course à la reconversion est lancée.

Il fait partie des milliers de travailleurs de la sous-traitance automobile, secteur phare de l’industrie allemande, frappé par un tsunami de plans sociaux ces derniers mois. En Allemagne, le spectre du décrochage industriel plane sur la campagne des élections européennes.

Les équipementiers européens subissent le double choc de la fin programmée du moteur thermique dans l’UE et de la montée en puissance de la concurrence chinoise.

Comme Continental, qui va supprimer quelque 7 000 postes dans le monde, les Allemands Bosch, ZF, Webasto ont récemment annoncé d’importantes réductions d’effectifs. Idem en France pour les groupes Forvia et Valeo.

Emrullah Karaca, qui fabrique des freins pour voitures depuis plus de 20 ans, dans l’usine de l’équipementier Continental à Gifhorn, dans le nord de l’Allemagne, le 23 avril 2024 (AFP / Léa PERNELLE)

A Gifhorn, une entreprise régionale, Stiebel Eltron, a proposé de transformer l’usine en site de production de pompes à chaleur et à 49 ans, Emrullah Karaca se forme à ce nouveau métier.

“Freins ou pompes à chaleur, pour moi ça revient au même !”, assure à l’AFP ce père de trois enfants. Non sans un pincement au cœur : ses deux parents travaillaient déjà chez Continental.

Stiebel Eltron espère préserver 300 emplois. Jusqu’à 100 salariés de Conti pourraient trouver du travail dans l’usine ferroviaire Siemens Mobility, située à une trentaine de kilomètres de là.

– Nouveaux acteurs –

Indispensables à la fabrication de pots d’échappement, de pistons, de cylindres, de boîtes de vitesses, de freins, les ouvriers de la sous-traitance automobile – quelque 270 000 emplois en Allemagne – se demandent ce que l’avenir leur réserve.

“Pour 100 travailleurs impliqués dans la fabrication d’un moteur traditionnel, il n’en faut que 10 pour fabriquer un moteur de voiture électrique”, résume Jutta Rump, professeur à l’université de Ludwigshafen.

Alors que l’Union européenne envisage d’interdire la vente de voitures thermiques neuves en 2035, l’électrification accélérée du secteur automobile bouleverse le cœur de métier des équipementiers traditionnels.

Ils font face à la concurrence de nouveaux acteurs, notamment les fabricants chinois de composants électroniques qui accaparent des parts de marché.

Le mécanicien Emrullah Karaca sur le chantier de son usine Continental à Gifhorn, nord de l’Allemagne, le 23 avril 2024 (AFP/Léa PERNELLE)

Le géant chinois des batteries CATL s’est ainsi hissé en quelques années à la troisième place des équipementiers mondiaux, toujours mené par l’allemand Bosch, selon le cabinet de conseil Roland Berger.

Les équipementiers traditionnels justifient également les réductions d’effectifs par la pression des constructeurs automobiles engagés dans une guerre des prix.

– Grève –

En Allemagne, un sous-traitant sur trois envisage de délocaliser à l’étranger pour des raisons de compétitivité, selon une étude de la fédération des constructeurs automobiles allemands (VDA).

Dans le sud-ouest du pays, l’usine Ford de Saarlouis fermera ses portes en 2025. Finies les traditionnelles Fiesta, Mondeo, Focus, que le site fabrique depuis longtemps. Le constructeur américain a choisi son usine de Valence, en Espagne, pour la production de modèles électriques à grande échelle.

Cette fermeture est un séisme pour le parc d’équipementiers travaillant avec l’usine. Leurs employés ont mené une grève de six jours en mars pour obtenir des indemnités de licenciement suffisantes.

Parmi eux, Luca Thonet, chef d’équipe logistique chez Lear, un des fournisseurs de Ford. A 33 ans, il aimerait rester dans cette région frontalière avec la France.

« Mais il n’y a presque plus d’industrie dans la région ; les autres usines ne sont pas non plus dans une très bonne situation», explique-t-il à l’AFP.

Il cite l’exemple de l’équipementier ZF qui a également annoncé deux fermetures d’usines en Allemagne et dont le comité d’entreprise craint la perte de 12.000 emplois, notamment à Sarrebruck, à 25 kilomètres de Sarrelouis.

Car si l’Allemagne est confrontée à une grave pénurie de main d’œuvre, elle ne concerne pas tous les secteurs. En informatique, en vente, en développement de produits, « nous manquons de personnel qualifié, mais ce n’est pas le cas en production », prévient Jutta Rump.

 
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