Arianespace se trouve à un tournant de son histoire. Le groupe a annoncé, jeudi 19 décembre, le départ surprise de son patron emblématique, en poste depuis avril 2013 : Stéphane Israel, 53 ans, quittera l’entreprise chargée de la commercialisation des lanceurs Ariane et Vega le 31 décembre. à David Cavaillolès, 36 ans, actuellement chez Capgemini et encore peu connu dans le secteur aéronautique. Son nom a été retenu après examen d’un certain nombre de candidats internes et externes, rapporte Arianespace.
Comment expliquer le départ soudain de Stéphane Israel à la tête de cette filiale d’ArianeGroup, une joint-venture 50/50 entre Airbus et Safran ? Le leader va «consacrez-vous à un nouveau projet professionnel en janvier 2025», précise l’entreprise sans apporter plus de précisions, sauf qu’elle ne fera plus partie d’aucun de ces groupes. Soulignons cependant la cohérence du calendrier : le dirigeant voguera vers de nouvelles aventures au moment où Arianespace récupère ses capacités de lancement après environ deux années marquées par une perte d’autonomie spatiale pour l’Europe : Ariane 6 a fait sa première inauguration le 9 juillet. et s’apprête à assurer son premier vol opérationnel en février. Quant au lanceur Vega C, il a décollé le 5 décembre.
Un carnet de commandes bien rempli pour Arianespace
Stéphane Israel a été l’un des principaux artisans d’Ariane 6 ainsi que de la transformation d’Arianespace, devenue filiale d’ArianeGroup en 2017. »Stéphane a marqué l’histoire d’Arianespace à travers des étapes décisives, de l’apogée d’Ariane 5 au vol inaugural d’Ariane 6a déclaré Martin Sion, président exécutif d’ArianeGroup, dans un communiqué. Dans la lignée d’ArianeGroup, il est également fortement engagé dans la transformation d’Arianespace.» Stéphane Israel aura supervisé pas moins de 108 lancements.
«Après avoir consolidé la gamme des lanceurs Ariane 5, Vega et Soyouz, et accompagné le développement des lanceurs de nouvelle génération Ariane 6 et Vega C, Stéphane Israel a réorienté l’offre d’Arianespace en passant des doubles lancements de satellites géostationnaires à des solutions adaptées aux grandes constellations en basse altitude. l’orbite et la diversité croissante des satellites», rappelle le groupe dans son communiqué. De quoi atteindre un rythme de 15 lancements en 2021. Arianespace compte actuellement un carnet de commandes d’une trentaine de lancements pour Ariane 6 et 15 pour Vega C.
Un nouveau venu pour insuffler une nouvelle vie
Mais son successeur a une tâche immense devant lui, tant l’industrie spatiale européenne a été distancée ces dernières années, notamment par l’américain SpaceX. Diplômé de l’Ecole Polytechnique (promotion 2008) et de l’ENSAE Paris (2012), David Cavaillolès n’est pourtant pas une figure bien connue de l’industrie aéronautique et spatiale. Il a débuté sa carrière dans le secteur public français : il débute en 2013 au sein de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), puis rejoint l’Inspection générale des finances pendant deux ans.
C’est en 2017 qu’il se lance réellement dans le domaine spatial, en tant que conseiller ministériel chargé de la politique spatiale française, aux côtés de la ministre Frédérique Vidal. Il a ensuite travaillé, de 2019 à aujourd’hui, au sein de la société de conseil en stratégie Capgemini. “David Cavillolès est bien connecté aux données», glisse un acteur de l’industrie spatiale française, y voyant peut-être la volonté de s’orienter davantage vers les services.
L’arrivée d’un tel profil à la tête d’Arianesapce reflète sans doute la nécessité pour Arianespace d’amorcer un renouveau face à un paysage industriel en complète reconfiguration dans ce secteur, entre multiplication des micro-lanceurs, concurrence future avec d’autres grands lanceurs et agressivité commerciale de SpaceX.