à Mayotte, les architectes alertent sur l’urgence de reconstruire des logements décents

Outre le manque d’eau et les coupures d’électricité, à Mayotte, les sinistrés ont parfois complètement perdu leur logement. Face à l’urgence de la situation, le Premier ministre a annoncé un appel à projets pour construire des logements « immédiatement constructibles ». Une erreur estiment Camille Cozon Abdourazak et Patrick Coulombel, tous deux architectes.

Publié le 19/12/2024 10:02

- de lecture : 3min

Dégâts dans la commune de Mamoudzou, à Mayotte dans l’océan Indien, le 18 décembre 2024, après le passage du cyclone Chido qui a traversé l’archipel. (DIMITAR DILKOFF / AFP)

Le président de la République est arrivé à Mayotte dans la matinée du jeudi 19 décembre. L’une des urgences à laquelle il sera d’abord confronté est celle de la reconstruction des logements et des bâtiments publics. Mardi, François Bayrou sur 2 parlait déjà d’une opération commando : «Nous allons lancer un appel à projets pour que les architectes, les étudiants en architecture et les grandes entreprises puissent proposer des modèles immédiatement assemblables. Cela nous a pris cinq ans pour Notre-Dame, je pense qu’il faut viser à aller beaucoup plus vite..

Un appel bien sûr entendu par deux architectes : Camille Cozon Abdourazak, à Mayotte, et Patrick Coulombel, co-fondateur des Architectes de l’Urgence, en France métropolitaine. Sur place pourtant, Camille Cozon Abdourazak alerte d’abord sur l’état des terrains. De nombreux défrichements semblent nécessaires avant même d’envisager une reconstruction. “Le paysage ne ressemble pas du tout à ce que l’on connaît habituellement. Tout est rasé en effet, il ne reste plus rien, plus d’habitations, plus de végétation.n, insiste-t-elle. De son côté, Patrick Coulombel considère que la première chose à faire, «il s’agira d’assurer la sécurité, que nous souhaitons démarrer rapidement auprès des personnes qui sont déjà sur place, comme Camille et d’autres« .

Camille Cozon Abdourazak et Patrick Coulombel désapprouvent tous deux la vision de François Bayrou qui évoque «modèles immédiatement montables» : «Pour un logement permanent, c’est assez simple, il faut refaire les couvertures. En revanche, en matière de logement précaire, il ne faut pas répéter ce qui se fait depuis des années», prévient l’architecte mahorais. Et en effet, alors que les secours continuent de rechercher les disparus dans les décombres, nombreux sont ceux qui constatent l’insalubrité des bâtiments, fragilisés par le cyclone. Sans logement, certains sinistrés reconstruisent déjà dans les bidonvilles, des abris de fortune avec les mêmes blocs de béton et les mêmes tôles que les maisons effondrées, d’autant plus que la météo n’est pas clémente en ce moment : «c’est le déluge. Aujourd’hui, je ne sais pas comment les gens font», ajoute-t-elle.

“Je comparerais la situation à celle des pays en développement où les problèmes sont à peu près les mêmes, c’est-à-dire une réelle précarité des populations.”

Patrick Colombel

franceinfo

Pour Patrick Colombel, l’urgence de la situation nécessite aussi des dérogations à certaines normes. “Il va falloir travailler autrement, on va être obligé de se soustraire à toutes les normes et à tout le système français, parce que sinon ça va coûter une fortune», explique le co-fondateur des Architectes de l’Urgence. L’architecte insiste aussi sur la nécessité de travailler”autant que possible avec la population locale et avec les ressources locales, comme la brique compressée fabriquée sur place, qui coûtera moins cher. « Nous devons apporter le moins de choses possible, car nous n’avons pas beaucoup de - », » partage Camille Cozon Abdourazak, tout en étant conscient que « la majorité des matériaux seront importés ».

 
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