La première ligne TGV entre Paris et Berlin est inaugurée ce lundi. Un voyage de huit heures et un pas de plus franchi dans l’amitié franco-allemande. Mais pour l’écrivain et éditeur Arthur Chevallier, il n’est pas sûr que cela suffise…
L’amitié franco-allemande, pour l’instant, n’existe pas. Deux choses doivent être distinguées. Les efforts de Paris et de Berlin pour se mettre d’accord d’un côté. Et la véritable amitié entre Français et Allemands d’autre part. Les voyages officiels et les déclarations communes sont une bonne chose. Mais cela ne suffit pas. L’amitié n’est pas de la politique. C’est de l’affection, c’est sincère.
Nous sommes les plus grands pays d’Europe, il y en a donc toujours un qui veut prendre le dessus sur l’autre. Notre amitié est simple, c’est la clé de la stabilité. Et cela commence après la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1950, des villes françaises et allemandes se jumelaient. Avec de Gaulle, cela prend une nouvelle dimension.
En 1962, le général effectue une tournée en Allemagne. Il fait des discours super sympas, et en allemand. En 1963, le Traité de l’Elysée est signé. Cela marque la réconciliation et le début de la coopération. De là, les présidents français et les chanceliers allemands mettront en scène leur amitié, à l’image de ce qui s’est passé en 1984. François Mitterrand et le chancelier Helmut Kohl lui rendent hommage en se tenant la main sur un champ de bataille de la Première Guerre mondiale, à Douaumont. Une des images les plus fortes de la réconciliation.
L’avis tranché d’Arthur Chevallier : France-Allemagne, amitié et rivalités – 16/12
Pas d’amis, mais des alliés
Cette rivalité entre la France et l’Allemagne date d’une époque où l’Allemagne ne s’appelait pas encore Allemagne. Avant, c’était la Prusse. La Prusse est un petit État qui deviendra de plus en plus puissant. Et il faut être honnête, les choses ne se sont jamais bien passées entre nous. Nous avons passé notre - à nous détester et à nous faire la guerre. Nous les avons affrontés au milieu du XVIIIe siècle, pendant la guerre de Sept Ans, et nous avons perdu. C’est une humiliation. Nous avons pris notre revanche pendant la Révolution, à la bataille de Valmy, en 1792. Napoléon les a battus à plusieurs reprises. Après, ça se calme un peu… mais ça ne durera pas.
Nouvelle guerre en 1870. A cette époque, Napoléon III est sur le trône. Nous vivons une aventure mémorable. L’Allemagne nous prend l’Alsace et la Lorraine. Et jusqu’à la Première Guerre mondiale, notre obsession était la vengeance et la récupération de ces deux régions. À la fin du XIXe siècle, les enfants étaient élevés dans la haine de l’Allemagne. Alors on part de loin, quand même.
Mais pourquoi ne pouvons-nous pas devenir amis ? Parce que nous sommes un pays souverain et que nous n’avons pas d’amis. Nous avons des alliés. Nous aimons l’Allemagne lorsqu’elle joue dans le sens de nos intérêts. C’est un pays comme les autres. Ces dernières années, l’Allemagne ne nous a fait aucun cadeau au sein de l’Union européenne. Les Français le savent, pourquoi s’en contenter ? Pour être aimé, il faut être aimable.