Josette Day et Jean Marais sous la direction de Jean Cocteau six mois à Rochecorbon

Josette Day et Jean Marais sous la direction de Jean Cocteau six mois à Rochecorbon
Josette Day et Jean Marais sous la direction de Jean Cocteau six mois à Rochecorbon

L’histoire est de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont. La femme de lettres du XVIIIee siècle n’imaginait pas qu’un jour Jean Cocteau en ferait un film. Tourné après la guerre, d’août 1945 à janvier 1946, La belle et la Bêtesorti sur les écrans en 1946, réunit Josette Day et Jean Marais. Des acteurs prestigieux pour deux réalisateurs, Jean Cocteau et René Clément comme assistant.

Le moulin de Touvoie à Rochecorbon (Indre-et-Loire), situé dans un écrin de verdure, a été choisi pour devenir la demeure de Belle, de son père et de ses sœurs. Le petit manoir, au bord du ruisseau de la Bédoire et à l’orée d’un bois, offre le cadre idéal pour un conte de fée. Toute l’équipe du film s’y installe.

Le film de Cocteau, sorti en 1946, est la première version cinématographique du conte. Au moins dix autres versions ont été tournées depuis, dont celle signée par les studios Disney en 2017 avec Emma Watson dans le rôle titre.

Mais « l’original » est considéré par de nombreux critiques comme le meilleur film de ce conte jamais réalisé. Et c’est un « classique » du genre.

Peu de différences entre le manoir en pierre de taille d’aujourd’hui (résidence de Mme Maupas, veuve du Dr Philippe Maupas, chercheur et inventeur du vaccin contre l’hépatite B) et la bâtisse qui charmait Cocteau il y a près de quatre ans. vingt ans.

Pour ceux qui ont vu le film, la structure du bâtiment est reconnaissable, notamment avec sa tourelle hexagonale en forme de poivrière. L’escalier, où la Belle – interprétée par Josette Day – demande à son père de lui apporter la rose fatale, est en partie envahi par une végétation de lierre.

A l’occasion d’un festival, le comédien, metteur en scène et homme de théâtre Jean-Claude Brialy, s’est improvisé guide d’une journée à Touvoie. Et raconté quelques anecdotes du tournage. « Entre les avions survolant la propriété, la météo extrêmement changeante qui handicapait Henri Alekan, le directeur de la photographie et les pintades qui criaient plus fort que les actrices, le travail du réalisateur n’était pas facile au quotidien. »

Dans les archives NR, Mme Maupas affirme que « Normalement, l’équipe du film ne serait restée qu’une semaine. Mais les problèmes liés au bruit des avions et aux cris d’animaux ont prolongé le tournage d’un mois. »

« D’un coup d’œil, j’ai reconnu le décor »

Le poète, dans son journal de tournage, écrit à propos du moulin de Toouvoie : « D’un coup d’œil, j’ai reconnu le décor que je craignais de devoir construire. » Pourtant, il avait pensé qu’il ne trouverait jamais la maison qu’il avait en tête. « Je découvre ce petit manoir ci-dessous. Les Domaines nous l’avaient signalé il y a une cinquantaine d’années. La barrière au bord de la route ne payait pas de mine. Nous avons failli ne pas sortir de la voiture. Mais les ferrures qui servent à attacher les chevaux représentent une bête fabuleuse, voici la fenêtre des méchantes sœurs, les portes, l’escalier, le lavoir, le verger, l’écurie, la niche du chien, le chien, les arrosoirs , les tomates qui sèchent sur le rebord de la fenêtre, les légumes, les bâches, la Source, les volailles, les échelles, tout est à sa place… »dit le poète.

Le film a été un grand succès cinématographique.
© (Photo presse Zuma/Maxppp)

Pendant le tournage, Cocteau était malade : ses affections cutanées le torturaient et l’empoisonnaient et il travaillait avec un chapeau muni d’un voile noir pour se protéger. Une injection de pénicilline spécialement importée de New York le sauvera à la dernière minute.

Les conditions de vie de l’équipe sont également compliquées : en ces temps d’après-guerre, il est difficile de trouver des films, il y a des restrictions sur l’électricité et la nourriture aussi. Jean Marais, embauché dans la division Leclerc, bénéficiera d’une autorisation exceptionnelle pour participer au tournage… Avant de rentrer en Allemagne dès que le tournage sera terminé.

Le tournage sera aussi épique que le film est magique et poétique.

Une Source de légende

Le Moulin de Touvoie, qui s’appelait à l’origine « Molendus de Tevoie », est situé sur la route D77, entre Rochecorbon et Parçay-Meslay. Elle a été construite en 1225, peut-être à l’origine en bois. Juste avant, Étienne de Montagne avait fait construire, en 1220, la célèbre Grange de Meslay reliée à l’abbaye de Marmoutier.

Les structures originales seront transformées au 17e siècle avec l’ajout d’un moulin et d’une maison en pierre attenante. La roue et la meule de la tour étaient alimentées par l’eau de la Bédoire qui était amenée dans un aqueduc en bois qui pénétrait par une fenêtre à l’étage.

A l’époque gallo-romaine, il existait une civilisation d’agriculteurs dans le Val de Loire et on imagine que le site de Rochecorbon était cultivé à la même période. Par ailleurs, on sait qu’il y avait une ferme à Monteaux en 887 derrière le Manoir de Touvoie.

Tout près de la maison se trouve une Source à laquelle on attribue des propriétés magiques et thérapeutiques. Parmi les nombreuses légendes autour de cette fontaine de jouvence, on retrouve celle où Jeanne d’Arc y faisait boire son cheval et celle où Gabrielle d’Estrée, favorite d’Henri IV, y prenait ses bains.

L’origine du pouvoir de la Source est attribuée à Saint-Martin de L’Abbaye de Marmoutier qui, selon la légende, aurait donné à la Source le pouvoir de rajeunir ceux qui buvaient son eau.

Plus prosaïquement, l’eau de la Fontaine de Touvoie, selon les analyses chimiques, est pure et très aérée avec des traces de carbonate calcaire, d’alumine, de silice et de magnésie. Mais des effets magiques : ça ne sert à rien !

Le film et son tournage

Pour Cocteau, le décor du moulin de Toouvoie ressemble à son film : “Et rêve endormi. » Cependant, le tournage a été mouvementé et difficile. Et bien plus longtemps que prévu.

Belle, la plus jeune fille d’un marchand ruiné, dont les sœurs sont méchantes, demande à son père de lui apporter une rose. Sur le chemin du retour, il se perd dans la forêt. Le lendemain matin, il cueille une fleur, ce qui provoque la colère de la Bête, un monstre au corps d’homme et à la tête de lion qui vit reclus dans son château. En compensation de la fleur cueillie, la Bête exige le sacrifice du marchand ou d’une de ses filles. Belle décide de rejoindre le château de la Bête…

Au moment du tournage du film, Jean Marais avait 32 ans et était l’amant de Jean Cocteau. L’acteur souffre d’un furoncle à l’intérieur de la cuisse et son masque, qu’il faut trois heures pour réparer, provoque de l’eczéma. Certaines dents de Marais étaient recouvertes de vernis noir pour paraître pointues ; ses canines étaient couvertes de crocs retenus par de petits crochets, ce qui n’était pas très pratique pour manger.

Josette Day a 31 ans et s’est séparée récemment de Marcel Pagnol. Son rôle de Belle sera le plus connu de sa carrière, qu’elle quitte en 1950 pour épouser un homme d’affaires belge.

 
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