Marchés financiers | « Nous arrivons à un moment de vérité »

Marchés financiers | « Nous arrivons à un moment de vérité »
Marchés financiers | « Nous arrivons à un moment de vérité »

Le marché semble anticiper de futures baisses de taux et un atterrissage en douceur de l’économie. Qu’est-ce que cela signifie pour les investisseurs ?


Publié à 1h45

Mis à jour à 6h00

«Nous arrivons à un moment de vérité», affirme Daniel Ouellet, gestionnaire de portefeuille au Groupe Ouellet Bolduc, affilié à Desjardins.

« Il faut comprendre qu’historiquement, les taux montent pour ralentir l’économie, la consommation et le marché du travail afin de ramener l’inflation vers un objectif de 2 %. Lorsque nous réussissons, nous aidons le marché du travail en abaissant les taux pour parvenir à un atterrissage en douceur. »

Ce scénario est bien intégré, mais il faut se garder de le tenir pour acquis, prévient cet expert.

Si ce scénario optimiste est déjà intégré au nombre de baisses de taux et de rotations sectorielles de sécurité, il apparaît un peu tard pour ajuster un portefeuille afin de bénéficier des baisses de taux directeurs. « Il faut être devant le cortège et il y a déjà un long chemin à parcourir », affirme Daniel Ouellet.

Consommation discrétionnaire

Le secteur de la consommation discrétionnaire pourrait paraître attrayant à certains puisqu’il intègre déjà largement une « récession de la consommation », souligne Daniel Ouellet.

Par exemple, l’action du constructeur québécois de véhicules récréatifs BRP traverse une année difficile. Son titre est en baisse de 11% cette année. Le stock Nike est en baisse de 17% depuis le 1est Janvier. Le stock du détaillant de vêtements Lululemon affiche une baisse de 45 % jusqu’à présent en 2024.

Si vous êtes convaincu du succès de l’atterrissage en douceur, il est possible d’entrevoir un point d’entrée dans le secteur de la consommation discrétionnaire.

Daniel Ouellet, portfolio manager at Groupe Ouellet Bolduc

« Mais il est peut-être encore un peu tôt. Je préfère conserver mes liquidités et un positionnement plus défensif et prudent en raison de la probabilité que l’économie tombe en récession. »

Et si l’économie ne change pas, celui qui sait orienter ses investissements est très malin. Les bonnes affaires sont rares en ce moment, selon M. Ouellet.

« Il y a eu une forte rotation des géants du numérique vers des secteurs qui en avaient moins bénéficié, notamment les actions à petite capitalisation. La baisse des taux a déjà favorisé plusieurs secteurs», affirme Daniel Ouellet.

Parier sur le long terme

Il est préférable de rester engagé dans une stratégie d’investissement à long terme plutôt que d’essayer de prédire ce que fera le marché après une baisse des taux, explique Ian McLean, gestionnaire de portefeuille chez McLean Capital, un gestionnaire de placements. actifs de Laval.

“Il ne faut pas penser que l’on peut prédire l’impact des changements de taux sur le marché boursier”, ajoute-t-il.

Nous devons éviter de prendre des décisions réactives à court terme, notamment celles fondées sur des changements de taux. L’histoire nous montre que l’idée commune selon laquelle les marchés chutent lorsque les taux augmentent et augmentent lorsque les taux baissent est souvent fausse à court et moyen terme.

Ian McLean, gestionnaire de portefeuille chez McLean Capital

« Souvent, c’est le contraire qui s’est produit. Lorsque les taux baissent, c’est généralement parce que l’économie se porte moins bien », explique Ian McLean.

Lorsque les taux baissent, on dit souvent que c’est une bonne nouvelle pour les valeurs de croissance comme celles du secteur technologique, affirme Daniel Ouellet. « Mais ce segment de marché est déjà extrêmement riche en valorisation. »

Le secteur de l’or est également déjà en hausse de 25 % cette année, dit-il. L’immobilier en bourse pourrait bénéficier de baisses de taux. Mais les fiducies immobilières viennent elles aussi de bénéficier d’une belle reprise, souligne Daniel Ouellet.

Un « beau refuge »

« Les valeurs des services publics et les actions à dividendes élevés bénéficieront souvent de baisses de taux, mais ces actions se sont également très bien comportées cette année. Les opportunités ne sont pas faciles à trouver», observe M. Ouellet.

Les titres versant des dividendes pourraient toutefois devenir un « joli refuge » pour les investisseurs en cas de ralentissement de l’économie plus prononcé que prévu, estime le gestionnaire de portefeuille Philippe Hynes chez Tonus Capital.

« À court terme, le risque que les taux ne baissent pas autant que prévu est inférieur au rendement potentiel que les titres versant des dividendes pourraient générer si les taux baissaient plus que prévu. »

C’est ce qui inquiète Daniel Ouellet. S’il devait y avoir une baisse du taux directeur après avoir atteint le taux neutre d’environ 2,5%, un scénario négatif pour l’économie émergerait. Les bénéfices anticipés pourraient alors être révisés à la baisse et les multiples de valorisation élevés pourraient baisser.

«Il faut être prudent», dit M. Ouellet. C’est pourquoi il dit avoir récemment acheté des valeurs plus « défensives » dans le secteur de la santé comme celles du laboratoire pharmaceutique Pfizer et de l’équipementier médical Medtronic.

Le marché pourrait néanmoins bien se comporter si l’atterrissage en douceur s’avère réussi. « Mais les gains supplémentaires seraient probablement inférieurs à ce que l’on pense », dit-il.

La bonne tenue des marchés au cours des deux dernières années fait que les valorisations sont plutôt tendues, souligne un gestionnaire de portefeuille qui travaille pour une grande banque canadienne et qui ne peut être identifié car il n’est pas autorisé par son employeur à s’exprimer publiquement.

« Il y a beaucoup de bruit de fond autour des élections et des guerres américaines. Je ne crois pas que nous entrerons en récession, mais il y aura certainement un ralentissement. Les futures baisses de taux devraient encore soutenir les marchés, sans nécessairement les faire progresser à grande vitesse. D’où la nécessité de disposer de titres de croissance pour ceux qui visent le long terme et qui veulent se donner les moyens de déjouer les indices. En revanche, la volatilité sera au rendez-vous et nous pourrions assister à des baisses et des progressions plus prononcées », ajoute ce spécialiste de l’investissement.

Patience

Selon Daniel Ouellet, on va entendre de plus en plus parler du seuil de 6000 points pour l’indice S&P 500. « Pour y arriver, il faut une croissance des bénéfices de 14 % en 2025, une autre de 11 % en 2026 et un multiple de 19 fois les bénéfices de 2026. Il faut être conscient que les marchés s’attendent à une croissance significative des bénéfices pour les deux prochaines années, ce qui constitue un scénario économique très positif. Cela ne promet pas un gros retour. Passer de 5 700 à 6 000 points, c’est environ 5 ou 6 % de rendement en 15 mois », précise-t-il.

«Je m’attends à ce que le marché soit plus stable pendant un certain temps, même si l’atterrissage en douceur est réussi», déclare Daniel Ouellet.

« En matière de stratégie d’investissement, quel que soit l’environnement, l’idéal est d’investir dans des entreprises de haute qualité et d’être patient », conclut Ian McLean.

 
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