Jouez pour contrecarrer la fraude financière

Jouez pour contrecarrer la fraude financière
Descriptive text here

Il est facile, voire tentant, de blâmer les victimes de fraude financière en présumant qu’elles ont été naïves ou imprudentes. Mais ceux qui ont perdu des milliers de dollars vous diront que ces préjugés ignorent le contexte dans lequel surviennent les arnaques, le haut niveau de sophistication des méthodes utilisées et la psychologie humaine.


Publié à 1h38

Mis à jour à 6h30

Voici une recette assez efficace pour prendre de mauvaises décisions : une bonne dose de pression, à peu près la même quantité de stress et deux ou trois émotions désagréables. Mélangez tout cela et vous pourriez donner votre code PIN à un escroc par téléphone ou même récupérer une grosse pile de 20 $ au guichet automatique. Cela arrive tous les jours.

Une variante : l’arnaqueur au téléphone parvient à mettre sa victime dans un tel climat de confiance qu’elle finit par le remercier de son aide, tandis que le compte bancaire se vide.

Il n’existe pas d’antidote à la fraude efficace à 100 %, mais la sensibilisation et l’information peuvent sérieusement saper les efforts des voyous visant à s’enrichir sur notre dos.

Un nouveau jeu immersif créé par l’Agence du revenu du Canada (ARC) vous permet d’apprendre à aiguiser vos réflexes et à identifier les véritables communications du gouvernement. Dans les semaines à venir, il fera une tournée des centres commerciaux à travers le pays. Jusqu’à dimanche soir, il est installé au milieu de la place Vertu, dans le quartier Saint-Laurent.

Je suis allé le tester vendredi matin. Ce n’est pas tous les jours que l’ARC fait preuve d’autant de créativité pour sensibiliser les gens à un fléau. Le concept, inspiré des jeux d’évasion populaires, a piqué ma curiosité.

type="image/webp"> type="image/jpeg">>>

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

La ministre du Revenu national, Marie-Claude Bibeau, teste un jeu d’évasion destiné à sensibiliser la population à la fraude et aux arnaques financières.

Juste avant d’entrer dans la grosse boîte qui ressemble à un conteneur, la ministre du Revenu national, Marie-Claude Bibeau, avait fait l’expérience. Lorsque vous partez, au bout de neuf minutes, vous obtenez votre note. «On m’a donné 87%. Mon équipe pensait que j’obtiendrais seulement 70 %, alors c’est tout ! », m’a confié l’élu dans un grand éclat de rire.

Le jeu est très réaliste. Une fois dans la cuisine et le salon, nous recevons des SMS, des emails et des appels téléphoniques. Il ne manque que les enfants qui se disputent et le son de la télévision. A chaque fois, il faut déterminer assez rapidement si les messages sont légitimes ou non. Il est également nécessaire d’évaluer l’authenticité des lettres signées par l’ARC.

Dans la vraie vie, on est parfois pressé par le temps, on est moyennement attentif, alors dans le jeu, pour simuler cet état d’esprit, le compteur court. Le temps nécessaire pour prendre des décisions est limité.

En état d’hypervigilance, je cherchais bien sûr des indices évidents qui m’auraient permis de reconnaître les messages frauduleux, estimant que ce serait finalement assez facile. Mais non ! En sortant de la fausse maison, on m’a donné mon résultat : 80%, avec quelques explications et conseils. Un appel légitime me paraissait louche, ce qui est moins dangereux que l’inverse, pensai-je pour me consoler. J’ai également eu du mal à identifier les vrais courriels de l’ARC.

Avouez qu’il est facile de perdre le fil et de ne plus savoir comment chaque organisation communique. Un jour, on nous dit que le gouvernement n’envoie jamais de messages textes, le lendemain, Revenu Québec nous dit qu’il aura recours à cette méthode.

La logique veut qu’il faille se méfier extrêmement de tout message contenant des fautes de français. Or, deux personnes m’ont récemment confié avoir ignoré des avis mal rédigés… qui se sont révélés authentiques.

Ils ne nous rendent pas la vie trop facile, disons.

Ce qui m’inquiète particulièrement dans toutes ces histoires d’arnaques qui font la une des journaux, ce sont les cas où les gens jurent n’avoir cliqué sur rien ni parlé à personne. Malgré tout, des milliers de dollars se sont évaporés de leur compte bancaire.

La CBC rapportait il y a quelques jours que 140 clients de la Banque de Montréal (BMO) s’étaient fait voler 1,5 million de dollars grâce à des virements frauduleux à partir de leur compte bancaire ou de leur marge de crédit. Ils envisagent de poursuivre collectivement la banque qui refuse de les rembourser1.

Les transferts, selon BMO, ont été effectués non seulement avec le bon mot de passe, mais également depuis l’ordinateur des victimes, selon l’adresse IP. «Nos enquêtes montrent que le client a, sans le savoir, partagé ou donné accès à des renseignements personnels», a déclaré BMO à CBC.

Mais un enquêteur en matière de cybercriminalité de la police de Toronto estime que les appareils des clients concernés ont été, sans le savoir, infectés par un logiciel malveillant capable de recueillir à distance leur mot de passe et leur adresse IP. Existe-t-il un moyen de se protéger contre cela et contre toutes les autres avancées technologiques ? Comment prouver son innocence ? Quelle est la responsabilité des banques ? Que fait le gouvernement pour nous protéger ?

Malheureusement, le jeu ARC ne répond pas à ces questions complexes qui devront, tôt ou tard, être prises plus au sérieux. L’année dernière, la fraude a privé 42 000 Canadiens de 569 millions de dollars.

1. Regardez le reportage de CBC (en anglais)

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Plainte déposée contre l’interdiction de TikTok
NEXT les gagnants et les perdants du 6 mai