le monde du rugby face à ses excès

le monde du rugby face à ses excès
le monde du rugby face à ses excès

Consommation de cocaïne, cas de violences conjugales, troisièmes mi-temps qui débordent… Le rugby professionnel mais aussi amateur est confronté à des dérives. Des éducateurs du Biterrois ont accepté de prendre la parole.

Affaires d’agressions sexuelles, de rugbymen accusés de violences conjugales, comme ce fut le cas à Béziers, de bagarres, d’alcool au volant, de joueurs suspendus pour consommation de cocaïne (Oscar Jégou en 2023 à La Rochelle, récemment, Reece Hewatt, à Pau…), diverses répétitions incidents… Ces derniers mois, le rugby et ses joueurs ont souvent quitté la rubrique sport pour glisser vers celle de l’actualité et de la justice. Ces dérives entachent l’image du monde ovale et mettent à mal ses valeurs identitaires…

« Une course au « toujours plus » »

Sur le terrain ou au quotidien, Richard Castel n’a jamais fait semblant. Quand il faut monter au créneau, aujourd’hui encore, l’ancien troisième ligne international, qui n’a jamais nié avoir grandi et s’être forgé un caractère grâce au rugby, n’hésite pas. Quitte à déranger ou à faire des vagues. Celui qui a porté les couleurs du Stade Toulousain, de Béziers et surtout de l’équipe de , a repris les affaires à Vendres, dans le club où il a chaussé ses premiers crampons, à l’âge de 10 ans, il y a un peu plus de 40 ans.

Il ne cache pas que les dérapages, grâce à de bonnes troisièmes mi-temps, ont toujours existé, à tous les niveaux. Il avoue lui-même avoir été témoin d’excès, souvent passés sous silence : «Le problème aujourd’hui, et il n’est pas propre au monde du rugby car il concerne l’ensemble de la société, c’est qu’il y a une sorte de course au « toujours plus », notes the Vendrois. Les excès existaient déjà quand je jouais. En équipe nationale, en troisième mi-temps, un joueur s’est blessé et a dû déclarer forfait. Je pense aussi qu’il y a eu encore plus d’excès à des niveaux élevés. Mais c’est vrai que, comme il y a un côté festif dans le rugby, il y a un peu plus d’excès. »

«J’en ai été abasourdi.»

C’est contre la banalisation de la consommation de cocaïne chez les jeunes – et pas seulement chez les rugbymen – que Richard Castel a tiré la sonnette d’alarme : «C’était après le confinement, se souvient l’ex-international. Je suis allé au café et j’ai évoqué le sujet du coca. Quand j’ai vu le nombre de personnes qui m’ont avoué l’avoir déjà pris, j’ai été stupéfaite. J’ai vraiment reçu un gros coup au visage. Comme si j’étais le seul à n’en avoir jamais vu… »

Il y a deux ans, en accord avec ses dirigeants, afin de sensibiliser les jeunes de son club aux dangers de cette drogue ou d’autres substances, il a fait intervenir l’association Épisode. Cette structure tente « apporter des réponses concrètes aux problématiques de mal-être et d’addictions des jeunes »comme expliqué sur son site. L’interview des membres d’Episode a achevé l’ancien rugbyman : «C’est vraiment tous les clubs de rugby qui sont impactés, ils me l’ont dit. Le problème, ce n’est pas le rugby, c’est simplement que dans la vie de tous les jours, la coca est devenue monnaie courante. Et ça me dérange. Les parents de jeunes doivent également ouvrir les yeux. Il y en a trop qui sont dans le déni.

“Oui, je connais des gens qui jouent à la cocaïne”

De plus, les éducateurs et entraîneurs expriment de plus en plus de doutes quant à l’intégrité de certains joueurs amateurs. Face à l’agressivité, à la capacité de certains à amortir le choc en revenant immédiatement au combat, ils affirment que la cocaïne circule aussi dans les vestiaires les jours de match.

