Marc Quentin aura eu une œuvre fructueuse à Rochefort, où il fut architecte de la ville de 1958 à 1979, juste avant Bruno Coussy. Son nom est apparu dans le débat sur l’avenir de l’hôpital Saint-Charles, il y a une quinzaine d’années, et pas en termes glorieux. Alors que le bar bleu de sept étages avec toit-terrasse était souvent qualifié de « vilaine verrue », le nom de son designer Marc Quentin était terni. Une injustice pour cet architecte de talent qui a apporté à Rochefort, plutôt triste et grise à l’époque, un souffle de modernité et une touche de légèreté.
Né en 1921 à Amiens, ce jeune homme issu d’un milieu bourgeois a étudié à Paris. En 1946, il est diplômé de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts et de l’Ecole Spéciale d’Architecture. Entre-temps, il rencontre Yolande Gros, élève et fille des seigneurs de Mons et Belmont à Royan. C’est en l’épousant que Marc Quentin est arrivé dans la cité balnéaire. Le couple aura deux enfants : Didier, ancien adjoint au maire de Royan, et Bruno.
Un bel architecte
Une aubaine pour ce jeune architecte attiré par la reconstruction de la ville rasée en 1945. « Il côtoiera les urbanistes venus construire la pensée urbaine à Royan, où le domaine de l’architecture est en ébullition ! », commente Frédéric Chasseboeuf, guide conférencier du service du patrimoine de Rochefort. Petit détail : le bureau de Marc Quentin, sensible à la création et à l’avant-garde, admirateur de Le Corbusier et Robert Mallet-Stevens, est situé dans la maison Prouvé !
Il n’est pas toujours facile de décrire le style de Quentin, d’autant qu’il a connu des périodes, « peut-être en fonction de ses différents collaborateurs », précise Frédéric Chasseboeuf. On peut encore dire qu’il était un homme de son temps et un architecte d’envergure régionale. Dans le « Guide architectural de Royan 1950 » (1), l’auteur Antoine-Marie Préaut écrit : « Il est décrit comme un architecte minimaliste, suivant le principe d’économie maximale de moyens, dans la lignée des modernistes du moment. » Pour être efficace, il travaille les bonnes proportions et les détails qui font la beauté du travail. Une influence par touche, mais elle est là.
Outre sa signature à Royan où il réalise nombre des villas les plus soignées de la Reconstruction, il est également architecte de la Ville de Rochefort à partir de 1958, succédant à René Lavoine, fils de Léon. « Initialement, ses bureaux étaient situés dans les locaux situés de part et d’autre de la Porte du Soleil, à l’entrée de l’arsenal. Ensuite, le maire de l’époque, Jean-Louis Frot, les a repris pour d’autres fonctions municipales », se souvient son fils, Bruno Quentin.
Un vent de Royan
Tandis que l’époque Lavoine père et fils, à qui l’on doit entre autres la maternité de l’ancien hôpital Saint-Charles ou l’école Zola, a fait entrer Rochefort dans la modernité, avec Marc Quentin, Rochefort est entrée dans la modernité. Dans la ville de Colbert, il se verra confier de grands projets municipaux. Sa patte ? Des éléments royaux font écho à la vie balnéaire onirique : toits-terrasses, volumes cubiques, hauteurs variables, cages d’escalier et pavés de verre, pierre sur les murs latéraux, couleurs et céramiques, souci du détail et de la décoration.
Pour le comprendre, regardons les écoles Pergaud, Anatole-France (1964-1968), Herriot, Saint-Exupéry, l’église Saint-Paul, la gare routière (disparue depuis), l’hôpital Saint-Charles et sa chapelle (1972). ). ), l’hôpital de jour de la rue Peltier. Mais aussi la piscine municipale (1970), les tribunes du stade de rugby Henri-Robin et les 19 pavillons de la cité Neptune.
Marc Quentin, décédé en 1997, a également signé la restauration de la Coupe d’Or recouverte de bleu, le nouvel aménagement de la place Colbert qui a tant incité Demy à filmer ses « Demoiselles » en 1966, le gros œuvre et l’aménagement intérieur de la Corderie au époque de sa renaissance à partir de 1976.
Lors de l’inauguration de l’hôpital, Rochefort vit surtout qu’il disposait enfin d’un hôpital grand et moderne.
C’est pourquoi Marc Quentin et son œuvre méritent considération. « En 1972, lors de l’inauguration de l’hôpital, la notion de patrimoine n’existait pas et Rochefort a surtout vu qu’elle disposait, comme les autres, enfin d’un grand hôpital moderne », raconte Frédéric Chasseboeuf. En effet, un objet est célébré à sa naissance, puis il devient démodé ou kitsch, avant de devenir le chouchou des amateurs de vintage ! Saint-Charles a ainsi évité de peu la démolition pour être aujourd’hui réhabilité tout en respectant son style brutaliste.
Le portrait de Marc Quentin ne serait pas complet si l’on oubliait de dire que l’homme était simple et affable, doux mais aussi passionné et d’une vive curiosité intellectuelle.
(1) Éditions Bonne Anse 2012.