5 raisons qui suggèrent fortement que les sources de la pandémie sont dans un laboratoire

5 raisons qui suggèrent fortement que les sources de la pandémie sont dans un laboratoire
5 raisons qui suggèrent fortement que les sources de la pandémie sont dans un laboratoire
Atlantico : Une enquête du New York Times revient sur les origines du Covid-19. Le virus à l’origine de la pandémie est apparu à Wuhan, la ville où se trouve le plus grand laboratoire de recherche au monde sur les virus de type SRAS. La piste de ce laboratoire est-elle crédible ?

Étienne Decroly : La question des origines de la pandémie n’est pas résolue. La première hypothèse, soutenue par quelques articles scientifiques, suggère une émergence sur le marché de Wuhan. La deuxième hypothèse est que la contamination humaine résulte d’un accident de recherche. Cette hypothèse manque de preuves en raison de l’obstruction par la Chine des enquêtes sur les laboratoires de coronavirus à Wuhan. L’enquête du New York Times détaille les arguments en faveur d’un accident de recherche. C’est l’une des pistes plausibles pour l’origine du Covid-19. Il faudrait que l’OMS puisse mener des investigations pour résoudre cette question.

L’année précédant l’épidémie, l’institut de Wuhan avait-il proposé, des partenaires américains, de créer des virus ayant la caractéristique déterminante du SARS-CoV-2 ?

Un projet de recherche a été soumis à la DARPA. Ce projet d’étude, baptisé DEFUSE, consistait à échantillonner des coronavirus circulant dans les populations de chauves-souris du sud-est de la Chine afin d’identifier des virus à potentiel pandémique dans ces populations de chauves-souris. Le but de ce projet était de séquencer ces virus et d’en collecter un petit nombre pour les cultiver en laboratoire. Une partie du projet visait à construire des virus que l’on qualifie de « chimériques » afin de pouvoir voir si parmi tous les virus circulant certains pouvaient infecter des cellules humaines ou des souris transgéniques humanisées. Ce projet de recherche peut être vu par certains comme étant un projet qui aurait pu permettre d’isoler un coronavirus identique au SARS-CoV-2 ou de le construire grâce à des méthodes d’ingénierie moléculaire, dites de « gain de fonction ».

Le laboratoire de Wuhan a-t-il poursuivi ce type de travail dans de faibles conditions de biosécurité qui n’auraient pas pu contenir un virus aéroporté aussi infectieux que le SRAS-CoV-2 ?

Des travaux sur plusieurs virus chimériques ont été réalisés principalement dans le laboratoire de type BSL-2 et parfois BSL3 en Chine en 2016 et 2017. Aucune information n’indique que ce type de travaux aurait pu être réalisé dans le laboratoire de type BSL-4. . Concernant les conditions de biosécurité, traditionnellement, lorsque les chercheurs travaillent sur des virus de chauve-souris, on considère que le niveau de sécurité BSL-2 est suffisant et que le niveau BSL-3 est nécessaire lorsqu’on travaille sur des coronavirus pathogènes. chez les humains. À mon avis, le niveau BSL-2 n’est pas approprié pour travailler sur des virus à potentiel pandémique lors de la réalisation d’expériences de gain de fonction.

L’hypothèse selon laquelle le Covid-19 proviendrait d’un animal du marché aux fruits de mer de Huanan à Wuhan n’est étayée par aucune preuve solide. Cela doit-il poser des questions ?

Je ne dirais pas qu’il n’y a aucune preuve solide. Après la fermeture du marché, des échantillons ont été prélevés sur le marché. Des virus de type SARS-CoV-2 qui circulaient parmi les individus fréquentant ce marché ont été identifiés dans des échantillons environnementaux. Mais à ce jour, aucun virus progéniteur (virus parent direct) de l’épidémie n’a été identifié. L’hôte intermédiaire qui aurait pu héberger ces progéniteurs n’est pas non plus identifié. La difficulté de l’hypothèse de l’émergence du virus sur le marché est que l’espèce potentiellement à l’origine n’est pas clairement identifiée. Est-ce parce que l’échantillonnage n’a pas été rendu public ? Parce que cela n’a pas été fait de manière assez intensive ? À cause de l’obstruction politique des autorités chinoises ? Il n’est pas possible de répondre à cette question. C’est pourquoi l’enquête de l’OMS doit se poursuivre.

