Vente de spiritueux québécois à la SAQ

L’époque du « bar ouvert » des spiritueux québécois à la Société des alcools du Québec (SAQ) est maintenant révolue. Avec un approvisionnement saturé et des ventes en baisse, l’entreprise publique veut « faire le ménage » en durcissant ses règles et en retirant des rayons plus d’une centaine de produits actuellement proposés en succursale.


Publié à 1h22

Mis à jour à 5h00

« Avoir un dixième gin au citron n’est peut-être plus nécessaire », a expliqué Sandrine Bourlet, vice-présidente marketing de la SAQ, lors d’une entrevue avec La presse.

Cette décision, qui pourrait entraîner la mort de certaines entreprises, a néanmoins été prise de concert avec l’Union québécoise des microdistilleries (UQMD). L’association estime nécessaire que les règles du jeu changent.

Des 630 spiritueux québécois actuellement offerts à la SAQ, entre 150 et 200 disparaîtront des tablettes au cours de la prochaine année. ” [Ce qui permettra de] libérer de la place, environ 15 % de la place de nos rayons, pour mettre les bons joueurs dans la catégorie », soutient M.moi Bourlet.

En cinq ans, les microdistilleries se sont multipliées partout au Québec, passant de 10 à environ 70. « Depuis cinq, six ans, nous avons connu une belle croissance des ventes et une belle croissance de la catégorie », assure-t-elle.

À l’époque, la société d’État était déterminée à offrir la chance à tous les distillateurs locaux de voir leur gin ou leur eau-de-vie d’érable avoir leur place au soleil.

Cependant, face à un nombre croissant de produits et à un enthousiasme décroissant, les ventes dans cette catégorie ont connu cette année une baisse de 5% par rapport à l’année dernière.

Actuellement, le tiers des spiritueux québécois offerts en tablettes génèrent à peine 5 % des ventes de la catégorie, ce qui est très peu aux yeux du vice-président marketing. « D’ici un an, nous voulons éliminer ces produits qui ne font que 5 % des ventes. »

« On voit bien qu’il y a un désintérêt, la dynamique des achats locaux s’est atténuée. Il y a une expression qu’on utilise dans la gestion de l’offre qui dit que trop de choix tue le choix. Il faut agir pour resserrer l’offre, ajoute Mmoi Bourlet. [Il faut] garantir qu’il y aura désormais des règles pour l’entrée et la sortie des produits. Nous n’acceptons plus tout le monde. »

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PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

La vice-présidente marketing de la SAQ, Sandrine Bourlet

Même si les lignes directrices ne sont pas encore déterminées, elle souligne que les spiritueux qui entreront dans les succursales seront les plus « efficaces ». « Peut-être dira-t-on qu’un gin, pour demeurer sur les tablettes de la SAQ, doit apporter de la variété au répertoire, doit avoir une vélocité de vente. Nous nous baserons sur les données clients avec le programme Inspire. »

Des discussions auront lieu cet été avec l’UQMD, qui représente plus d’une cinquantaine de microdistilleries. Même si elle reconnaît que cette décision risque de susciter le mécontentement chez certains producteurs, Mme.moi Bourlet mentionne néanmoins que « ce n’est pas la SAQ qui doit supporter le poids de ce marché ».

« Des produits qui ne se vendaient pas pouvaient remplacer un produit recherché par les clients », a-t-elle insisté.

Pour la survie de l’industrie

À l’UQMD, le président Joël Pelletier assure que les changements annoncés par la SAQ étaient nécessaires pour assurer la viabilité de l’industrie. «C’était un bar ouvert», dit-il sans détour. Il y a des fournisseurs qui ont profité de la situation pour soumettre des produits en quantités phénoménales. Certains avaient jusqu’à 30, voire 40 SKU, et ils ne fonctionnaient pas forcément bien sur les tablettes. Cela devenait difficile pour tout le monde. C’était devenu chaotique. Le pire des scénarios, c’était de ne rien faire», raconte celui qui est également copropriétaire de la Distillerie du Saint-Laurent, à Rimouski.

Il admet aussi que cet époussetage des rayons pourrait faire grincer des dents certains distillateurs, mais il s’agit là d’une « minorité », selon lui.

Il faut agir avec prudence car, oui, c’est vrai qu’il y a des répercussions sur certaines entreprises. En revanche, si certaines entreprises sont mises en danger [en raison de ces décisions]il faut se poser la question : y avait-il un marché pour ces entreprises ?