André (le prénom a été modifié) est éducateur dans un club local. Il déclare : “Il y a des joueurs qui prennent de la coca pour le côté fête, mais aussi pour jouer. Lorsque mon fils jouait, il m’a raconté avoir vu certains de ses coéquipiers prendre un rail avant le match. Et durant la troisième mi-temps qui a suivi, il n’y a eu aucune retenue, c’était aux yeux de tous, sur la table. Oui, je connais des gens qui consomment de la cocaïne. Quand j’étais joueur, il y avait des gars qui le prenaient et tout le monde le savait. Sur le terrain, ils ont été hyper agressifs. C’était un jeu stupide ! La Coca a envahi le rugby amateur. C’est terrible.

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L’alcool a toujours été au centre des troisièmes mi-temps. Dans les clubs, les dirigeants se battent pour interdire à leurs jeunes de “fais comme les grands”. Richard Castel le répète souvent aux joueurs de l’équipe première de Vendres Lespignan : « Les jeunes s’identifient aux seniors et veulent leur ressembler. Ils les voient boire de l’alcool, alors ils en boivent aussi ! Avec, pendant le voyage, des troisièmes moitiés qui débutent, dès le retour dans le bus pour les seniors : « Ils amènent un conférencier, boivent un verre et le bus devient une discothèque ! Nous interdisons aux jeunes de faire de même. Ils ne sont pas autorisés à consommer de l’alcool. Nous le contrôlons.

« Il devrait y avoir davantage de contrôles antidopage »

Afin d’empêcher leurs jeunes joueurs de consommer de l’alcool, à Servian-Boujan, les dirigeants du club ont totalement supprimé l’alcool des buvettes lorsque jouent les équipes cadets et juniors : « Nous ne vendons que de la bière sans alcool, explique Max Santa, le président du cartel. Cela permet d’éviter les abus et la consommation de boissons alcoolisées par les mineurs.

Quant à la consommation de stupéfiants, au-delà de toute action préventive, estime Max Santa “qu’il faudrait que la fédération effectue avec diligence davantage de contrôles antidopage. Il y en a très peu. Il assure cependant que le club a son rôle à jouer « alors que la société évolue. Il faut rester unis pour montrer qu’il n’y a pas que des dérives dans le rugby. C’est le rôle sociétal des clubs. Nous devons également prêter attention à l’environnement qui nous entoure. Cela ressemble de plus en plus à celui qu’on connaît dans le football. Avec une frange de sympathisants souvent pointés du doigt pour leurs dérives.

Diego Minarro : « Ils se sont occupés de nous comme de grands frères »

Diego Minarro fut champion de France avec Béziers en 1983 et 1984. Il vit la fin de la grande épopée béziersoise. Même à son époque, les troisièmes mi-temps pouvaient être folles. Mais il y avait toujours quelqu’un pour remettre sur le bon chemin ceux qui abusaient : « Je me souviens d’une troisième mi-temps qui allait un peu trop loin. Lors du jogging du lundi, Armand Vaquerin et Pierre Lacans sont venus me voir et m’ont dit : maintenant les troisièmes mi-temps comme ça, c’est fini ! Ils s’occupaient de nous, les jeunes, comme de grands frères.

“Les sorties étaient interdites”

Lors de tournées internationales en Afrique du Sud ou en Angleterre, alors qu’il entraînait les U20, l’ancien talonneur raconte que leurs dirigeants étaient vigilants pour qu’il n’y ait pas d’excès : « Ils ne nous ont pas laissé partir et nous ont mis la pression. Nous avions 25 enfants sous notre responsabilité et nous avons dû les ramener à la maison sans problème. Les sorties n’étaient pas autoriséess. »

L’ancien directeur du centre de formation ASBH, aujourd’hui préparateur mental, estime que la prévention et le dialogue doivent primer afin de prévenir les dérives : « Il y a des chefs d’équipe et il devrait y avoir des chefs de soir qui soient capables de veiller à ce qu’il n’y ait pas de débordements. Il doit y avoir une autorégulation au sein du groupe. Il faut avant tout savoir écouter les jeunes, ils ont besoin de libérer leur parole.

 
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