Après avoir été prolongée à plusieurs reprises depuis 2022, l’exonération permettant de payer ses courses alimentaires avec des titres-restaurant paie le prix de l’instabilité politique. A partir de ce mercredi 1er janvier, les 5,4 millions de salariés français détenteurs de ce moyen de paiement ne pourront l’utiliser que dans les restaurants, ainsi que dans les commerces et grandes surfaces proposant des offres à emporter – sandwiches et plats préparés. Plus besoin donc d’acheter de la farine, du riz, des pâtes ou même du fromage.
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C’est l’une des conséquences de la motion de censure, votée début décembre à l’Assemblée nationale, et qui a entraîné la chute du gouvernement de Michel Barnier. Dans le projet de loi de finances du précédent exécutif, cette mesure devait être reconduite pour l’année 2025. En attendant la nouvelle version du texte d’ici la mi-février, la règle historique s’applique, pour le plus grand plaisir des restaurateurs. Ces derniers mois, l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), le lobby du secteur, multiplie les sorties. Son célèbre président, le chef Thierry Marx, a dénoncé un « scandale ». Selon ses calculs, le manque à gagner annuel pour les professionnels de la restauration s’élèverait à 576 millions d’euros.
Les habitudes des salariés ont évolué
On oublie facilement que le titre restaurant est avant tout un avantage pour le salarié. Si l’employeur doit prendre en charge entre 50 et 60 % de la valeur faciale du billet, le salarié paie le reste du montant. Pourquoi ne pas lui laisser toute liberté de dépenser cet argent comme il l’entend, tant que l’objectif reste de se nourrir ? Depuis la pandémie de Covid-19, les habitudes des salariés ont considérablement changé. Certes, le développement du télétravail a limité les déjeuners au restaurant. Mais le secteur se taille toujours la part du lion. Selon une étude de la Commission nationale des chèques-repas, sur 14 milliards d’euros de dépenses en titres-restaurant en 2023, 8,6 milliards d’euros sont allés à la restauration collective et 2,9 milliards à la grande distribution.
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Par ailleurs, les Français sont de plus en plus incités à opter pour des produits faits maison et à cuisiner chez soi des produits frais, recommandés pour leur santé. Se limiter aux repas préparés en grande surface – le plus souvent des aliments ultra-transformés – serait une contradiction en termes de santé publique. Renommer « chèques-repas » pourrait contribuer à changer les mentalités. Thierry Marx propose également la création d’un « chèque nourriture », mais distinct du système actuel. Ou comment créer la confusion et compliquer la tâche des employeurs… Encore un sujet à débattre sur la table de François Bayrou.