Manque-t-il encore des éléments clés pour déterminer si le virus provient du commerce d’espèces sauvages ?

Les éléments clés qui manquent sont l’identification de l’animal qui aurait pu transmettre ce virus à l’homme. Il existe un consensus sur le fait que cette famille de virus est largement présente chez les chauves-souris, même si aucun virus progéniteur n’a été découvert à ce jour chez les chauves-souris.

L’hypothèse classique de ce type d’émergence est que les chauves-souris infectent un hôte intermédiaire qui transmettra ensuite ce virus aux populations humaines. Cet hôte intermédiaire n’a pas été identifié et les débats dans la littérature scientifique ne sont pas concluants à ce stade.

Il existe également un débat dans la littérature quant à savoir s’il y a eu des franchissements de barrières multi-espèces, ce qui serait un argument en faveur de l’origine zoologique de l’épidémie.

Les experts débattent entre autres des méthodologies statistiques utilisées et de la qualité de l’échantillonnage. Pour l’heure, la question des origines du Covid-19 n’est pas totalement résolue.

Toutes ces raisons nous permettent-elles d’en savoir plus sur le risque de pandémie à l’avenir ? Cela obligera-t-il les laboratoires à changer certaines pratiques ?

Ce débat révèle qu’il existe deux possibilités crédibles permettant l’émergence de nouveaux virus. D’une part, un accident de recherche et de l’autre par zoonose. Il est important de limiter les deux types de risques. Concernant les risques zoonotiques, cela implique de bonnes pratiques de surveillance des épizooties (épidémies animales) qui pourraient potentiellement franchir la barrière des espèces. Il existe actuellement un exemple remarquable avec la grippe aviaire qui se transmet entre bovins aux Etats-Unis, avec les premiers cas de transmission à l’homme. Cela soulève évidemment la question de savoir pourquoi la surveillance n’est pas suffisante pour pouvoir lancer des mesures de contrôle vétérinaire suffisamment tôt pour prévenir les infections humaines.

Il faut également préserver les écosystèmes pour éviter que des animaux normalement présents dans les écosystèmes sauvages soient mis en contact avec des animaux d’élevage et transmettent ainsi des maladies qui pourraient ensuite être transmises à l’homme. Enfin, cela implique un meilleur contrôle des marchés dits humides sur lesquels sont vendus des animaux vivants.

Concernant l’aspect accident de recherche, il est important d’essayer d’avoir un consensus mondial et d’harmoniser au niveau mondial les réglementations de ces expériences en laboratoire et de mettre en place une agence internationale de régulation comme c’est le cas dans le domaine nucléaire. L’OMS réfléchit d’ailleurs actuellement à un programme de prévention des risques pandémiques, mais rencontre d’importantes difficultés. Le pire, c’est d’avoir des réglementations qui ne sont pas harmonisées au niveau mondial car cela conduit à délocaliser les expérimentations dans des endroits où les conditions de sécurité sont moins bonnes. Les expériences sont réalisées plus rapidement et coûtent moins cher.

Il est essentiel de trouver un consensus mondial afin d’élever le niveau de biosécurité pour certaines expériences plus à risque. Ma recommandation serait d’interdire les pratiques les plus dangereuses sur les virus à potentiel pandémique ou de les opérer uniquement dans des laboratoires offrant le plus haut niveau de sécurité, comme le laboratoire BSL-4. Cette discussion doit être entamée au niveau international pour que nous puissions avancer vers un monde plus sûr du point de vue du risque d’émergence de virus pour nous et pour nos enfants.

 
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