Joël Pelletier, président de l’Union québécoise des microdistilleries

Au cours des derniers mois, la distillerie Champ Gauche, à Saint-Arsène, dans le Bas-Saint-Laurent, et La Chaufferie, à Granby, ont annoncé leur fermeture. M. Pelletier souligne également que d’autres ont cessé leur production pour le moment et certains, comme la Distillerie du Saint-Laurent, négocient avec leurs créanciers « pour tenter de s’en sortir ».

Dans ce contexte, un système où tous les produits obtenaient une place à la SAQ « par défaut » n’était plus viable, répète-t-il.

M. Pelletier, qui distribue son gin et son whisky dans les succursales de la société d’État, est conscient que le resserrement des règles pourrait faire disparaître certaines de ses bouteilles actuellement en vente à la SAQ. « Certains de nos produits pourraient être retirés parce qu’ils ne fonctionnent pas suffisamment bien. C’est exactement ce que j’attends de mon distributeur.

« Le problème est que les produits qui sont demandés, donc les produits les plus efficaces, ne parviennent plus à parvenir aux consommateurs. Il y a une offre trop importante. L’espace n’est pas infini. »

À Portneuf, la copropriétaire de la distillerie Ubald, Pascale Vaillancourt, dit « comprendre » la décision de la SAQ. Sur les 11 produits qu’elle y vend, certains risquent de tomber à l’eau car ils ont plus de mal à trouver preneur.

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PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Pascale Vaillancourt et Hugo D’Astous, copropriétaires de la distillerie Ubald

D’après M.moi À Vaillancourt, le problème réside actuellement dans le fait que les distillateurs ne peuvent vendre qu’à la SAQ. Elle aimerait que les producteurs puissent diversifier leur réseau de distribution en faisant affaire, par exemple, avec des épiceries ou directement avec des restaurateurs.

Je ne suis pas d’accord quand on dit qu’il y a trop de distilleries au Québec. Je pense qu’il y a de la place pour tout le monde. Le problème est qu’il n’existe qu’un seul canal de distribution.

Pascale Vaillancourt, copropriétaire de la distillerie Ubald

Les résultats d’un sondage publié mardi par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) tendent à appuyer ses dires. Selon le sondage, « 72 % des propriétaires de PME estiment que les détaillants privés devraient pouvoir vendre les mêmes produits alcoolisés que la SAQ ».

« Chaque distillerie qui meurt, poursuit Pascale Vaillancourt, est une richesse qui se perd dans nos régions. »

Grève de deux jours à la SAQ

À moins d’un changement de dernière minute, les employés qui travaillent dans les succursales de la SAQ seront en grève mercredi et jeudi. Les 5 000 membres du Syndicat des employés de magasin et de bureau (SEMB-SAQ-CSN) sont sans convention collective depuis plus d’un an. Interrogé à ce sujet mardi lors de l’étude des crédits budgétaires au Québec, le président-directeur général de la SAQ, Jacques Farcy, a assuré qu’en cas de grève, l’entreprise d’État avait mis en place un « plan de continuité » visant à maintenir le plus grand nombre possible d’agences ouvertes, mais avec des horaires d’ouverture réduits. Les managers seront appelés à travailler sur le terrain.

Vins et « génocide »

Lors de la commission parlementaire d’étude des crédits du ministère des Finances, Québec solidaire (QS) a demandé à la SAQ de retirer de ses tablettes une dizaine de vins qui seraient produits dans les territoires occupés et étiquetés comme étant un produit d’Israël. Le député Haroun Bouazzi, de QS, a indiqué avoir vérifié Google Maps avec son équipe.

« Est-ce que quelqu’un vous oblige à vendre ces vins ? » a-t-il demandé, ajoutant qu’il pensait que personne n’avait demandé des vins des territoires occupés. Il faisait ainsi référence à l’offensive en cours de l’armée israélienne dans la bande de Gaza à la suite des massacres commis par le Hamas dans l’État hébreu le 7 octobre. Le président-directeur général, Jacques Farcy, a assuré qu’il y avait une demande pour ces vins et que la SAQ vendait vins demandés par les clients. Il a tenu à préciser que l’étiquetage relève de la responsabilité de l’Agence canadienne d’inspection des aliments et que « des consultations sont en cours ».

Avec La Presse Canadienne

 
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