Ce samedi soir, en direct de l’Arène du Futuroscope de Chasseneuil-du-Poitou (Vienne), près de Poitiers, 30 Miss régionales âgées de 18 à 34 ans défileront dans l’espoir de succéder à Ève Gilles et de couronner Miss France 2025. Ce concours de beauté reste l’un des les programmes les plus regardés chaque année. Il y a un an, le sacre d’Ève Gilles, Miss Nord-Pas-de-Calais devenue Miss France 2024, avait été suivi en moyenne par 7,5 millions de personnes, soit l’une des plus grosses audiences sur TF1.
Cette compétition, autant critiquée que regardée, a connu quelques petites « révolutions » pour rompre avec son image anachronique. Depuis 2022, les règles de participation ont été assouplies, sous la pression des critiques. Auparavant, l’âge limite pour postuler était de 24 ans. Ce critère a été supprimé, ce qui permet à 12 Miss de concourir cette année. Miss Martinique, Angélique Angarni-Filopon, est la candidate « la plus âgée » à se présenter au concours à 34 ans. Une femme de 52 ans s’est également présentée cette année, mais sa candidature n’a pas dépassé le niveau régional. Les femmes mariées ou pacsées avec enfants, ainsi que les femmes trans et celles portant des tatouages visibles peuvent également participer. “Ces critères ont contribué à renforcer les stéréotypes sexistes et âgistes, notamment celui de la jeune femme “pure” et désirable, disponible, aux yeux des hommes”, analyse Chloé Thibaud.
journaliste et auteur indépendant, spécialiste des sujets de culture et de société.
Des carrosseries « standardisées »
Pourtant, la concurrence est sous le feu des critiques depuis plusieurs années, encore plus à l’ère du #MeToo. Cet assouplissement des règles n’a en effet pas vraiment révolutionné la compétition, les candidates continuant de répondre à des standards de beauté très standardisés. Les seuls critères physiques en vigueur sont ceux de la chirurgie esthétique, interdite sauf en cas de chirurgie reconstructive ; et celle de hauteur, 1,70 mètre minimum, pour les questions de robes similaires qui ne peuvent être raccourcies. « Mais on se doute que le poids entre en jeu ! », argumente le journaliste. Il n’y a aucune restriction sur les mesures telles que le poids, se vante l’organisation du concours.
En réalité, s’il n’y a aucune obligation de respecter des normes physiques, c’est une règle insidieuse. “Même si cela n’est pas explicitement formulé, une réalité demeure : dans l’imaginaire collectif, Miss France est jeune et mince, tout simplement”, ajoute l’auteur. Toute la difficulté d’un concours de beauté réside dans son nom : le physique de ces femmes, répondant à une vision d’un corps très « normé », reste le critère numéro un. “Ce qui est important aujourd’hui, c’est de ne plus réduire ces femmes à leur apparence physique et surtout de faire comprendre aux spectateurs masculins que les femmes, même les plus belles et les plus sexy, ne sont pas des objets à leur disposition”, note Chloé Thibaud.
Depuis plusieurs années, les organisateurs du concours se sont efforcés de mettre en valeur l’engagement et le niveau d’études des Miss, de laisser plus de place à leur portrait lors du défilé pour contrebalancer l’aspect physique. Une bonne idée… et une mauvaise idée. “Evidemment, cela apporte une “preuve” qu’il ne s’agit pas seulement d’un corps, juste d’un physique agréable à regarder, mais cela renforce la stigmatisation de ceux qui n’ont pas ce bagage intellectuel”, souligne le journaliste.
Montrer l’exemple pour changer les mentalités
Comment rendre cette compétition plus moderne ? « Le progrès réel et majeur auquel on pourrait s’attendre serait que toutes les femmes, cisgenres, transgenres, valides, handicapées, aux cheveux courts, aux cheveux longs, racisées, blanches, minces, grosses, puissent participer et être jugées de la même manière. manière, sans recevoir des torrents de haine de la part du public. Nous sommes encore très, très loin de cette société. Il suffit de rappeler le cybersexisme subi par Ève Gilles en 2024 « à cause » de sa coupe de cheveux pour le mesurer », rappelle Chloé Thibaud.
Car la question est aussi celle du public, qui « apprécie particulièrement les ingrédients fondamentaux de la rencontre », a analysé Virginie Spies, maître de conférences à l’université d’Avignon et analyste des médias, et n’est peut-être pas prêt à accueillir plus de diversité. Le changement doit-il venir d’un autre côté ? « La télévision et ceux qui la font doivent montrer l’exemple, c’est essentiel pour changer les mentalités. Justement, il faut profiter de ces opportunités de programmes très regardés pour créer un éveil des consciences », ajoute Chloé Thibaud.
Populaire auprès des concurrents et des téléspectateurs
L’évolution de cette compétition, qui est aussi le miroir de notre société, se fait donc lentement. A l’inverse, les Pays-Bas ont décidé d’arrêter ce concours après 35 ans d’existence, jugé “plus d’actualité” et de le transformer en une plateforme dédiée à la santé mentale et au partage d’histoires positives. En France, ce concours reste très populaire, tant auprès des téléspectateurs que des candidats. Remporter cette couronne de Miss France reste encore un rêve pour de nombreuses femmes, en témoigne les nombreux concours régionaux et locaux. C’est aussi, pour les élus, un tremplin pour leur carrière, une manière d’aborder des mondes qu’ils n’auraient pas pu connaître et une possibilité de donner de la visibilité à leurs engagements.
L’élection de Miss France 2025 est à suivre ce samedi 14 décembre, à partir de 21h10, sur TF1. Chloé Thibaud,
Desire violence, at Hachette Pratique, 22 euros.
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